Par une décision du 19 mai, notifiée ce jour, le Conseil d'État a renvoyé devant le Conseil constitutionnel la question de la constitutionnalité de la loi du 25 février 2008, qui permet l'enfermement illimité des condamnés à de lourdes peines à l'issue de l'exécution de celles-ci, par le biais de la rétention de sûreté. Cette transmission était demandée par l'OIP dans le cadre d'une procédure intentée par l'association contre le décret d'application de cette loi.
Le Conseil d’État a fait droit à cette demande, considérant qu’était sérieux le grief tiré de ce qu’en renvoyant à un décret le soin de déterminer les droits des personnes placées en rétention, le législateur avait méconnu sa compétence exclusive en matière de protection des libertés publiques (article 34 de la Constitution).
Il appartient désormais aux membres du Conseil constitutionnel de se prononcer dans les trois mois sur la conformité de ces dispositions à la Loi fondamentale. S’ils suivent l’argumentation de l’OIP, les Sages rendront une décision qui aura pour effet d’abroger les dispositions litigieuses, contraignant le Parlement à définir précisément les conditions d’exercice des droits fondamentaux en centre de rétention.
La décision du Conseil d’Etat, qui intervient moins d’une semaine après que le Comité contre la torture de l’ONU a demandé au gouvernement français de « considérer l’abrogation » de la rétention de sûreté, fragilise davantage un dispositif critiqué de toute part, et dont l’ancien président du Conseil constitutionnel, Pierre Mazeaud, avait assuré qu’il vaudrait à la France d’être condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme.