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Centre de détention d’Eysses (47) : les préconisations de l’inspection du travail restées sans suite

La section française de l'Observatoire International des Prisons (OIP) informe des faits suivants :
A l’issue de sa visite au centre de détention d’Eysses le 7 avril dernier, l’inspecteur du travail relève que deux des quatre ateliers où les détenus travaillent présentent « de graves dysfonctionnements mettant purement et simplement les détenus et les personnels de l’administration pénitentiaire en situation de danger ». Dans un courrier adressé le 29 avril 2005 au directeur du centre de détention, l’inspecteur du travail fait part de ses observations, rappelant que « le dossier dont disposent [ses] services (…) révélait déjà en 1999, 2000 et 2001 nombre des dysfonctionnements [qu’il a] pu constater de nouveau cette année ».

Le risque d’incendie est le principal dysfonctionnement relevé une fois de plus par l’inspection : « à mon sens ce risque est le risque majeur auquel sont exposés détenus et personnels de votre administration du fait d’une part de l’absence de conformité des installations électriques de ces ateliers, d’autre part du fait de l’utilisation importante de produits hautement inflammables au sein de ces mêmes ateliers sans aucun respect des règles relatives à l’entreposage ou à la manipulation de ce type de produits ». L’inspecteur rappelle également que le contrat de concession signé entre l’administration pénitentiaire et les concessionnaires stipule que « l’administration pénitentiaire est responsable de la sécurité liée au risque incendie ».
L’atelier de fabrication de chaises pour le compte d’une entreprise de Villeneuve-sur-Lot stocke et utilise des vernis « hautement inflammables ». L’inspection constate qu’ « aucune mesure n’est prise pour limiter tout début de propagation d’incendie » et interpelle le 29 avril 2005 par courrier le directeur de l’entreprise sur sa « gestion du risque chimique plus qu’aléatoire », lui demandant « à réception de ce courrier de [se] mettre en conformité avec la réglementation ». Il est également demandé « de procéder de manière régulière aux mesures de concentration des agents chimiques pouvant présenter un risque pour la santé et la sécurité des travailleurs ». Les équipements de protection individuelle devront « être attribués, comme leur nom l’indique, individuellement », et stockés « dans de bonnes conditions pour éviter l’apparition de risque supplémentaires lors de leur utilisation (dépôt de poussière dans les masques à cartouche notamment) ».
Un second atelier de travail du bois, géré également par une entreprise de Villeneuve-sur-Lot, présente quant à lui un « risque mécanique » lié à la non-protection des parties dangereuses des machines de découpe et de ponçage mises à disposition des détenus et un « risque cancérogène lié à l’exposition aux poussières de bois inhalables ». Rappelant au concessionnaire que « ces observations [lui] avaient déjà été formulées par différents courriers notamment en 2000 et 2001 », l’inspecteur du travail lui demande le 29 avril de veiller « à mettre à disposition des personnes (…) les équipements de protection individuelle adaptés lorsque la protection collective est considérée comme insuffisante ou défaillante », et de prévoir « le raccordement des outils portatifs au système d’aspiration général ».
Contactée par l’OIP le 17 mai 2005, la direction du centre de détention confirme les problèmes relevés, et signale avoir transmis le dossier à la direction régionale des services pénitentiaires (DRSP) de Bordeaux. Elle signale cependant que l’établissement pénitentiaire est extrêmement vétuste et que les budgets alloués ne permettent pas de réaliser tous les travaux de rénovation nécessaires. Les locaux médicaux sont en cours de réfection, la cuisine devrait être rénovée en 2006. Une demande va cependant être faite par le directeur auprès de la DRSP pour remplacer une armoire électrique.

L’OIP rappelle :

– L’article L 230-2 du Code du travail qui prévoit que « le chef d’établissement prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs de l’établissement, y compris les travailleurs temporaires. Ces mesures comprennent des actions de prévention des risques professionnels, d’information et de formation ainsi que la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés ».

– L’arrêt Wachter du Conseil d’Etat, en date du 26 mai 1978, selon lequel « l’administration pénitentiaire est responsable de la sécurité des prisonniers ».

– Le rapport de la Commission européenne des droits de l’homme, H. c/ Suisse du 8 juillet 1993, qui énonce qu’ « une obligation positive spécifique pèse sur l’Etat aux termes de l’article 3 [interdiction des traitements dégradants] afin de protéger l’intégrité physique des personnes privées de liberté ».