L’Observatoire international des prisons (OIP) et l’Association des avocats pour la défense des droits des détenus (A3D) ont saisi ce jeudi le juge des référés de l’indignité des conditions de détention au centre pénitentiaire de Saint-Etienne La Talaudière. Ils demandent que soient prises en urgence des mesures pour mettre fin aux atteintes graves aux droits fondamentaux des personnes qui y sont incarcérées.
Le centre pénitentiaire de Saint-Etienne est notoirement surpeuplé, vétuste et insalubre. Au 1er janvier 2023, le taux d’occupation au quartier homme était de 158,1 %, et de nombreuses personnes détenues étaient contraintes de partager une cellule à trois, l’une d’elle dormant sur un matelas posé au sol. À cette promiscuité s’ajoute un manque d’intimité : seule une demi-cloison en planche de bois extrêmement fine complétée d’un drap sépare les toilettes du reste de la cellule. « La surpopulation carcérale est un enfer pour les détenus » et source de tensions accrues au sein de l’établissement, relevait ainsi la députée Andrée Taurinya lors d’une visite effectuée en novembre 2022, à laquelle une journaliste de l’OIP a pu se joindre.
Les personnes détenues dans l’établissement sont en outre exposées à la grande vétusté des locaux et équipements : en août 2022, une partie du toit s’est ainsi envolée, et une poutre se serait effondrée en pleine coursive. L’eau s’infiltre dans les cellules par les châssis des fenêtres, les murs sont cloqués, et des flaques se forment régulièrement au sol. L’état du quartier disciplinaire est particulièrement déplorable. « Les murs sont couverts de graffitis, parfois de couleur marron. Nous nous demandons si des déjections ont été utilisées afin de couvrir le mur qui n’a pas été nettoyé depuis longtemps. Le sol est insalubre. Les toilettes sont entièrement rouillées. Des détritus sont coincés entre la fenêtre et la grille extérieure obstruant davantage les minces filets de lumière », relevait la députée. La situation n’est pas mieux à l’extérieur : jonchées de déchets, les cours de promenade n’offrent ni préau, ni sanitaire en état de fonctionnement. L’eau de pluie stagne faute d’écoulement, créant une flaque empêchant l’accès aux cabines téléphoniques. Dans le couloir extérieur qui mène aux cours, l’odeur est atroce, mélange d’ordure et d’urine, et les rats prolifèrent. À ces conditions sanitaires désastreuses s’ajoutent de graves carences dans l’accès aux soins : en novembre 2022, le délai d’attente pour voir le psychologue s’élevait à plus d’un an.
Cette situation n’est pas nouvelle. En 2019, un rapport du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) dressait un état des lieux alarmant des conditions de détention dans l’établissement et demandait à l’administration de garantir des conditions dignes d’incarcération. Le rapport dénonçait également un usage abusif des fouilles intégrales et les conditions indignes dans lesquelles elles étaient pratiquées. Les personnes détenues étaient notamment régulièrement fouillées à nu dans les douches, « à la chaine » selon leurs mots, et sans intimité. Une pratique humiliante, qui se poursuivrait encore aujourd’hui, d’après de récents témoignages reçus par l’OIP.
Sur près de soixante pages, le référé déposé ce 9 mars énumère tous les dysfonctionnements relevés au sein de la prison et les atteintes graves qu’ils portent aux droits fondamentaux des personnes détenues. Il se conclut par 32 injonctions que les requérants demandent au juge de prescrire, sous astreinte, au ministère de la Justice ainsi qu’au ministère de la Santé, pour remédier en urgence à l’indignité des conditions de détention qui règne à la prison de Saint-Etienne-La Talaudière.
Communiqué co-signé par l’OIP et l’A3D
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