La discipline

Tous les détenus, prévenus ou condamnés, y compris ceux placés en semi-liberté, en placement à l'extérieur ou sous surveillance électronique, sont soumis au régime disciplinaire de l'établissement dans lequel ils se trouvent incarcérés. Ce régime est déterminé par le Code de procédure pénale qui définit les fautes, les sanctions et la procédure disciplinaires. Aux sanctions disciplinaires – dont la plus dure reste le placement en cellule disciplinaire (mitard) – peuvent s’ajouter éventuellement les « sanctions » du juge de l'application des peines, par exemple le retrait de crédits de réduction de peine, ou le retrait de la mesure d'aménagement de peine (semi-liberté, placement à l'extérieur ou sous surveillance électronique). Certaines fautes disciplinaires constituent en outre des infractions pénales, faisant encourir une nouvelle condamnation qui peut venir s’ajouter à la sanction disciplinaire.

Les fautes disciplinaires qui peuvent être reprochées aux personnes détenues sont limitativement énumérées dans le Code de procédure pénale (articles R.57-7-1 à R.57-7-4 du Code de procédure pénale). Elles sont classées en trois catégories, de la plus grave à la moins grave : fautes du premier degré, fautes du deuxième et faute du troisième degré. Plus la faute est grave, plus la durée de la sanction de cellule disciplinaire à laquelle s’expose l’auteur est lourde. Une faute du premier degré peut ainsi, selon la nature précise de la faute, être sanctionnée de 20 voire 30 jours maximum de mise en cellule disciplinaire, une faute du second degré de 14 jours maximum et une faute du troisième degré de 7 jours maximum (article R. 57-7-47 du CPP).

C’est le président de la commission de discipline, devant laquelle la personne détenue poursuivie est convoquée, qui qualifie la faute, c’est-à-dire qui détermine si le comportement reproché à l’intéressée constitue une faute du premier, du second ou du troisième degré. Cette qualification n’est pas toujours facile à opérer. Certaines fautes sont rédigées dans le texte de façon très larges ou imprécises. Par exemple, l’incitation à la commission d’une faute sanctionnée par l’article R.57-7-1 du CPP 16° pour les fautes disciplinaires de premier degré et à l’article R.57-7-2 16° du CPP pour les fautes disciplinaires de deuxième degré.

La qualification puis la sanction retenues par le président de la commission de discipline peuvent être contestées par la personne détenue en déférant la décision au directeur inter-régional des services pénitentiaires dans le délai de quinze jours à compter du jour de la notification de la décision, et ce préalablement à tout recours contentieux (Article R. 57-7-32 du CPP). Dans une affaire portée devant le Conseil d’Etat, une personne détenue qui avait refusé un changement de cellule contestait le fait que ce comportement  puisse être regardé comme un « refus de se soumettre à une mesure de sécurité ». Saisi de l’affaire, le Conseil d’Etat lui a donné raison en relevant que le refus de réintégration de la cellule n’avais pas « été formulé dans des conditions ou circonstances qui auraient pu mettre en cause la sécurité de l’établissement » et que l’intéressée ne s’était donc rendu que d’un « refus d’obtempérer aux injonctions du personnel » (CE, 14 mars 2011, n°308167, Pascal C.).

Ce sont les fautes considérées comme les plus graves.

Constitue une faute du premier degré le fait :

« 1° D’exercer ou de tenter d’exercer des violences physiques à l’encontre d’un membre du personnel ou d’une personne en mission ou en visite dans l’établissement ;
« 2° D’exercer ou de tenter d’exercer des violences physiques à l’encontre d’une personne détenue ;
« 3° D’opposer une résistance violente aux injonctions des personnels ;
« 4° D’obtenir ou de tenter d’obtenir par violence, intimidation ou contrainte la remise d’un bien, la réalisation d’un acte, un engagement, une renonciation ou un avantage quelconque ;
« 5° De commettre intentionnellement des actes de nature à mettre en danger la sécurité d’autrui ;
« 6° De provoquer par des propos ou des actes à la commission d’actes de terrorisme ou d’en faire l’apologie ;
« 7° De participer ou de tenter de participer à toute action collective de nature à compromettre la sécurité des établissements ou à en perturber l’ordre ;
« 8° De participer à une évasion ou à une tentative d’évasion ;
« 9° De causer ou de tenter de causer délibérément aux locaux ou au matériel affecté à l’établissement un dommage de nature à compromettre la sécurité, l’ordre ou le fonctionnement normal de celui-ci ;
« 10° D’introduire ou tenter d’introduire au sein de l’établissement tous objets, données stockées sur un support quelconque ou substances de nature à compromettre la sécurité des personnes ou de l’établissement, de les détenir ou d’en faire l’échange contre tout bien, produit ou service ;
« 11° D’introduire ou tenter d’introduire au sein de l’établissement des produits stupéfiants, ou sans autorisation médicale, des produits de substitution aux stupéfiants ou des substances psychotropes, de les détenir ou d’en faire l’échange contre tout bien, produit ou service ;
« 12° De proférer des insultes, des menaces ou des propos outrageants à l’encontre d’un membre du personnel de l’établissement, d’une personne en mission ou en visite au sein de l’établissement pénitentiaire ou des autorités administratives ou judiciaires ;
« 13° De proférer des insultes ou des menaces à l’encontre d’une personne détenue ;
« 14° De franchir ou tenter de franchir les grillages, barrières, murs d’enceinte et tous autres dispositifs anti-franchissement de l’établissement, d’accéder ou tenter d’accéder aux façades et aux toits de l’établissement ainsi qu’aux chemins de ronde, aux zones neutres et aux zones interdites visées par le règlement intérieur ou instruction particulière arrêtée par le chef d’établissement ;
« 15° De capter, fixer ou enregistrer ou tenter de capter, fixer ou enregistrer, par quelque moyen que ce soit, des images ou des sons dans un établissement ou de diffuser ou tenter de diffuser, par quelque moyen que ce soit, des images fixées ou des sons captés dans un établissement, ou de participer à ces captation, fixation, enregistrement ou diffusion ;
« 16° D’inciter une personne détenue à commettre l’un des manquements énumérés par le présent article ou de lui prêter assistance à cette fin. » (Article R.57-7-1 du Code de procédure pénale)

Constitue une faute du second degré le fait pour la personne détenue :

« 1° De refuser de se soumettre à une mesure de sécurité définie par une disposition législative ou réglementaire, par le règlement intérieur de l’établissement pénitentiaire ou par toute autre instruction de service ou refuser d’obtempérer immédiatement aux injonctions du personnel de l’établissement ;
« 2° D’obtenir ou de tenter d’obtenir d’un membre du personnel de l’établissement ou d’une personne en mission au sein de l’établissement un avantage quelconque par des offres, des promesses, des dons ou des présents ;
« 3° De mettre en danger la sécurité d’autrui par une imprudence ou une négligence ;
« 4° D’imposer à la vue d’autrui des actes obscènes ou susceptibles d’offenser la pudeur ;
« 5° De formuler des propos outrageants ou des menaces dans les lettres adressées aux autorités administratives et judiciaires ;
« 6° De formuler dans les lettres adressées à des tiers des menaces, des injures ou des propos outrageants à l’encontre de toute personne ayant mission dans l’établissement ou à l’encontre des autorités administratives et judiciaires, ou de formuler dans ces lettres des menaces contre la sécurité des personnes ou de l’établissement ;
« 7° De se soustraire à une sanction disciplinaire prononcée à son encontre ;
« 8° D’enfreindre ou tenter d’enfreindre les dispositions législatives ou réglementaires, le règlement intérieur de l’établissement ou toute autre instruction de service applicables en matière d’introduction, de détention, de circulation, ou de sortie de sommes d’argent, correspondance, objets ou substances quelconques, hors les cas prévus aux 10° et 11° de l’article R. 57-7-1 ;
« 9° De causer délibérément un dommage aux locaux ou au matériel affecté à l’établissement, hors le cas prévu au 9° de l’article R. 57-7-1 ;
« 10° De causer délibérément un dommage à la propriété d’autrui ;
« 11° De commettre ou tenter de commettre un vol ou toute autre atteinte frauduleuse à la propriété d’autrui ;
« 12° De consommer des produits stupéfiants ;
« 13° De consommer, sans autorisation médicale, des produits de substitution aux stupéfiants, des psychotropes ou des substances de nature à troubler le comportement ;
« 14° De se trouver en état d’ébriété ;
« 15° De provoquer un tapage de nature à troubler l’ordre de l’établissement ;
« 16° D’inciter une personne détenue à commettre l’un des manquements énumérés au présent article ou de lui prêter assistance à cette fin. » (Article R.57-7-2 du Code de procédure pénale )

