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« Je paie doublement mes erreurs chaque jour »

Surpopulation, humidité, odeurs d'égouts, insalubrité, traitements inhumains et dégradants, non-respect des droits... Dans un courrier adressé à l'OIP, un jeune homme de 22 ans livre un témoignage édifiant des conditions de détention dans les prisons françaises.

« Actuellement incarcéré depuis juin 2016 en maison d’arrêt, je me suis décidé à vous joindre ce courrier dans l’espoir que les choses changent, dans l’espoir que quelqu’un puisse m’entendre et m’écouter.

Mes conditions de détention ont été particulièrement délicates et le sont toujours. Après être passé au quartier arrivants, sans même une plaque chauffante ni d’eau chaude, je me suis retrouvé plusieurs mois dans une cellule d’environ 9 m² où je dormais à même le sol. J’ai passé un hiver fenêtre cassée. L’humidité était telle que parfois, la nuit, des gouttes d’eau me tombaient sur la tête quand je dormais dans le lit du haut. L’odeur des égouts qui me brûlait le nez et me réveillait était insupportable et l’est toujours. Les toilettes qui fuient, les trous dans les murs, les cellules où il n’y a que du béton au sol… Et les douches aux centaines de moucherons sans aucune aération. En période de forte chaleur il est presque impossible de se laver.

Certains surveillants ne viennent pas nous chercher pour l’école sous prétexte que ça ne sert à rien. Mais pour moi l’école est le noyau de la réinsertion, la lutte contre l’illettrisme et la récidive. Les parloirs sont insalubres, les soins médicaux aléatoires, l’administratif plus ou moins géré à leur guise. Les installations électriques sont bien souvent mal protégées à l’intérieur des cellules : un soir après un feu, ma cellule a été enfumée, nous l’avons réintégrée 20 minutes après. La suie s’était déposée sur toute la surface de la cellule, j’ai été contraint de dormir sans couverture ni drap et de nettoyer avec une éponge toute la cellule en pleine nuit.

« Une société se juge à l’état de ses prisons. » Cette prison ne reflète pas l’image d’une société tournée vers l’avenir et n’a pas pour objectif de traiter tous les citoyens de la même manière et les aider à trouver leur place à l’intérieur de celle-ci.

La jurisprudence dit : seules les conditions de détention caractérisent une atteinte à la dignité humaine sont de nature à engager la responsabilité de l’administration. L’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, l’article 22 de la loi du 24 novembre 2009, l’article 715 du code de procédure pénale sont ainsi violés. C’est le cas pour bon nombre de détenus ; ici, il y a environ quarante matelas au sol.

Certains membres de l’administration partagent avec nous leur ras-le-bol et leur dégoût de telles conditions en 2017. Dans un univers où la loi du silence règne et où les injustices s’enchaînent, il est difficile de se reconstruire. Je paie doublement mes erreurs chaque jour. Au bout de treize longs et durs mois de détention au pays des droits de l’homme qui prône la liberté d’expression pour tous, je souhaiterais être écouté pour que nos droits cessent d’être bafoués. Psychologiquement, cela m’est de plus en plus insupportable.

J’ai 22 ans, je subis ma première incarcération et suis révolté par le traitement qui m’est infligé. J’assume la totalité de mes écrits et espère que les mots seront plus efficaces que la violence… »

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