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Surpopulation carcérale : la politique du pire

Le 28 septembre, à la maison d’arrêt de Nîmes, une centaine de prisonniers ont refusé de regagner leurs cellules pendant plus de quatre heures, pour dénoncer des conditions de détention inhumaines. Les syndicats pénitentiaires venaient d’alerter sur le nouveau record de surpopulation franchi dans cette prison, par ailleurs infestée de rongeurs et de punaises de lit : 267 % d’occupation au quartier hommes, où des matelas au sol ont été installés dans presque toutes les cellules. Le 28 septembre toujours, une mutinerie avec prise d’otages éclatait au quartier centre de détention de Majicavo (Mayotte), où la surpopulation, chronique, atteint là aussi 267 % – fort heureusement sans conséquences humaines irrémédiables pour le personnel pénitentiaire.

Dans les deux cas, des équipes de sécurité renforcées sont intervenues pour mettre fin à ces mouvements désespérés de protestation, dont les protagonistes et participants, aucun doute à avoir, ont été ou seront sévèrement sanctionnés. Rappelons que toute expression collective, quelle que soit sa forme – courrier, refus d’intégrer les cellules ou autres –, est strictement interdite en détention, et qu’elle est passible de vingt jours de quartier disciplinaire, voire le cas échéant de poursuites pénales. Comme à l’accoutumée, à aucun moment ne seront prises en considération les causes ayant pu conduire à ces passages à l’acte.

Un même jour, deux événements à des milliers de kilomètres l’un de l’autre, comme pour mieux signifier l’étendue et le caractère explosif de la crise du système carcéral français dans son ensemble. En quelle langue faut-il une fois encore marteler une évidence : la surpopulation carcérale constitue en soi une maltraitance grave des personnes détenues pouvant, dans les situations les plus invivables, induire des réactions d’extrême détresse. Génératrice d’innombrables privations de droits les plus élémentaires, attentatoire à la dignité, elle crée ainsi, record après record (onze au cours des douze derniers mois), les conditions des drames d’aujourd’hui et de demain. Dans une indifférence glaçante du nouveau gouvernement, qui en appelle à plus d’incarcérations !

Combien de signaux d’alarme de ce type, de tragédies individuelles ou collectives faudra-t-il déplorer encore pour que l’on décide de mettre au centre des préoccupations pénales et pénitentiaires le traitement humain de personnes humaines ?

par Jean-Claude Mas

Cet article a été publié dans le Dedans Dehors N°124 : Dix fois plus de suicides en prison qu’à l’extérieur