Source : BVA-États généraux de la condition pénitentiaire, « Consultation en vue des États Généraux de la condition
pénitentiaire – Résumé par thèmes », octobre 2006
les conditions générales de détention
Taux d’insatisfaction des détenus : 82 %
Taux d’insatisfaction globale des autres acteurs du monde pénitentiaire : 85 %
« Plus de 8 détenus sur 10 considèrent que leurs conditions de vie au quotidien sont insatisfaisantes. Il s’agit là du plus fort taux d’insatisfaction exprimé par les détenus au travers de la consultation. Pour y remédier, ils évoquent à même hauteur (près de 9 fois sur 10) la nécessité de “mettre en place des installations sanitaires (douches, toilettes), préservant l’intimité de la personne“ et celle de “permettre un accès quotidien des détenus aux activités, à la formation ou au travail“. La troisième action prioritaire consiste à leurs yeux à “assurer à chaque détenu l’accès à un revenu minimal“. Les niveaux d’insatisfaction exprimés par les acteurs du monde pénitentiaire au sujet des conditions de détention sont les plus élevés apparus lors de la consultation. Ils sont généralement supérieurs à celui exprimé par les détenus. Ainsi il est quasi unanime pour les avocats (c’est leur première source d’insatisfaction), légèrement inférieur même s’il reste très élevé chez les travailleurs sociaux, les intervenants extérieurs (seconde source d’insatisfaction), les familles (première source d’insatisfaction), les personnels de santé (troisième source d’insatisfaction) et les magistrats. Il est à noter qu’une légère majorité de surveillants considère la situation comme insatisfaisante. De façon massive et quasi unanime, l’ensemble des acteurs du monde pénitentiaire à l’exception des intervenants extérieurs évoquent la nécessité de “mettre en place des installations sanitaires (douches, toilettes), préservant l’intimité de la personne“ comme l’action la plus prioritaire. Figurent ensuite, dans des proportions équivalentes, la nécessité de “permettre un accès quotidien des détenus aux activités, à la formation ou au travail“ et celle de “respecter les conditions minimales de superficie, de chauffage, d’éclairage et d’aération des cellules“. »
le maintien et le développement des liens familiaux
Taux d’insatisfaction des détenus : 77 %
Taux d’insatisfaction globale des autres acteurs du monde pénitentiaire : 74 %
« Plus de 3 détenus sur 4 considèrent que la situation qui prévaut en matière de maintien des liens familiaux est insatisfaisante. Pour y remédier, ils estiment nécessaire les actions qui consistent à (par ordre de priorité) “affecter tout détenu dans un lieu de détention proche de son domicile ou de celui de sa famille“, “augmenter la fréquence et la durée des parloirs“, “permettre aux détenus de rencontrer leur famille et leurs proches dans des conditions qui respectent le droit à l’intimité“ ainsi que “systématiser les autorisations de sortie en cas de circonstances familiales graves“. Le taux d’insatisfaction varie de façon sensible selon les acteurs du monde pénitentiaire concernés. Il est nettement supérieur à celui exprimé par les détenus dans le cas des familles et des avocats, et dans une moindre mesure par les intervenants extérieurs et les personnels de santé. Il est légèrement inférieur tout en restant largement majoritaire pour ce qui est des travailleurs sociaux et des magistrats. L’insatisfaction est minoritaire parmi les surveillants. L’action consistant à “affecter tout détenu dans un lieu de détention proche de son domicile ou de celui de sa famille“ recueille l’assentiment majoritaire (citée 4 fois sur 7 comme la première priorité par les familles, les surveillants, les avocats et les intervenants extérieurs), suivie de celle visant à “permettre aux détenus de rencontrer leur famille et leurs proches dans des conditions qui respectent le droit à l’intimité“ (service social, magistrats) puis celle consistant à “systématiser la desserte des lieux de détention par les transports en commun“. »
L’enseignement et les activités socioculturelles
Taux d’insatisfaction des détenus : 65 %
Taux d’insatisfaction globale des autres acteurs du monde pénitentiaire : 70 %
« Près des deux tiers des détenus considèrent que la situation qui concerne l’offre et les conditions dans lesquelles s’effectuent l’enseignement et les activités socioculturelles est insatisfaisante. Pour y remédier, ils souhaitent voir mis en œuvre (par ordre décroissant) les actions consistant à “rémunérer les détenus qui suivent un enseignement ou une formation“, puis “proposer davantage d’activités sportives et culturelles“ et enfin, “proposer à tous les détenus des programmes d’enseignement et de formation“. Le taux d’insatisfaction des différents acteurs du monde pénitentiaire varie sensiblement selon les catégories de répondants. Il est très supérieur à celui exprimé par les détenus dans le cas des familles, des avocats, des intervenants extérieurs et des personnels de santé. Il apparaît également fortement, mais dans une moindre mesure, chez les travailleurs sociaux, les magistrats. Même s’ils sont relativement partagés sur cette question, les surveillants estimant la situation insatisfaisante sont minoritaires. Trois actions obtiennent principalement l’assentiment des différents acteurs du monde pénitentiaire. La première consiste à “proposer à tous les détenus des programmes d’enseignement et de formation“ (citée 5 fois sur 7 comme la première priorité par les familles, les travailleurs sociaux, les magistrats, les personnels de santé et les intervenants extérieurs), la seconde à “donner aux mineurs le même enseignement que celui proposé en milieu scolaire“ et la troisième à “proposer aux détenus des cours d’apprentissage de la langue française“. Ces deux dernières actions se distinguent de celles qui doivent être mises en avant prioritairement selon les détenus. »
Le travail, l’emploi et la formation professionnelle
Taux d’insatisfaction des détenus : 77 %
Taux d’insatisfaction globale des autres acteurs du monde pénitentiaire : 86 %
« Plus de 3 détenus sur 4 considèrent que la situation qui concerne l’offre et les conditions de travail et de formation professionnelle est insatisfaisante. Pour y remédier, ils font apparaître comme largement prioritaire l’action qui consiste à “assurer une rémunération du travail en prison“ (citée 7 fois sur 10 comme la première priorité). Par ailleurs, ils estiment nécessaire de “proposer à tout détenu qui en fait la demande un parcours de qualification professionnelle par le biais d’une formation, d’une activité d’insertion ou d’un emploi“ puis d’“appliquer en prison les dispositions du Code du travail“. Le taux d’insatisfaction des différents acteurs du monde pénitentiaire est, pour la quasi-totalité des catégories de répondants, nettement supérieur à celui exprimé par les détenus. La situation de l’offre et des conditions de travail et de formation professionnelle mécontente fortement, par ordre décroissant, les travailleurs sociaux (dont c’est la première source d’insatisfaction), les magistrats (seconde source d’insatisfaction), les personnels de santé (seconde source d’insatisfaction), les intervenants extérieurs (troisième source d’insatisfaction), les familles, les surveillants puis les avocats. Un très fort consensus entoure l’action consistant à “proposer à tout détenu qui en fait la demande un parcours de qualification professionnelle par le biais d’une formation, d’une activité d’insertion ou d’un emploi“ (citée 6 fois sur 7 comme la première priorité par toutes les catégories de répondants à l’exception des travailleurs sociaux). Les deux autres actions prioritaires aux yeux des acteurs du monde pénitentiaire sont celle visant à “appliquer en prison les dispositions du Code du travail“ et celle consistant à “permettre de concilier travail, formation et enseignement“. Cette dernière priorité étant le seul élément distinctif au regard des attentes exprimées par les détenus. »
L’accès aux soins médicaux
Taux d’insatisfaction des détenus : 61 %
Taux d’insatisfaction globale des autres acteurs du monde pénitentiaire : 65 %