Les fautes disciplinaires du troisième degré sont considérées comme les moins graves

Constitue une faute du troisième degré le fait pour la personne détenue :

« 1° De ne pas respecter les dispositions du règlement intérieur de l’établissement ou les instructions particulières arrêtées par le chef de l’établissement ;
« 2° D’entraver ou tenter d’entraver les activités de travail, de formation, culturelles, cultuelles ou de loisirs ;
« 3° De communiquer irrégulièrement avec une personne détenue ou avec toute autre personne extérieure à l’établissement ;
« 4° De négliger de préserver ou d’entretenir la propreté de sa cellule ou des locaux communs ou de prendre soin des objets mis à disposition par l’administration ;
« 5° De jeter tout objet ou substance par les fenêtres de l’établissement ;
« 6° De faire un usage abusif ou nuisible d’objets autorisés par le règlement intérieur ;
« 7° De pratiquer des jeux interdits par le règlement intérieur ;
« 8° D’inciter une personne détenue à commettre l’un des manquements énumérés au présent article ou lui prêter assistance à cette fin. » (Article R.57-7-3 du Code de procédure pénale).

Une faute disciplinaire peut être commise à l’extérieur de l’établissement pénitentiaire, par exemple à l’occasion d’une extraction judiciaire, d’une hospitalisation ou d’un transfert. Les personnes qui bénéficient d’une permission de sortir ou qui sont écrouées mais non détenues (en placement à l’extérieur, sous surveillance électronique ou en semi-liberté) « demeurent soumis[es] à l’ensemble des règles disciplinaires relatives au régime des détenus de leur catégorie » (articles R.57-7-4 et D.124 du Code de procédure pénale).

En ce cas, les violences physiques, les dommages causés aux locaux ou au matériel, les insultes et menaces peuvent être retenus comme infractions disciplinaires, quels que soient la personne visée ou le propriétaire des biens endommagés (article R.57-7-4 du Code de procédure pénale).

Certaines fautes ne peuvent toutefois pas être commises en milieu libre (comme par exemple le fait de « négliger de préserver ou d’entretenir la propreté de sa cellule »).

Par ailleurs, la circulaire du 9 juin 2011 précise que « des poursuites disciplinaires n’ont pas à être engagées dans la mesure où l’incident n’a aucune répercussion sur l’ordre interne de l’établissement ». A titre d’exemple, la circulaire cite le cas d’une personne « surprise en état d’ivresse sur la voie publique » et « placée en cellule de dégrisement » lors d’une permission de sortir mais qui aurait réintégré « l’établissement en temps et en heure parfaitement sobre » et pour laquelle « aucune suite sérieuse n’est envisagée par l’autorité judiciaire ». Dans ce cas, « des poursuites disciplinaires n’ont pas à être engagées par le chef d’établissement ». Par contre, si la personne détenue « réintègre l’établissement en état d’ébriété », une telle procédure pourra être engagée (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

En matière disciplinaire, la tentative n’est punissable que si les textes le prévoient expressément.

En matière pénitentiaire, c’est le cas pour la plupart des fautes du premier degré (Article R.57-7-1 en ses 1°, 2°, 4°, 7°, 8°, 9°, 10°, 11°, 14° et 15° du Code de Procédure Pénale).

La tentative de commettre une faute est également punissable pour les fautes du second degré telles que l’obtention d’avantage par des offres, promesses, dons, présents ; l’atteinte aux dispositions légales ou réglementaires sur l’introduction, la détention, la circulation, la sortie de sommes d’argent, correspondance, objets ou substances quelconques ; ou encore la commission d’un vol ou d’une atteinte frauduleuse à la propriété d’autrui (Article R.57-7-2 en ses 2°, 8° et 11° du Code de Procédure Pénale).

Enfin constitue également une faute du troisième degré le fait pour une personne détenue de « tenter d’entraver les activités de travail, de formation, culturelles, cultuelles ou de loisirs » (article R. 57-7-3 en son 2°).

La procédure disciplinaire correspond à la mise en œuvre de toute la « machine » disciplinaire, depuis le compte rendu d’incident du surveillant (CRI), jusqu’au prononcé et à l’exécution de la sanction.

Lorsque qu’un personnel pénitentiaire constate que le comportement d’un détenu est susceptible de constituer une faute disciplinaire, il rédige un compte rendu d’incident (CRI). Ce document, plus communément appelé « rapport », déclenche la procédure disciplinaire.

Le CRI doit être rédigé « dans les plus brefs délais » après les faits et au plus tard le lendemain (article R.57-7-13 du Code de procédure pénale et circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Le détenu doit être averti qu’il a fait l’objet d’un CRI, mais celui-ci ne lui est pas communiqué à ce stade.

Tout personnel pénitentiaire témoin des faits peut rédiger un CRI (surveillant, conseiller pénitentiaire d’insertion et de probation, agent technique ou administratif). Si une personne non membre de l’administration pénitentiaire est témoin d’une faute, elle peut la porter à la connaissance d’un personnel pénitentiaire qui rédigera le CRI sur la base de son témoignage (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Tout « rapport » donne en principe lieu à une enquête, à moins que « les faits relatés ne constituent manifestement pas une faute disciplinaire » (article R.57-7-14 du Code de procédure pénale et circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Les textes ne précisent pas qui doit en décider. En pratique, ce sont le plus souvent les personnels gradés qui apprécient si les faits sont susceptibles de constituer ou non une faute disciplinaire et s’ils doivent donner lieu ou non à une enquête.

Le CRI doit constater les faits « de manière claire, précise et objective » et doit présenter « le contexte dans lequel ces faits s’inscrivent », ainsi que « la date, l’heure et le lieu de l’incident » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Il doit enfin « mentionner l’existence de témoins éventuels ».

En revanche, le rédacteur du CRI doit « s’abstenir de toute considération subjective sur le caractère, le comportement ou les motivations » du détenu ainsi que sur son « comportement habituel ».

Le CRI doit « par principe » comporter le nom, le prénom et la qualité de son auteur. Cependant, les textes permettent au chef d’établissement d’autoriser les agents rédacteurs qui « sollicitent le bénéfice de l’anonymat » à s’identifier par « le numéro de matricule porté sur leur carte professionnelle » si « des motifs intéressant la sécurité publique ou la sécurité des personnes le justifient ». Dans ce cas, les motifs doivent être explicités (article 4 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations). Ainsi, il peut être décidé de « rendre anonyme le compte-rendu d’incident afin de protéger la sécurité de son auteur » et de ne faire figurer sur le CRI que le matricule de son auteur (voir par ex. CAA Nantes, 26 janv. 2018, n° 17NT00648).

En pratique, ces dispositions ne sont pas toujours respectées et les CRI peuvent ne pas comporter la mention de leur auteur. Cette absence peut constituer un motif d’annulation de la sanction disciplinaire dans le cadre d’un recours (voir a contrario CAA Lyon, 17 février 2011, n°10LY00088 ; CAA Nantes, 26 janv. 2018, n° 17NT00648)

La plupart du temps, le compte rendu d’incident (CRI) débouche sur la conduite d’une enquête qui peut être réalisée par un membre du personnel de commandement du personnel de surveillance, un major pénitentiaire ou un premier surveillant (article R.57-7-14 du Code de procédure pénale).

C’est le chef d’établissement qui désigne l’agent en charge de l’enquête. Souvent, c’est le même agent qui est chargé de l’ensemble des enquêtes dans l’établissement.

L’enquête doit permettre de « clarifier les circonstances » et « d’examiner si les faits sont ou non établis » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Le rapport d’enquête doit également comporter les éléments utiles « sur la personnalité » du détenu (article R.57-7-14 du Code de procédure pénale).

