72 809. C’est le nombre de prisonniers au 1er novembre : un record historique. Jamais, en France, ils n’avaient été si nombreux derrière les barreaux.
Chaque jour, de nouvelles personnes sont enfermées à deux ou à trois, parfois plus, dans des cellules de 9 mètres carrés, jusqu’à 22 heures sur 24, dans des établissements souvent vétustes et insalubres. 43 624 personnes sont incarcérées dans des établissements surpeuplés à plus de 120%. Au 1er novembre, 2 225 prisonniers étaient contraints de dormir sur un matelas au sol. Des conditions matérielles de détention particulièrement dégradées et dégradantes.
L’explosion du nombre de personnes détenues aggrave encore la qualité de leur prise en charge, déjà lacunaire. L’offre extrêmement réduite d’activité, de travail ou encore de soin et la quasi-inexistence de préparation à la sortie compromettent tout parcours d’insertion ou de réinsertion.
En janvier 2020, la Cour européenne des droits de l’Homme condamnait la France pour l’indignité de ses prisons, et enjoignait aux autorités de garantir « la résorption définitive de la surpopulation carcérale »[1]. Près de trois ans plus tard, la situation est encore pire. Après une décroissance collectivement saluée dans le contexte de la crise sanitaire, l’inflation carcérale a repris de plus belle. Depuis juin 2020, le nombre de personnes détenues a augmenté de 25,3 %. Cette augmentation n’est pas nouvelle : ces quarante dernières années, la France est passée de 31 500 à plus de 72 800 prisonniers. Et elle risque malheureusement de ne pas ne s’arrêter : en avril 2021, le gouvernement prévoyait 80 000 prisonniers à l’horizon 2027[2].
Pour tenter d’y faire face, les gouvernements successifs n’ont de cesse de construire de nouvelles places de prison. Un choix politique dont le coût financier, social et humain est alarmant. En vain : le taux d’occupation moyen dans les maisons d’arrêt atteint aujourd’hui 142,8%.
Il est urgent de rompre avec cette spirale. Ce ne sera possible qu’en s’attaquant aux causes de cette situation : des orientations de politique pénale de plus en plus répressives, qui se traduisent par des incarcérations toujours plus nombreuses et toujours plus longues[3]. Pour cela, il faut repenser la place et le rôle de la prison dans notre société. Afin d’amorcer, enfin, une baisse de la population carcérale. C’est le chemin pris par l’ensemble des pays de l’Union européenne à l’exception de la France[4]. C’est la condition sine qua non pour mettre fin aux traitements inhumains et dégradants qui sévissent depuis de trop longues années dans nos prisons.
Contact Presse : Sophie Larouzée-Deschamps – 07 60 49 19 96
[1] Arrêt JMB c/France du 30 janvier 2020
[2] « Jean Castex s’engage sur les 15 000 places de prison supplémentaires », Le Monde, 19 avril 2021.
[3] La durée de détention moyenne est passée de 5,8 mois en 1982 à 11,8 mois en 2020 (Minju, Séries statistiques des PPSMJ, 1980-2021)
[4] Jean-Baptiste Jacquin, « En infographies : des peines de prison de plus en plus sévères », Le Monde, 14 octobre 2021.