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Centre pénitentiaire de Baie-Mahault : une personne paraplégique détenue dans des conditions indignes

Malgré un certificat médical indiquant que son état de santé n’est pas compatible avec une incarcération dans l’établissement, Monsieur D., paraplégique et en fauteuil roulant, est détenu depuis sept mois au centre pénitentiaire de Baie-Mahault, dans des conditions qui portent une atteinte grave à sa dignité : contraint de partager sa cellule avec un co-détenu, il dort à même le sol et ne peut se déplacer, faute d’aménagements adaptés.

Incarcéré à Baie-Mahault depuis le 1er mai 2022, Monsieur D., paraplégique et en fauteuil roulant, partage sa cellule pour personne à mobilité réduite (PMR) avec un codétenu, en fauteuil également. Or cette cellule n’a pas été conçue pour accueillir deux détenus. Selon Monsieur D., elle n’est dotée que d’un seul lit, le contraignant à dormir sur un matelas au sol. De plus, alors qu’il dispose d’une prescription médicale pour bénéficier d’un matelas anti-escarres, celui-ci ne lui a pas été remis. L’espace disponible ne permet pas aux deux hommes de se déplacer simultanément avec leurs fauteuils, ni d’avoir un frigo et une table, ce qui les obligerait à manger en posant leurs assiettes sur leurs genoux. À la suroccupation de la cellule s’ajoutent des aménagements inadaptés. Faute d’un lavabo situé à une hauteur adéquate, Monsieur D. indique par exemple se laver les dents avec l’évier à hauteur du menton. Enfin, aucun des deux co-détenus n’ayant la capacité de faire le ménage de la cellule, Monsieur D. serait contraint de payer en cigarettes un autre détenu pour qu’il le fasse à leur place.

L’accessibilité des espaces communs de l’établissement serait également très problématique. Si un arrêté de 2010 introduit l’exigence, pour les établissements neufs, qu’au minimum un ascenseur soit présent dans certains secteurs de la prison, aucun texte ne contraint les bâtiments existants, tel que le centre pénitentiaire de Baie-Mahault construit en 1996, à s’en équiper. Sa cellule étant située au rez-de-chaussée, Monsieur D. explique n’avoir donc pas accès aux espaces situés aux étages supérieurs, comme la bibliothèque, les salles d’enseignement ou encore les parloirs, et être contraint de rester en cellule 22h30 sur 24. Devant son insistance pour recevoir la visite de sa conjointe, l’administration pénitentiaire lui aurait proposé d’être porté dans les escaliers par deux détenus auxiliaires, tout en signant une décharge de responsabilité de l’administration en cas d’accident. Contactée par l’OIP à plusieurs reprises au sujet de la situation de Monsieur D., la direction de l’établissement n’a apporté aucune réponse.

Cette situation perdure alors même que, dès le mois de mai 2022, un certificat établi par l’unité sanitaire de Baie-Mahault indiquait que Monsieur D. « présent[ait] une contre-indication formelle à l’incarcération dans l’établissement », et préconisait son « transfert en UHSI au plus vite (EPSNF) »[1].

L’administration pénitentiaire est pourtant tenue, en vertu de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, de tenir compte de l’état de santé et du handicap des personnes détenues[2]. Dans un arrêt de 2006, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH)[3] avait estimé que « la détention d’une personne handicapée dans un établissement où elle ne peut se déplacer et en particulier quitter sa cellule par ses propres moyens [constituait] un « traitement dégradant » au sens de l’article 3 de la Convention », qui interdit la torture et les peines ou traitements inhumains ou dégradants.

*Mise à jour le 8 février 2023 : depuis la publication de ce communiqué, nous avons appris, début janvier, le décès de Monsieur D. des suites d’un AVC.

Contact presse : 07 60 49 19 96


[1]  L’UHSI (unité hospitalière sécurisée interrégionale) est une unité prenant en charge les hospitalisations programmées de plus de 48 heures des personnes détenues au sein d’un établissement public de santé. L’EPSNF – établissement public de santé national de Fresnes –est un établissement de santé pénitentiaire français situé dans la commune de Fresnes,

[2] Selon l’article 22 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, les restrictions liées à la vie en détention doivent « tenir compte de l’âge, de l’état de santé, du handicap et de la personnalité de la personne détenue ».

[3] CEDH 24 oct. 2006, Vincent c/France, n°6253/03

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