Dans le cadre de son enquête, le gradé doit systématiquement auditionner la personne détenue visée par la procédure disciplinaire : à cette occasion, il « porte à sa connaissance la teneur du compte rendu d’incident » et « recueille ses observations éventuelles » de façon verbale, ou par écrit si le détenu « le souhaite » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). En pratique, il est recommandé de doubler ou de compléter les observations orales faites au surveillant enquêteur, lors de l’audition, par la remise d’un document écrit. Le rapport d’enquête étant le plus souvent succinct, ces observations écrites, qui devront être versées au dossier, pourront par la suite permettre de montrer les éventuelles insuffisances de l’enquête (que ce soit lors de l’audience de la commission de discipline ou d’un recours ultérieur). Ce document écrit peut notamment comporter des demandes d’actes d’investigations (audition de témoins, demande de visionnage des enregistrements de vidéos surveillance…).

L’enquêteur consulte le dossier individuel du détenu (via le logiciel GIDE ou en sollicitant d’autres services comme le SPIP ou le greffe) afin notamment de vérifier « l’existence éventuelle d’antécédents disciplinaires », en particulier les sursis révocables, et « recueillir toute information utile sur la personnalité » de l’intéressé. Il doit en particulier relever tout risque suicidaire : à cet égard, il doit indiquer tout antécédent de « passage à l’acte auto-agressif », tout placement en surveillance spécifique, tout examen de sa situation par la commission pluridisciplinaire unique sur le plan des « risques suicidaires » et s’il a fait l’objet de mesure de protection (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Pour les mineurs, les services de la PJJ doivent également être saisis afin d’établir « un rapport sur la situation personnelle, sociale et familiale » du détenu (article R. 57-7-14 du Code de procédure pénale).

L’enquêteur peut également entendre l’agent rédacteur du CRI ou toute personne en qualité de témoin et procéder à diverses investigations telles que des photographies, retranscription d’enregistrements des caméras de vidéosurveillance ou des conversations téléphoniques, test sur les substances saisie afin de savoir s’il s’agit de drogue, etc.

Il reste toutefois libre de mener ou pas de tels actes et de procéder à des auditions de témoins. Le plus souvent, les rapports d’enquête se bornent en pratique à citer le CRI et les observations recueillies auprès du détenu de façon très succincte, aucune autre investigation n’étant menée.

Rien ne fait obstacle à ce que le détenu sollicite, dès le moment où il est auditionné par l’agent enquêteur, des actes d’investigation de nature à le disculper. En l’état de la jurisprudence, il ne peut toutefois pas les exiger. Mais si elles lui sont refusées, il pourra ensuite se prévaloir plus facilement de la faiblesse de l’enquête dans le cadre d’un recours.

L’insuffisance de l’enquête peut en effet être censurée par le juge administratif, notamment si le détenu nie les faits et que les témoins présents n’ont pas été entendus (CAA Douai, 15 octobre 2009, n° 09DA00600). Les juridictions ne sont cependant pas toujours très exigeantes à l’égard du peu de preuves rapportées par l’administration, malgré le principe constitutionnel de la présomption d’innocence applicable y compris en matière disciplinaire (article 9 de la Déclaration des droits de l’homme de 1789 et Conseil constitutionnel, décision du 8 juillet 1989, n°89-258DC), qui impose que ce soit à l’administration de prouver la culpabilité du détenu.

C’est le chef d’établissement, l’un de ses adjoints ou un membre du corps de commandement ayant reçu délégation qui apprécie l’opportunité de poursuivre le détenu devant la commission de discipline (article R. 57-7-15 du Code de procédure pénale). Les autres personnels ne peuvent prendre cette décision sauf à s’exposer à la censure du juge administratif (CAA Versailles, 28 juin 2007, n° 06VE00278). Pour que la personne détenue puisse vérifier le respect de cette règle, la décision doit être signée et indiquer le nom, le prénom et le grade de son auteur (article 4 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations).

Au vu du rapport d’enquête, le chef d’établissement ou son délégataire décide soit :

– d’un complément d’information, qui doit aboutir à la rédaction d’un nouveau rapport d’enquête plus complet, possibilité très rarement utilisée en pratique ;

– d’un classement sans suite. Dans ce cas, le CRI et le rapport d’enquête sont versés au dossier individuel du détenu qui, sur sa demande, peut en obtenir la communication (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures) ;

– de l’engagement de poursuites (passage en commission de discipline).

La décision de poursuite ne peut être prise plus de six mois après « la découverte des faits reprochés à la personne détenue » (article R.57-7-15 du Code de procédure pénale).

La personne détenue poursuivie doit obligatoirement se voir remettre une convocation écrite à l’audience disciplinaire l’informant de l’heure et de la date du passage devant la commission de discipline.

Cette convocation lui est remise à l’issue d’un entretien individuel au cours duquel lui sont notifiés les faits reprochés, la qualification juridique retenue, ainsi que les droits dont il bénéficie, à savoir :

– le délai dont il dispose pour préparer sa défense « qui ne peut être inférieur à 24 heures » ;

– la « faculté de prendre connaissance du dossier dans ce délai » ;

– la possibilité de se faire assister « par un avocat de son choix » ou « par un avocat désigné par le bâtonnier de l’ordre des avocats et de bénéficier à cet effet de l’aide juridique » ;

– le droit de « produire des explications écrites ».

(article R.57-7-16 du Code de procédure pénale et circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Lors de cet entretien, qui peut avoir lieu avec « n’importe quel agent » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures), la personne détenue est invitée à signer la convocation. Celle-ci doit comporter la date et l’heure de sa remise, mais également les faits reprochés, la qualification retenue, ainsi que le rappel de ses droits (article R.57-7-17 du Code de procédure pénale). L’absence de signature n’entraîne cependant aucune conséquence, l’agent chargé de l’entretien devant simplement mentionner le refus de signer en apposant sa propre signature (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Au cours de cet entretien, l’intéressé fait savoir s’il souhaite être assisté par un avocat. Sa demande doit être inscrite sur un formulaire qu’il est également invité à signer.

La circulaire du 9 juin 2011 précise qu’il est « opportun » d’adresser la convocation « au moins 48 heures avant le début de l’audience ». En pratique, ce principe n’est pas toujours respecté, même lorsque les faits sont anciens et que la décision de poursuite a été prise depuis longtemps.

Un double de la convocation est remis au détenu et un exemplaire est envoyé à l’avocat désigné (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Enfin, si le détenu est mineur, une copie de la convocation doit être adressée aux titulaires de l’autorité parentale ou à ses représentants légaux (article R.57-7-17 du Code de procédure pénale).

En cas d’engagement des poursuites disciplinaires, « les faits reprochés ainsi que leur qualification juridique sont portés à la connaissance de la personne détenue » (article R.57-7-16 du Code de procédure pénale). C’est en général dans la convocation devant la commission de discipline que figurent ces informations. La convocation doit donc être laissée en possession de la personne poursuivie afin de lui permettre de « préparer utilement sa défense » (CAA Lyon, 29 janv. 2015, n°13LY03112). La convocation doit également mentionner la date et de l’heure de sa comparution devant la commission de discipline.

La personne détenue poursuivie doit par ailleurs disposer d’un délai « qui ne peut être inférieur à 24 heures » pour préparer sa défense, en toutes circonstances (article R.57-7-16 du Code de procédure pénale).

Ce délai doit lui permettre « d’organiser au mieux la consultation du dossier et l’entretien entre la personne détenue et son avocat » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Il est vivement recommandé, pendant ce délai, de dégager, à la lecture des pièces du dossier, les éventuels éléments à décharge et incohérences des accusations portées contre le détenu et d’user de la possibilité de « produire des explications écrites », celles reproduites dans le rapport d’enquête étant souvent succinctes. Celles-ci peuvent notamment comporter des demandes d’investigation complémentaires. Ces explications écrites seront versées au dossier et pourront permettre, en cas de recours, d’éclairer le directeur interrégional ou le juge administratif des insuffisances de la procédure.

La personne détenue poursuivie doit d’abord pouvoir avoir accès au « dossier de la procédure disciplinaire » et elle peut (ou son avocat) ainsi « consulter l’ensemble des pièces de la procédure disciplinaire, sous réserve que cette consultation ne porte pas atteinte à la sécurité publique ou à celle des personnes » dans un délai ne peut être « inférieur à vingt-quatre heures » avant le passage en commission de discipline (article R.57-7-16 du Code de procédure pénale).