« Plus de 6 détenus sur 10 considèrent que la situation de l’accès aux soins médicaux est insatisfaisante. L’action consistant à “permettre la consultation d’un médecin à toute heure de la nuit et du week-end“ se détache nettement parmi celles qu’ils estiment devoir être mises en œuvre de façon prioritaire. Apparaissent ensuite les actions visant à “augmenter les moyens de fonctionnement des services médicaux“ puis de “développer les permissions de sortir pour consulter un médecin à l’extérieur“. Le taux d’insatisfaction exprimé par les différents acteurs du monde pénitentiaire est globalement identique à celui des détenus même s’il figure en second rang parmi les plus bas exprimés au travers de leur consultation. Il varie cependant très sensiblement selon les catégories de répondants. Il est très supérieur dans le cas des familles, des avocats et des intervenants extérieurs. Il est équivalent pour les magistrats et les travailleurs sociaux. L’appréciation de la situation de la part des personnels de santé est manifestement partagée, tandis que celle des surveillants traduit une de leur insatisfaction la plus minoritaire. À noter que l’accès aux soins médicaux est classé au dernier rang des sujets d’insatisfaction chez les personnels de santé. Un consensus très fort parmi tous les acteurs à l’exception des familles entoure le fait de considérer que l’action prioritaire consiste à “augmenter les moyens de fonctionnement des services médicaux“, suivie par la nécessité de “permettre la consultation d’un médecin à toute heure de la nuit et du week-end“. Les actions visant à “proposer à tout détenu des actions d’éducation à la santé et à la prévention des risques“ et “garantir le respect des prescriptions médicales et des régimes alimentaires spécifiques“ se partageant les suffrages dans un troisième temps. »
L’accès aux soins psychiatriques
Taux d’insatisfaction des détenus : 60 %
Taux d’insatisfaction globale des autres acteurs du monde pénitentiaire : 83 %
« 6 détenus sur 10 considèrent que la situation de l’accès aux soins psychiatriques est insatisfaisante. De façon très nette, l’action consistant à “transférer systématiquement en milieu hospitalier spécialisé les détenus souffrant de graves troubles psychiatriques“ est jugée prioritaire par les détenus. Suivent les actions destinées à “augmenter les moyens des SMPR et des équipes psychiatriques des UCSA“ puis “protéger la confidentialité des consultations psychiatriques“ et “créer des SMPR au sein de tous les lieux de détention“. Il est important de noter que le taux d’insatisfaction global des différents acteurs du monde pénitentiaire présente le plus grand écart avec celui exprimé par les détenus, se situant à un niveau très supérieur (plus de 20 points). L’appréciation de la situation est particulièrement négative parmi les magistrats (il s’agit là de leur première source d’insatisfaction), les travailleurs sociaux et les avocats, puis dans une moindre mesure, parmi les intervenants extérieurs, les surveillants (dont c’est néanmoins la seconde source d’insatisfaction), les personnels de santé et les familles. Les trois actions devant être mises en œuvre de l’avis de l’ensemble des catégories de répondants correspondent à celles retenues par les détenus, y compris dans leur niveau de priorisations. Ainsi, pour les acteurs du monde pénitentiaire, il s’agit tout d’abord de “transférer systématiquement en milieu hospitalier spécialisé les détenus souffrant de graves troubles psychiatriques“ (citée 4 fois sur 7 comme la première priorité par les familles, les surveillants, les avocats et les intervenants extérieurs), puis d’ “augmenter les moyens des SMPR et des équipes psychiatriques des UCSA“ et enfin, de “créer des SMPR au sein de tous les lieux de détention“. »
La prise en charge de la toxicomanie, de l’alcoolisme et des autres dépendances
Taux d’insatisfaction des détenus : 59 %
Taux d’insatisfaction globale des autres acteurs du monde pénitentiaire : 74 %
« Le taux d’insatisfaction des détenus au regard de la prise en charge des personnes dépendantes à des produits comme le tabac, l’alcool, le cannabis ou les médicaments est le plus bas exprimé au travers de leur consultation (moins de 6 détenus sur 10). Dans ce contexte, “proposer à toute personne entrant en prison un bilan confidentiel concernant sa consommation de drogues, d’alcool, de tabac“, puis “proposer systématiquement des consultations spécialisées en prise en charge des dépendances“ et enfin, “consacrer davantage de moyens à la prévention et la prise en charge de l’alcoolisme et de la toxicomanie“ apparaissent comme les actions prioritaires selon les détenus. Un taux d’insatisfaction de près de 14 points supérieur à celui exprimé par les détenus caractérise l’appréciation de la situation par les différents acteurs du monde pénitentiaire. Le mécontentement est ainsi particulièrement sensible aussi bien parmi les avocats, les intervenants extérieurs, les travailleurs sociaux que les magistrats, les personnels de santé et les familles. Il est à noter que l’insatisfaction parmi les surveillants est très majoritaire et même supérieure à celle exprimée par les détenus. Les attentes des différents acteurs du monde pénitentiaire convergent avec celles exprimées par les détenus. Citées 4 fois sur 7 comme prioritaires (par les familles, les travailleurs sociaux, les magistrats et les personnels de santé), l’action devant prioritairement être mise en œuvre consiste à “proposer systématiquement des consultations spécialisées en prise en charge des dépendances“. Par ailleurs, les surveillants, les avocats et les intervenants extérieurs jugent prioritaire l’action visant à “proposer à toute personne entrant en prison un bilan confidentiel concernant sa consommation de drogues, d’alcool, de tabac“. L’action consistant à “consacrer davantage de moyens à la prévention et la prise en charge de l’alcoolisme et de la toxicomanie“ apparaît comme la troisième priorité. »
La prévention des suicides
Taux d’insatisfaction des détenus : 79 %
Taux d’insatisfaction globale des autres acteurs du monde pénitentiaire : 72 %
« Le taux d’insatisfaction des détenus au regard de la prévention des suicides est l’un des plus forts apparus au terme de leur consultation (en troisième rang après les questions liées aux “conditions générales de détention“ et du “régime de détention des prévenus“), ce mécontentement concernant pratiquement 8 personnes sur 10. Dans ce contexte, trois actions sont prioritaires aux yeux des détenus : “interdire le placement au quartier disciplinaire des personnes présentant un risque suicidaire“, puis “proposer un soutien psychologique aux détenus lors des moments à risque élevé (arrivée en prison, procès, sortie de prison)“ et enfin, “former le personnel pénitentiaire et les intervenants en prison à la prévention du suicide“. Marquée par un taux d’insatisfaction inférieur de plus de 7 points à celui exprimé par les détenus, la prévention des suicides est jugée comme défaillante par près de 7 acteurs du monde pénitentiaire sur 10 (11e source d’insatisfaction pour les acteurs et 3e pour les détenus). Le mécontentement est particulièrement élevé parmi les avocats, les familles, les intervenants extérieurs et les personnels de santé. Il est moindre chez les magistrats et les travailleurs sociaux (dont il apparaît comme la dernière source d’insatisfaction au terme de la consultation) même s’il demeure largement majoritaire. Il est sensiblement minoritaire parmi les surveillants. L’action consistant à “proposer un soutien psychologique aux détenus lors des moments à risque élevé (arrivée en prison, procès, sortie de prison)“ est jugée 6 fois sur 7 comme la première priorité aux yeux des différents acteurs du monde pénitentiaire à l’exception des surveillants. La seconde consiste à “former le personnel pénitentiaire et les intervenants en prison à la prévention du suicide“, tandis que la troisième suppose de “systématiser l’entretien à l’arrivée en prison avec un médecin psychiatre“. Cette dernière action étant le seul élément distinctif au regard des attentes exprimées par les détenus. »