En prison, environ 22 000 personnes – soit 31% de la population carcérale – travaillent, alors que le droit du travail ne s’applique toujours pas entre les murs. La rémunération est indécente – entre 20 et 45% du Smic – et la rémunération à la pièce, interdite depuis 2009, est encore fréquente. Les travailleurs détenus ne peuvent se prévaloir d’aucune forme d’expression collective ou de représentation syndicale. Ils n’ont droit à aucune indemnité en cas de chômage technique ou de maladie non-professionnelle, ne bénéficient pas de congés payés, et ne peuvent saisir l’inspection du travail. La majorité des activités qui leur sont proposées sont des tâches répétitives et non qualifiantes, qui n’ont parfois plus cours à l’extérieur.
Nombreuses sont les instances, dont l’OIP, qui dénoncent depuis des années la situation archaïque du travail en prison. La réforme votée en 2021 apporte quelques améliorations nécessaires, en instaurant un « contrat d’emploi pénitentiaire » et en encadrant notamment la procédure de recrutement, de suspension et de rupture de la relation de travail, le temps de repos et la durée du travail. Les travailleurs détenus bénéficieront également d’une forme de protection sociale, comme l’indemnisation en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle, le droit à l’assurance chômage à l’issue de la détention ou de nouvelles modalités de calcul pour rendre effective la cotisation à l’assurance vieillesse. Mais la réforme est loin de faire entrer le droit du travail en prison : les travailleurs restent privés de nombreux droits sans que cela ne puisse se justifier par des contraintes inhérentes à la détention. Et la relation qui les lie aux donneurs d’ordre reste profondément inégalitaire.
Car le rôle et la conception du travail en prison n’ont, eux, pas évolué. Les prisonniers restent avant tout une main d’œuvre peu chère, flexible et entièrement dépendante des variations d’activité des donneurs d’ordre, le travail carcéral un instrument de gestion de la détention, bien loin de l’objectif d’émancipation et de réinsertion préconisé par l’Organisation internationale du travail. Outre l’application du droit du travail et l’augmentation de l’offre de travail, poursuivre cet objectif impose que le travail soit plus qualifiant et articulé à la formation professionnelle.

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