Concrètement, l’ensemble des pièces du « dossier qui sera examiné par la commission de discipline » doit être porté à la connaissance du détenu et de son avocat, soit en étant mis à disposition des intéressés « dans un local garantissant la confidentialité », soit par la remise d’une copie gratuite à chacun d’eux (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Le dossier comporte au moins le compte rendu d’incident, le rapport d’enquête, la décision de poursuite, ainsi que les diverses convocations (du détenu, de son avocat et des titulaires de l’autorité parentale pour les mineurs). La date et l’heure de la délivrance des pièces du dossier au détenu et à son avocat doivent être mentionnées dans la procédure (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Certains documents ne sont toutefois pas communicables. Il en va ainsi des « documents dont la consultation par la personne détenue ou par son avocat, porterait atteinte à la sécurité publique ou à celle des personnes, notamment celles qui ont participé à leur élaboration ». Dans ce cas, les documents peuvent faire l’objet d’une occultation (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Le détenu peut en principe conserver en cellule les pièces ainsi délivrées. Exceptionnellement, le chef d’établissement peut en décider autrement pour tout ou partie des pièces, « s’il y a lieu de craindre que soient divulgués des éléments de nature à mettre en cause la sécurité des personnes ou de l’établissement ». Dans ce cas, les pièces seront placées à la fouille et maintenues à disposition du détenu qui pourra y accéder dans un local « assurant la confidentialité de cette consultation ».

L’avocat désigné peut toujours conserver une copie de la procédure.

Les textes prévoient également que l’avocat, ou la personne détenue si elle n’est pas assistée d’un avocat, peut « demander à prendre connaissance de tout élément utile à l’exercice des droits de la défense existant, précisément désigné, dont l’administration pénitentiaire dispose dans l’exercice de sa mission et relatif aux faits visés par la procédure disciplinaire, sous réserve que sa consultation ne porte pas atteinte à la sécurité publique ou à celle des personnes ». L’administration doit répondre à la demande d’accès dans un délai maximal de sept jours ou, en tout état de cause, en temps utile pour permettre à la personne de préparer sa défense. Si l’administration pénitentiaire fait droit à la demande, l’élément est versé au dossier de la procédure (article R.57-7-16 du Code de procédure pénale).

Parmi les éléments auxquels la personne détenue peut demander à avoir accès figure « les données de vidéoprotection, à condition que celles-ci n’aient pas été effacées ». Dans ce cas, « l’administration pénitentiaire accomplit toute diligence raisonnable pour assurer la conservation des données avant leur effacement » et doit répondre « à la demande d’accès dans un délai maximal de quarante-huit heures ». Les données de la vidéoprotection visionnées font l’objet d’une transcription dans un rapport versé au dossier de la procédure disciplinaire (article R.57-7-16 du Code de procédure pénale).

La personne détenue dispose de la faculté de se faire assister par un avocat de son choix ou par un avocat commis d’office (articles 726, R.57-6-8 et  R.57-7-16 du Code de procédure pénale).

La personne détenue poursuivie peut bénéficier à cet effet de l’aide juridique.

Pour les mineurs, l’assistance par un avocat est obligatoire, même si le détenu n’en fait pas la demande.

L’assistance par un mandataire de son choix est par contre exclue en commission de discipline (article R.57-6-8 du Code de procédure pénale), ce qui prive en pratique le détenu de la possibilité notamment d’être assisté par un autre détenu.

Si le détenu décide de se faire assister par un avocat, il doit « être mis en mesure de bénéficier d’un entretien avec l’avocat choisi, dans des conditions garantissant la confidentialité » et ce, « au moins 24 heures avant le début de l’audience ».

En pratique, cet entretien a le plus souvent lieu quelques minutes avant le passage en commission de discipline et il n’existe pas toujours de local permettant d’assurer la confidentialité de celui-ci. Il a parfois lieu dans une cellule inoccupée, à proximité de la salle de la commission de discipline, voire même, dans certains cas, en présence de surveillants.

(circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures)

Le Conseil constitutionnel considère que la loi « garantit » le droit de la personne détenue « d’être assistée d’un avocat au cours de la procédure disciplinaire » (Conseil constitutionnel, décision du 19 novembre 2009, n° 2009-593 DC). La formule utilisée permet de penser que le détenu doit impérativement être assisté par un avocat dès lors qu’il le demande, et qu’en l’absence d’avocat l’audience doit être reportée.

En réalité, l’obligation de l’administration pénitentiaire se limite à la convocation de l’avocat désigné ou à la saisine du bâtonnier afin qu’il procède à la désignation d’un conseil. Le juge administratif se refuse pour le moment à annuler les sanctions prises en l’absence de l’avocat, du moment que l’administration démontre qu’elle l’a, pour sa part, convoqué. Si l’absence de l’avocat n’est pas imputable à l’administration, elle ne peut avoir pour conséquence de rendre la procédure irrégulière  (Conseil d’État, 23 février 2011, Ahcène B., n°313965).

Cette jurisprudence ne prend pas en compte les difficultés concrètes auxquelles se heurtent les détenus pour être assistés par des avocats. La faible rémunération de ceux-ci par le biais de l’aide juridictionnelle et les distances souvent longues à parcourir pour se rendre à la prison dissuadent nombre d’entre eux. De même, les délais souvent courts dans lesquels ils sont convoqués les empêchent régulièrement de se rendre disponibles aux audiences.

En cas d’absence de l’avocat, il est vivement conseillé, pour la personne détenue, de solliciter le report de l’audience car il a par ailleurs été jugé que l’absence de l’avocat ne pouvait entraîner l’annulation de la sanction dès lors que le détenu « n’a pas sollicité le report de la réunion de [la commission de discipline] » (CAA Douai, 1er juin 2011, n° 10DA00837 ; CAA Nancy, 13 février 2014, n° 13NC01290).

Le détenu peut être défendu par l’avocat « de son choix » (article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000). Il peut s’agir de celui qui le défend dans son affaire pénale ou de tout autre avocat.

Il est « interdit au personnel de l’administration pénitentiaire et à toute personne qui apporte sa collaboration à cette administration d’agir de façon directe ou indirecte auprès des détenus pour influer sur leurs moyens de défense et sur le choix de leur défenseur » (article D.66 du Code de procédure pénale).

Le tableau des avocats inscrits dans les barreaux du département doit en principe être affiché « au greffe et tenu à la disposition des détenus » (article D.66 du Code de procédure pénale), ainsi que « dans le quartier disciplinaire » (article 6 du règlement intérieur type des établissements pénitentiaires annexé à l’article R.57-6-18 du Code de procédure pénale).

S’il ne connait pas d’avocat, le détenu peut demander à ce que le bâtonnier de l’ordre des avocats lui en désigne un commis d’office. Pour ce faire, il doit le faire savoir à l’administration pénitentiaire, via un formulaire à signer, qui saisira alors le bâtonnier. Ce dernier transfère ensuite la convocation à l’avocat de permanence.

Les détenus peuvent bénéficier de l’aide juridictionnelle afin d’être assistés gratuitement par un avocat devant la commission disciplinaire (article 64-3 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique).

Pour y accéder, la personne détenue doit remplir le formulaire « demande d’aide juridique pour l’assistance d’un détenu par un avocat ». Elle peut alors soit choisir un avocat en particulier acceptant d’intervenir au titre de l’aide juridictionnelle, soit demander à ce qu’un avocat soit désigné d’office. Dans le premier cas, elle doit préciser s’il souhaite bénéficier d’un autre avocat désigné par le bâtonnier en cas de refus de l’avocat initialement souhaité, ce qui est vivement recommandé.

La demande d’aide juridique doit être transmise sans délai à l’avocat afin qu’il fasse connaître sa réponse rapidement. Elle est transmise parallèlement au bâtonnier du ressort dont relève cet avocat. Concrètement, si l’avocat refuse d’intervenir au titre de l’aide juridictionnelle, il ne pourra pas contacter le détenu pour négocier ses honoraires, faute de temps. L’intéressé sera alors défendu par l’avocat commis d’office, ou pas défendu, selon le choix préalablement effectué.

Si la personne détenue opte pour que l’avocat soit désigné par le bâtonnier, sa demande est directement transmise au bâtonnier du ressort dans lequel se trouve l’établissement. Le bâtonnier désigne un avocat qui s’est préalablement porté volontaire pour assurer la défense en commission de discipline au titre de l’aide juridictionnelle. Le plus souvent, les ordres des avocats organisent des permanences assurées en rotation par un ou plusieurs avocats.

