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Maison d’arrêt de Nanterre : quand l’hôpital valide l’ingérence pénitentiaire dans l’organisation des soins

Dans un mail du 14 décembre, transmis à l’OIP, la direction de l’hôpital de Nanterre a validé la demande de l’administration pénitentiaire d’interdire sauf urgence l’accès aux soins le week-end à une liste de 43 détenus de la maison d’arrêt de Nanterre jugés dangereux. Une décision qui soumet les décisions médicales aux impératifs sécuritaires.

À la suite de divers faits de violence survenus à la maison d’arrêt de Nanterre, le CHSCT[1] de l’hôpital de Nanterre avait, au printemps dernier, demandé à l’administration pénitentiaire d’assurer la sécurité du personnel soignant exerçant dans l’établissement. Arguant d’un déficit de personnel de surveillance le week-end pour garantir des conditions de sécurité satisfaisantes, la direction de la prison avait alors dressé une liste de 43 détenus « présentant un risque sécuritaire potentiel » pour lesquels l’accès à l’unité sanitaire serait interdit, sauf urgence, les samedis et dimanches.

Le dimanche 11 décembre dernier, une infirmière a néanmoins effectué des soins sur un détenu dont le nom figurait sur cette liste, entendant ainsi respecter la prescription médicale selon laquelle il devait bénéficier de soins quotidiens. Le jour même, la directrice de la maison d’arrêt a adressé un mail aux directions de l’unité sanitaire et de l’hôpital de rattachement de la maison d’arrêt dans lequel elle demandait que les prescriptions médicales « soient modifiées de façon à répondre aux impératifs organisationnels ». En réponse, la secrétaire générale de l’hôpital a présenté ses excuses et assuré que la liste serait prise en compte. Elle valide ainsi le primat de l’organisation pénitentiaire sur la délivrance des soins.

Depuis 1994, la prise en charge sanitaire des personnes détenues relève pourtant du ministère de la santé et non plus de l’administration pénitentiaire, avec notamment pour objectif qu’elles puissent bénéficier d’une « qualité et une continuité de soins équivalentes à celles offertes à l’ensemble de la population ». Dans ses règles pénitentiaires, le Conseil de l’Europe rappelle par ailleurs que « les détenus doivent avoir accès aux services de santé proposés dans le pays sans aucune discrimination fondée sur leur situation juridique »[2]. Des principes régulièrement mis à mal : il est fréquent que les impératifs de sécurité l’emportent sur les besoins sanitaires et que l’administration pénitentiaire tente d’interférer dans l’organisation des soins. Il est inquiétant cependant que les autorités sanitaires acceptent de s’y soumettre.

Selon le chef de service de l’unité sanitaire, contacté par l’OIP, les médecins accepteront de limiter les soins le week-end si cela n’a aucune incidence pour la santé des patients, par exemple en évitant les samedis et dimanches pour des soins à effectuer trois fois par semaine. Il est exclu qu’ils réduisent leurs prescriptions pour éviter les jours de week-end en cas de soins justifiés à fréquence quotidienne. L’unité sanitaire prend donc acte de l  a liste des 43 mais continuera d’assurer sa mission obligatoire de continuité des soins.

Par Odile Macchi


[1] Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail.
[2] Règle pénitentiaire européenne n° 40.3.

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