Saisi par l’OIP, l’Ordre des avocats du barreau de Toulouse et le SAF, le juge des référés du tribunal administratif considère que les conditions de détention au centre pénitentiaire de Toulouse-Seysses méconnaissent gravement les droits fondamentaux des personnes incarcérées. Il ordonne à l’administration de mettre en œuvre onze mesures urgentes pour améliorer la situation.
Un communiqué commun de la section française de l’Observatoire international des prisons, de l’Ordre des avocats du barreau de Toulouse et du Syndicat des avocats de France (SAF).
Dans une décision rendue le 4 octobre 2021, le juge des référés estime que les conditions de vie au sein de la prison de Toulouse-Seysses portent une atteinte grave et manifestement illégale au droit à la vie, au droit de ne pas subir de traitements dégradants ainsi qu’au droit au respect de la vie privée et familiale des personnes incarcérées. Il avait été saisi le 16 septembre dernier par l’OIP et l’Ordre des avocats du barreau de Toulouse afin qu’il soit enjoint aux pouvoirs publics de prendre des mesures pour mettre un terme l’indignité des conditions de détention dans cet établissement pénitentiaire surpeuplé. Les organisations se basaient notamment sur le constat alarmant dressé par la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) dans des recommandations en urgence publiées le 13 juillet 2021.
Le juge toulousain prescrit la mise en œuvre de onze mesures urgentes. Celles-ci portent d’abord sur les conditions de vie en cellule qu’il revient à l’administration « d’améliorer ». En particulier, le juge des référés exige que l’ensemble des toilettes des cellules soient isolées du reste de la pièce par un dispositif de séparation qui fait aujourd’hui défaut. Relevant la vétusté et l’inadaptation des cellules réservées aux personnes à mobilité réduite, il prescrit leur « réfection » et leur « réorganisation ». En outre, afin de permettre aux personnes détenues de ne pas rester confinées plus de 22 heures par jour dans leur cellule surpeuplée, le juge des référés demande le rétablissement du « rythme antérieur de deux promenades par détenu et par jour pour les détenus placés en cellules dites “triplées” », si la situation sanitaire le permet. Enfin, l’ordonnance exige le renforcement « de la lutte contre les rats, blattes et autres nuisibles » présents en très grand nombre dans la prison, y compris dans les cellules.
Plusieurs injonctions visent par ailleurs les espaces extérieurs. Le juge des référés prescrit ainsi au ministre de la Justice d’équiper les cours de promenades des quartiers maisons d’arrêt « d’un abri, de bancs et d’installations permettant l’exercice physique », de nettoyer et de rénover les installations sanitaires de ces cours, et de procéder à leur dératisation. Il exige aussi l’aménagement des cours de promenade de la nurserie et du service médico-psychologique régional, « de manière à rendre leur configuration et leur aspect plus conformes aux besoins particuliers des populations de détenus qu’elles accueillent ». En outre, s’agissant des abords des bâtiments, souvent jonchés de détritus, le juge des référés prescrit au ministre de la Justice de « définir une procédure de nettoyage plus développée que celle utilisée actuellement et de recruter en qualité d’auxiliaires dix détenus affectés spécifiquement à cette mission ».
Le juge des référés s’est également penché sur le « climat de violences et d’insécurité permanent » qui affecte l’établissement. Relevant l’existence de nombreuses violences entre personnes détenues mais aussi entre personnes détenues et membres du personnel, il demande à l’administration de procéder à l’« enregistrement systématique (…) de tout fait de violence, qu’il mette en cause un détenu ou un agent », afin de permettre « outre une action disciplinaire et de prévention (…), la protection de l’intégrité physique des détenus et la garantie de leurs droits ». Plus largement, le juge des référés ordonne un meilleur suivi des plaintes et demandes des personnes incarcérées en prescrivant que toute requête donne lieu « à l’octroi d’un récépissé, quelle qu’en soit la forme ».
L’administration pénitentiaire et le ministre de la Justice ne sont pas les seuls destinataires des injonctions prononcées par le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse. Relevant que l’accès aux soins des personnes détenues est insuffisamment garanti, l’ordonnance du 4 octobre 2021 prescrit au ministre de la Santé de définir, en collaboration avec le ministre de la Justice, « un protocole de coordination des prises en charge médicales d’urgence et spécialisées assurant que les soins, consultations et examens relatifs aux pathologies les plus graves et aux urgences soient prises en charge dans un délai raisonnable ». Il enjoint par ailleurs au préfet de la Haute-Garonne d’organiser sous un mois une réunion du conseil d’évaluation du centre pénitentiaire de Toulouse Seysses. Ce conseil, présidé par le préfet, regroupant les différents acteurs de la chaîne pénale et censé suivre annuellement la situation de l’établissement, n’avait plus été réuni depuis 2018.
Si, plusieurs autres de leurs demandes ont été écartées par le Tribunal administratif de Toulouse, au motif notamment qu’elles excédaient l’office du juge des référés, l’OIP, l’Ordre des avocats du barreau de Toulouse et le SAF ne peuvent qu’être satisfaits des mesures de sauvegardes ordonnées, dont ils vérifieront avec attention la pleine exécution par l’administration.
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