Le montant versé par l’État à l’avocat pour l’assistance du détenu au cours d’une procédure disciplinaire est de 88 euros hors taxes (article 132-2 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991).

(Circulaires DAP du 18 avril 2002 relative à la rétribution de l’avocat assistant la personne détenue devant la commission de discipline d’un établissement pénitentiaire et du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Un interprète peut être désigné, dès « la phase préparatoire », par le chef d’établissement pour tout détenu ne parlant pas ou ne comprenant pas la langue française, ou se trouvant dans l’incapacité physique de s’exprimer (s’il est par exemple sourd-muet) (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues). Le recours à un interprète peut donc intervenir dès l’entretien individuel mais également lors de l’entretien avec l’avocat et à l’audience de la commission de discipline.

Comme le prévoit le code de procédure pénale, les explications de la personne détenue poursuivie sont présentées devant la commission de discipline, « dans la mesure du possible, par l’intermédiaire d’un interprète désigné par le chef d’établissement » (article R.57-7-25 du Code de procédure pénale). Ainsi que l’a précisé le Conseil d’Etat, la personne détenue a donc droit à l’assistance d’un interprète «  sauf le cas dans lequel il s’avérerait matériellement impossible d’en trouver un ». L’administration doit « accomplir toutes les diligences nécessaires » pour que l’intéressée soit effectivement assistée d’un interprète (CE, 11 juill. 2012, OIP-SF, n°347146) et doit pouvoir « justifier les démarches effectuées pour contacter un interprète » en cas de litige ultérieur, si la sanction prononcée fait l’objet d’un recours (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues).

En cas d’impossibilité de trouver un interprète, la circulaire prévoit de faire appel « à un membre du personnel connaissant la langue étrangère (ou la langue des signes), ou en dernier ressort à un autre détenu ». Dans ce cas, pour l’impartialité des débats devant la commission de discipline, « il ne saurait être admis qu’un personnel ou un codétenu soit témoin de l’incident et interprète » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues).

La personne détenue poursuivie peut, « à titre préventif », c’est-à-dire avant le passage en commission de discipline (ou prétoire), faire l’objet d’un « placement en cellule disciplinaire » ou un « confinement en cellule individuelle » (article 726 du code de procédure pénale).

Une telle mesure doit en principe être « exceptionnelle » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues). Elle ne peut être prise qu’« en cas d’urgence » et seulement « si les faits constituent une faute du premier ou du deuxième degré ». Le placement préventif au quartier disciplinaire doit en outre être « l’unique moyen de mettre fin à la faute ou de préserver l’ordre à l’intérieur de l’établissement » (articles 91 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 et R.57-7-18 du Code de procédure pénale), notamment « lorsque les autres moyens de faire cesser le trouble ont échoué ou sont insuffisants » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues).

Ces dispositions signifient qu’un placement préventif doit en théorie être strictement justifié et qu’un placement préventif en cellule de discipline ne devrait pouvoir être décidé que si un confinement en cellule ne suffit pas à répondre à l’objectif poursuivi.

Si le placement préventif au quartier disciplinaire ou le confinement en cellule ne sont plus justifiés (par exemple en cas de « retour au calme » de la personne détenue), un retour en cellule normale doit en principe être envisagé en attendant son passage en commission de discipline (note DAP du 13 juillet 2009 relative à la prévention des suicides et placement des personnes détenues au quartier disciplinaire).

En pratique, ces limitations ne sont que peu respectées et l’utilisation du confinement préventif en cellule ordinaire demeure rare, notamment en raison de la surpopulation de nombreux établissements qui empêche concrètement la possibilité d’un confinement seul en cellule.

Sur le plan procédural, la décision de placement préventif peut être prise par le chef d’établissement, l’un de ses adjoints, un membre du corps de commandement du personnel de surveillance, un major ou un premier surveillant (article R.57-7-5 du Code de procédure pénale). Cependant, le chef d’établissement doit « systématiquement » contrôler « l’opportunité et la régularité des mises en prévention lorsqu’il ne prend pas lui-même la décision » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues).

Sur le plan formel, la décision doit être notifiée par écrit à la personne détenue « lors de son placement », et motivée en fait et en droit, sauf cas d’« urgence absolue ». Dans cette dernière hypothèse, la personne détenue peut toujours ultérieurement, dans le délai de deux mois, demander la communication des motifs de la décision de placement préventif en cellule disciplinaire ou de confinement. L’administration dispose alors d’un mois pour lui communiquer les éléments sollicités.

Une mesure de placement préventif en cellule disciplinaire peut faire l’objet d’un recours devant le tribunal administratif (Conseil d’Etat, arrêt du 17 décembre 2008, OIP-SF, n°293786). Le juge saisi  pourra notamment contrôler si aucune autre mesure que le placement préventif au quartier disciplinaire ne pouvait assurer la sécurité de l’établissement pénitentiaire ou des personnes.

La mesure de placement provisoire en cellule disciplinaire ou de confinement en cellule ordinaire ne peut excéder « deux jours ouvrables » (article 91 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009).

Ce délai commence à courir le « lendemain du jour du placement » à zéro heure et « expire le deuxième jour suivant le placement en prévention, à vingt-quatre heures » (article R.57-7-19 du Code de procédure pénale). Cela signifie qu’en cas de mise en prévention le lundi à 16 heures, le placement pourra durer jusqu’au mercredi à 24 heures. Si le placement préventif empiète sur un week-end ou un jour férié, sa durée est prorogée. En cas de placement un jeudi, la mesure pourra être prolongée « jusqu’au lundi à 24 heures » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues).

Dans tous les cas, la mesure de placement préventif doit être « limitée au strict nécessaire » (article R.57-7-19 du Code de procédure pénale) et doit prendre fin dès que « l’ordre à l’intérieur de l’établissement » n’est plus menacé et que la faute ne risque pas d’être renouvelée. La circulaire invite les chefs d’établissement à « faire le nécessaire pour que le temps de prévention soit le plus court possible » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues).

En pratique, les placements préventifs durent presque systématiquement jusqu’au passage en commission de discipline. L’enquête est alors réalisée très succinctement et tout renvoi d’audience rejeté, la plupart du temps au motif d’une « urgence » pas nécessairement caractérisée.

La durée effectuée en confinement ou en cellule disciplinaire à titre préventif s’impute sur celle de la sanction à subir, « qu’il s’agisse indifféremment d’une sanction de cellule disciplinaire ou de confinement » (article R.57-7-20 du Code de procédure pénale).

Les deux types de placement préventif (en cellule disciplinaire ou en confinement) ne peuvent en aucun cas s’appliquer aux mineurs de moins de 16 ans.

Pour les mineurs de plus de 16 ans, le placement préventif en cellule de discipline n’est possible que pour certaines fautes du premier degré, à savoir : « exercer ou de tenter d’exercer des violences physiques à l’encontre d’un membre du personnel ou d’une personne en mission ou en visite dans l’établissement » (1°) ;
« exercer ou de tenter d’exercer des violences physiques à l’encontre d’une personne détenue » (2°) ;  « opposer une résistance violente aux injonctions des personnels » (3°) ; « obtenir ou de tenter d’obtenir par violence, intimidation ou contrainte la remise d’un bien, la réalisation d’un acte, un engagement, une renonciation ou un avantage quelconque » (4°) ;
« commettre intentionnellement des actes de nature à mettre en danger la sécurité d’autrui » (5°) ; « provoquer par des propos ou des actes à la commission d’actes de terrorisme ou d’en faire l’apologie » (6°) ; « participer ou de tenter de participer à toute action collective de nature à compromettre la sécurité des établissements ou à en perturber l’ordre » (7°) ; « participer à une évasion ou à une tentative d’évasion » (8°) ; « causer ou de tenter de causer délibérément aux locaux ou au matériel affecté à l’établissement un dommage de nature à compromettre la sécurité, l’ordre ou le fonctionnement normal de celui-ci » (9°) ; « introduire ou tenter d’introduire au sein de l’établissement tous objets, données stockées sur un support quelconque ou substances de nature à compromettre la sécurité des personnes ou de l’établissement, de les détenir ou d’en faire l’échange contre tout bien, produit ou service » (10°) (article R.57-7-18 du Code de procédure pénale).

En revanche, le confinement en cellule est possible dans les mêmes conditions que pour les majeurs.

Lorsque la faute reprochée à la personne « a été commise au cours ou à l’occasion de l’emploi qu’elle occupe », une suspension provisoire de « l’exercice de l’activité professionnelle » peut être décidée dans l’attente de la réunion de la commission de discipline (article R.57-7-22 du Code de procédure pénale).

Comme les décisions de placement préventif en cellule de discipline ou en confinement, cette mesure de suspension provisoire doit être strictement justifiée : elle doit être « l’unique moyen » de « mettre fin à la faute », de « faire cesser le trouble occasionné au bon déroulement des activités de travail » ou « d’assurer la sécurité des personnes ou de l’établissement » (article R.57-7-22 du Code de procédure pénale).

La mesure doit également être « limitée au strict nécessaire » et ne peut « excéder huit jours ouvrables pour les personnes majeures » et « trois jours ouvrables pour les personnes mineures de plus de seize ans » (article R.57-7-23 du Code de procédure pénale).

La circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures précise que si la commission de discipline n’a pu se réunir dans le délai de huit jours, « la personne concernée reprend son activité en attendant sa comparution ».

Dans tous les cas, le chef d’établissement devrait « veiller à ce qu’il (…) soit mis fin à la mesure de suspension dès lors que les motifs ayant présidé à son prononcé ont disparu ».

Comme en matière de confinement ou de placement préventif en cellule disciplinaire, le délai commence à courir le lendemain du prononcé de la suspension et expire le huitième jour (ou troisième s’agissant des mineurs de plus de 16 ans) à 24h (article R.57-7-23 du Code de procédure pénale). En cas de week-end ou de jour férié, la durée est « prorogée » jusqu’au premier jour ouvrable suivant.

Seul le chef d’établissement, l’un de ses adjoints ou un membre du corps de commandement du personnel de surveillance peuvent prendre une telle décision (article R.57-7-5 du Code de procédure pénale). Celle-ci doit être notifiée au détenu « sans délai », et motivée en fait et en droit sauf « urgence absolue » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

En outre, comme pour le placement provisoire en cellule disciplinaire ou un confinement, la durée de la suspension « s’impute » sur celle de la suspension d’emploi prononcée par la commission de discipline à titre définitif (article R.57-7-24 du Code de procédure pénale).

Le détenu ou son avocat peuvent à tout moment, avant ou au cours de l’audience, et « pour tout motif », demander au président de la commission de discipline un renvoi à une audience ultérieure (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Le président de la commission de discipline peut également décider, de sa propre initiative, de renvoyer l’affaire à une prochaine audience.

Le renvoi peut ainsi être demandé si l’enquête réalisée apparaît insuffisante et pour que soient accomplis de nouveaux actes d’investigation. La circulaire précise à ce titre que si, en dépit de l’enquête préalable, la commission estime ne pas être en mesure de « statuer en toute connaissance de cause », le président de la commission peut renvoyer l’affaire « à une prochaine audience », notamment pour « vérifier les éléments insuffisamment établis ou les faits nouveaux recueillis au cours de l’audition » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

De même, le renvoi peut être demandé si l’avocat choisi ne peut pas être présent lors de l’audience ou, plus généralement, si un délai est nécessaire à la préparation de la défense, dûment explicité (par exemple, si le détenu veut pouvoir rencontrer son avocat en amont de l’audience disciplinaire pour définir sa stratégie de défense avant la rédaction d’un mémoire, ou si la complexité de l’affaire le nécessite). De tels motifs de renvoi s’avèrent néanmoins rarement pris en compte, à moins que les délais de 24 heures (pour la communication du dossier) et de 48 heures (pour la convocation) n’aient pas été respectés.

Aucun texte n’impose qu’il soit fait droit à la demande de renvoi, cette décision relevant de l’appréciation du président de la commission de discipline.

La commission de discipline ou « prétoire » est l’organe de décision compétent pour statuer sur les fautes disciplinaires reprochées aux personnes détenues.

La commission de discipline est présidée par le chef d’établissement ou son délégataire (qui peut être son adjoint ou un membre du corps de commandement du personnel de surveillance ayant reçu délégation). Elle comprend en outre deux membres assesseurs (Article R.57-7-6 du Code de procédure pénale) : un « membre extérieur à l’administration pénitentiaire » (articles 726 et R.57-7-8 du Code de procédure pénale) et un personnel pénitentiaire qui peut être un surveillant, un surveillant principal ou un surveillant brigadier.

Un « secrétaire de commission » peut également être présent au moment de l’audience afin d’assister le président. Il assure notamment la transcription des débats (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). En aucun cas, il ne participe aux débats.

L’auteur du compte-rendu d’incident (CRI) et celui du rapport d’enquête ne peuvent siéger à la commission (articles R.57-7-13 et R.57-7-14 du Code de procédure pénale). La circulaire du 9 juin 2011 précise également qu’il « convient d’éviter, autant que faire se peut, de désigner en qualité d’assesseur un agent qui aurait été amené à connaître une des affaires examinées en qualité de témoin des faits ». Le juge administratif contrôle d’ailleurs les règles de désignation des assesseurs en commission disciplinaire (voir par ex., TA Lyon, 22 février 2011, n° 0808221).

Les membres de la commission de discipline doivent exercer leurs fonctions « avec intégrité, dignité et impartialité et respecter le secret des délibérations » (article R.57-7-9 du Code de procédure pénale). La circulaire précise qu’ils doivent « faire preuve de réserve et de retenue » et se garder « de manifester tout parti pris ». Un manquement à ces obligations peut conduire son auteur à être écarté de la composition des futures commissions de discipline par le chef d’établissement.

L’assesseur « extérieur » est choisi « parmi des personnes extérieures à l’administration pénitentiaire qui manifestent un intérêt pour les questions relatives au fonctionnement des établissements pénitentiaires » (article R.57-7-8 du Code de procédure pénale).

Les textes interdisent de devenir assesseur extérieur à plusieurs catégories de personnes : 1° Les personnes mineures ; 2° Les personnes en situation irrégulière au regard des dispositions relatives à l’entrée et au séjour sur le territoire national ; 3° Les personnes ayant fait l’objet depuis moins de cinq ans d’une condamnation mentionnée au bulletin n° 2 du casier judiciaire ; 4° Les personnels de l’administration pénitentiaire, de la protection judiciaire de la jeunesse et les collaborateurs occasionnels du service public pénitentiaire ; 5° Les conjoints, concubins, parents ou alliés jusqu’au degré d’oncle ou de neveu inclusivement d’un personnel de l’administration pénitentiaire ou toute personne liée par un pacte civil de solidarité avec un personnel pénitentiaire ; 6° Les magistrats de l’ordre administratif ou judiciaire en exercice ; 7° Les fonctionnaires des services judiciaires en exercice ; 8° Les avocats et les avocats au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation en exercice ; 9° Les fonctionnaires des services de police et de gendarmerie en exercice (article R. 57-7-10 du code de procédure pénale).

De même, ne peuvent être désignés pour siéger à la commission de discipline : 1° Les personnes détenues ; 2° Les conjoints, concubins, parents d’une personne détenue dans l’établissement ou toute personne liée par un pacte civil de solidarité avec une personne détenue ; 3° Les personnes titulaires d’un permis de visite afin de rencontrer une personne détenue dans l’établissement (article R.57-7-11 du Code de procédure pénale).

Concrètement, les personnes intéressées pour devenir assesseur extérieur doivent s’adresser au président du tribunal de grande instance dont relève l’établissement pénitentiaire, qui examine leur candidature et, le cas échéant, les habilite à siéger (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Les personnes habilitées sont inscrites sur une liste « tenue au greffe du tribunal de grande instance », qui est adressée au chef d’établissement au moins une fois par an et à chaque nouvelle inscription. A partir de cette liste, le chef d’établissement dresse un « tableau de roulement » désignant les assesseurs extérieurs (et leurs suppléants) pour une période déterminée et fixant les dates d’audience programmées (article R.57-7-12 du Code de procédure pénale). Les assesseurs reçoivent ce tableau qui fait office de convocation. En cas d’audience en dehors des dates prévues à l’avance, l’assesseur reçoit une convocation spécifique.

Le chef d’établissement de discipline ne peut, sans motif valable, faire en sorte qu’un assesseur extérieur habilité par le président du tribunal de grande instance ne siège pas en commission de discipline en ne l’inscrivant pas dans le tableau de roulement (TA Nancy, 12 mai 2015 ; n°1402184).

Si l’assesseur ne se présente pas à l’audience alors qu’il était « dûment avisé de la date de tenue de la commission de discipline », le renvoi à une audience ultérieure « doit être envisagé », sauf « nécessité de statuer rapidement » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

En pratique, nombre d’établissements n’ont pas ou peu d’assesseurs extérieurs. Dans la circulaire du 9 juin 2011, l’administration a pris soin de préciser que la décision rendue en l’absence d’assesseur extérieur « n’est pas pour autant entachée d’illégalité », dès lors que « cette absence n’est pas due au fait de l’administration ». Le juge administratif exige toutefois que l’administration justifie avoir « entrepris toutes les diligences nécessaires » pour qu’un assesseur extérieur soit présent (TA Paris, 14 juin 2013, n° 1204036). A défaut, la sanction disciplinaire doit  être annulée.

Ainsi, pour censurer la sanction prononcée alors qu’aucun assesseur n’était présent la Cour administrative d’appel de Nantes a relevé que : « si le ministre de la justice fait valoir que l’absence de l’assesseur extérieur n’est pas imputable à l’administration, il n’établit pas, par les pièces qu’il produit, que cet assesseur aurait été régulièrement convoqué et se serait trouvé dans l’impossibilité de siéger compte-tenu du court délai de convocation de la commission ; qu’il est constant, de surcroît, qu’un seul assesseur  extérieur a été convié à la séance de la commission de discipline, sans que l’administration ne se prévale de l’impossibilité matérielle de convoquer régulièrement d’autres personnes extérieures habilitées à cet effet ; qu’enfin, le ministre de la justice ne verse aucun élément permettant de justifier des diligences faites en temps utile par ses services, afin d’assurer la réunion régulière de la commission de discipline en l’absence de confirmation de la présence d’un assesseur extérieur » (CAA Nantes, 27 janvier 2017, n° 15NT00964 ; voir également CAA Nantes, 22 décembre 2017, n°15NT03223).

Le détenu poursuivi est « libre de comparaître ou pas lors de l’audience disciplinaire » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Dans tous les cas, il peut se faire représenter par un avocat.

Le président de la commission « dirige les débats » et assure « la police de l’audience ». Il peut notamment prévoir la présence de personnels « afin d’assurer la sécurité de l’audience » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Il doit tout d’abord donner « lecture des faits tels qu’ils ont été notifiés par écrit à la personne détenue » et, « s’il l’estime nécessaire », des conclusions du rapport d’enquête (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Il doit ensuite donner la parole au détenu pour qu’il « s’explique sur les faits qui lui sont reprochés » et pose au détenu « les questions nécessaires à la compréhension des faits » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Il peut céder la parole aux assesseurs pour qu’ils fassent de même. Les explications du détenu doivent être « retranscrites sur l’imprimé de la procédure disciplinaire » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures)

L’avocat est entendu après le détenu. S’il souhaite poser des questions aux témoins éventuels, il doit les adresser au président.

Le président peut également décider de l’audition de témoins « s’il l’estime utile au bon déroulement de la procédure et pour la connaissance de la vérité ». En pratique, de telles auditions sont rarissimes. L’éventuelle demande par le détenu d’audition d’un témoin doit être « consignée » dans la procédure, mais le président n’est pas tenu d’y donner suite.

Il est recommandé que l’avocat ou le détenu rédigent des explications écrites, en plus des observations présentées oralement. Celles-ci peuvent être soit adressées au directeur avant l’audience, soit produites directement lors de l’audience, selon la stratégie adoptée.

L’ensemble des conclusions et des pièces fournies par le détenu ou son avocat doivent être « annexées au dossier ».

Aucun texte ne fait obstacle à ce que le président de la commission de discipline décide de requalifier les faits reproché à la personne détenue à tout moment de l’audience (il s’agit de modifier la nature de la faute disciplinaire correspondant aux faits). Cette possibilité est prévue par la circulaire du 9 juin 2011 qui précise que le président doit alors « respecter le principe du contradictoire ».

Concrètement, il doit, au cours de l’audience, informer le détenu de « la nouvelle qualification qu’il entend retenir » ainsi que lui « laisser un délai suffisant pour préparer sa défense » et « présenter ses observations sur la nouvelle qualification ». Si le détenu demande un délai de 24 heures pour préparer sa défense, « il convient de renvoyer la tenue de la commission de discipline à une date ultérieure ». Si le détenu ne demande pas ce délai, la mention de cette « renonciation » doit être inscrite sur la décision.

Les délibérations ont lieu juste après l’audience et en dehors de la présence du détenu et de son avocat. Ne peuvent y participer que les membres de la commission de discipline, tenus au secret des délibérations.

Le président se prononce sur la responsabilité du détenu, puis sur les sanctions éventuelles, « après avoir consulté les assesseurs » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). C’est lui qui détient le pouvoir de décision, les assesseurs n’ayant que « voix consultative » (article R.57-7-7 du Code de procédure pénale).

 

La décision prise est prononcée par le président de la commission de discipline à l’issue des délibérations et « en présence de la personne détenue », si elle a décidé de comparaître (article R.57-7-26 du Code de procédure pénale).

La décision lui est ensuite « immédiatement notifiée par écrit » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Le détenu est alors invité à signer la décision et une copie lui est en principe remise.

Un éventuel refus de signer du détenu doit être indiqué sur la copie qui lui est remise (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

La décision doit en principe être notifiée « sans délai » au détenu (article R.57-7-26 du Code de procédure pénale). Il peut toutefois arriver, notamment lorsque le détenu a refusé de comparaître à l’audience, que la notification ait lieu un autre jour. Mais elle doit dans tous les cas être « effectuée aussitôt que cela s’avère possible » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

La décision doit « expliciter sur quels éléments la commission se fonde pour considérer que les faits sont avérés » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Elle mentionne également le texte qui incrimine le comportement en cause, les voies et délais de recours (article R.57-7-26 du Code de procédure pénale), ainsi que le nom de l’avocat qui a assisté ou représenté le détenu (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Le président de la commission de discipline est également tenu d’informer le détenu qui comparaît de la possibilité qu’il a de saisir le directeur interrégional des services pénitentiaires (DISP) d’un recours hiérarchique contre la sanction prononcée. Il doit en principe lui expliquer « clairement » et « dans une langue qu’ [il] comprend » le « caractère obligatoire » de ce recours hiérarchique, qui doit être exercé préalablement à tout recours devant le juge administratif (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Après le prononcé de la décision, le détenu qui le demande doit en principe pouvoir s’entretenir avec son avocat suite à la décision de la commission, et ce, dans un local « garantissant la confidentialité de l’échange » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Aucun texte ne prévoit qu’une copie de la décision doive être remise à l’avocat : il est donc conseillé au détenu qui entend exercer un recours de donner immédiatement la décision à son conseil pour éviter qu’un long délai d’acheminement du courrier, ou une impossibilité de l’envoyer, aboutisse à un dépassement du délai de recours (l’accès au nécessaire de correspondance ou à l’adresse de l’avocat s’avère parfois difficile, notamment en cellule de discipline).

Seule une sanction prévue par le Code de procédure pénale peut être prononcée par la commission de discipline.

On distingue deux types de sanctions : les sanctions « générales » qui sont encourues quelle que soit la faute disciplinaire commise, et les sanctions « spéciales », qui ne peuvent être prononcées qu’en fonction des circonstances dans lesquelles la faute a été commise.

Le type de sanctions pouvant être prononcées varie par ailleurs selon que la personne est majeure ou mineure.

Les sanctions « générales » peuvent être prononcées quelle que soit l’infraction disciplinaire commise (article R.57-7-33 du Code de procédure pénale).

Il s’agit de :

– « l’avertissement » ;

– l’interdiction de « recevoir des subsides de l’extérieur pendant une période maximum de deux mois ». Les mandats ou les virements bancaires reçus pendant cette période sont alors « retournés à leurs expéditeurs ou à un expéditeur désigné par la personne détenue » ;

– la « privation pendant une période de deux mois de la faculté d’effectuer en cantine tout achat autre que celui de produits d’hygiène, du nécessaire de correspondance et de tabac ».

Par produits d’hygiène, il faut entendre ceux « qui sont nécessaires à la propreté corporelle (savon, dentifrice, brosse à dents, etc.) et non pas ceux qui concernent l’esthétique, la parfumerie ou le maquillage », précise une circulaire du 9 juin 2011. Quant au « nécessaire de correspondance », il inclut « essentiellement : papier à lettres, enveloppes, timbres, crayons, stylos, recharges d’encre, etc. ». Enfin, outre le tabac, « l’ensemble des produits et objets liés à son usage : allumettes, papier à cigarette, pipes, etc. » peuvent continuer à être cantinés. La personne détenue ne peut pas non plus « être privée du droit de cantiner des unités de téléphone ». La privation d’effectuer des achats en cantine ne peut entraîner la confiscation des denrées déjà achetées et que le détenu a en sa possession dans sa cellule. Pour celles commandées avant le prononcé de la sanction mais pas encore reçues, l’administration ne pourra confisquer que les produits non périssables. Les commandes effectuées sur ces denrées pourront être soit « annulées » (le détenu doit alors être remboursé), soit, si cela s’avère impossible, « différées jusqu’à l’issue de la sanction » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures) ;

– « la privation pendant une durée maximum d’un mois de tout appareil acheté ou loué par l’intermédiaire de l’administration » (jeux électroniques, télévision, radio, réfrigérateur, mini-chaîne, rasoir électrique, thermoplongeurs, etc.). La décision de la commission de discipline doit préciser quel matériel est concerné. En aucun cas, il ne peut concerner l’« usage du téléphone » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

La privation d’un appareil entraîne « le dépôt momentané de l’appareil concerné au vestiaire de la personne détenue si celle-ci en est propriétaire » (ou locataire, en pratique, comme c’est souvent le cas des télévisions) – circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures ;

– la « privation d’une activité culturelle, sportive ou de loisirs pour une période maximum d’un mois ». La sanction de privation d’une activité doit viser une activité spécifique mentionnée par le président de la commission de discipline. Il ne peut en aucun cas « prononcer une privation générale de toutes les activités organisées au sein de l’établissement » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures) ;

– le « confinement en cellule individuelle ordinaire ». La durée du confinement ne peut excéder 20 jours en cas de faute du premier degré (30 jours dans les seuls cas de violences physiques), 14 jours en cas de faute du second degré, et 7 jours en cas de faute du troisième degré (article R.57-7-41 du Code de procédure pénale) ;

– enfin, la « mise en cellule disciplinaire », communément appelée « mitard ».

Certaines sanctions, dites spéciales, ne peuvent être prononcées qu’en fonction des circonstances de l’infraction disciplinaire commise (article R.57-7-34 du Code de procédure pénale).

Il s’agit de :

– la « suspension de la décision de classement dans un emploi ou une formation pour une durée maximum de huit jours » ou du « déclassement d’un emploi ou d’une formation ». Le déclassement signifie que la personne n’est plus autorisée à exercer l’emploi ou suivre la formation qu’elle a initiée, tandis que la suspension emporte provisoirement les mêmes effets. Ces sanctions peuvent concerner tout poste de travail, ou toute formation, qu’elle soit « qualifiante ou non », « rémunérée ou non ». Il peut s’agir également des « activités scolaires et d’enseignement ». La sanction de déclassement n’empêche pas la personne détenue de « formuler [une] nouvelle demande de classement dans une activité de travail ou de formation » et, en principe, de l’obtenir (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures) ;

– la « suppression de l’accès au parloir sans dispositif de séparation pour une période maximum de quatre mois » (il est alors remplacé par un parloir avec hygiaphone). Cette sanction ne peut être prise que lorsque la faute « a été commise au cours ou à l’occasion d’une visite » ;

Les mineurs peuvent être punis de la plupart des sanctions applicables aux majeurs, mais généralement pour des durées moins longues (article R.57-7-35 du Code de procédure pénale). En aucun cas, un mineur de moins de seize ans ne peut être sanctionné d’un placement en cellule disciplinaire (« mitard »).

Ces sanctions prononçables sont :

– « l’avertissement » ;

– la « privation pendant une période maximum de quinze jours de la faculté d’effectuer en cantine tout achat autre que celui de produits d’hygiène et du nécessaire de correspondance » ;

– la « privation pendant une durée maximum de quinze jours de tout appareil audiovisuel dont le mineur a l’usage personnel » ;

– la « privation » ou la « restriction » des « activités culturelles, sportives et de loisirs pour une période maximum de huit jours » ;

– le « confinement en cellule individuelle ordinaire ». Les mineurs de moins de seize ans ne peuvent être placés en confinement que pour les dix premières fautes du premier degré (article R.57-7-1 du Code de procédure pénale) et pour une durée n’excédant pas 3 jours (articles R.57-7-35 et R.57-7-42 du Code de procédure pénale).

Pour les mineurs de 16 à 18 ans, la durée du placement en cellule de confinement ne peut excéder 7 jours pour les fautes du premier degré, 5 jours pour les fautes du second degré et 3 jours pour les fautes du troisième degré (article R.57-7-42 du Code de procédure pénale) ;

– et enfin, une « activité de réparation » qui peut consister à « présenter oralement ses excuses à la victime de la faute », « rédiger une lettre d’excuse », « rédiger un écrit portant sur la faute commise et sur le préjudice qu’elle a occasionné » ou « effectuer un travail de nettoyage ou de rangement des locaux de l’établissement pour une durée globale n’excédant pas dix heures », si la faute « est en relation avec un manquement aux règles de l’hygiène » (article R.57-7-37 du Code de procédure pénale).

Les sanctions de réparation ne peuvent être prononcées qu’après que le président s’est assuré du « consentement du mineur » et de celui « des titulaires de l’exercice de l’autorité parentale ou de ses représentants légaux » (article R.57-7-37 du Code de procédure pénale).

Outre les sanctions applicables à l’ensemble des mineurs (voir question précédente), ceux âgés de plus de 16 ans au moment des faits peuvent subir une « suspension de la décision de classement dans un emploi ou une activité de formation pour une durée maximale de trois jours » si la faute a été « commise au cours ou à l’occasion du travail ou de cette activité » (article R. 57-7-36 du Code de procédure pénale).

Ils peuvent également être placés en cellule disciplinaire pour les dix premières fautes du premier degré énumérées par le Code de procédure pénale (voir question correspondante), pour les menaces des douzième et treizième fautes du premier degré et enfin pour la septième faute du deuxième degré.

Le placement en cellule disciplinaire ne peut excéder 7 jours pour les fautes du premier degré, et 5 jours pour les fautes du second degré (article R.57-7-48 du Code de procédure pénale).

Cette sanction consiste à maintenir la personne détenue seule « en cellule ordinaire », soit dans sa cellule habituelle si elle s’y trouve seule, soit dans une autre cellule (article R.57-7-38 du Code de procédure pénale). Dans les établissements qui pratiquent les régimes différenciés, le détenu confiné est généralement placé dans une cellule du régime strict.

La personne détenue confinée ne peut plus cantiner de produits « autres que l’achat de produits d’hygiène, du nécessaire de correspondance et, pour les personnes majeures, de tabac » (article R.57-7-39 du Code de procédure pénale).

De même, elle est privée d’accès à toutes les activités sportives et culturelles (bibliothèques, médiathèques ou salles de loisirs – article R.57-7-39 du Code de procédure pénale), sauf les « offices religieux » (article R.57-7-40 du Code de procédure pénale) et, s’agissant des mineurs, de l’accès à l’école ou à une formation (article R.57-7-40 du Code de procédure pénale).

Le confinement peut être « assorti, le cas échéant, de la privation de tout appareil acheté ou loué par l’intermédiaire de l’administration pendant la durée de l’exécution de la sanction » (comme la télévision, par exemple) – circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures. Cette privation doit être expressément prononcée par le président de la commission pour être mise en œuvre et ne peut s’appliquer à un mineur.

La personne confinée en cellule bénéficie d’au moins une heure quotidienne de promenade à l’air libre. Elle conserve le droit de correspondre, de téléphoner ou de recevoir des visites (article R.57-7-40 du Code de procédure pénale). Elle est autorisée à conserver avec elle les objets (livres, nécessaire de correspondance, objets de pratique religieuse…), produits (produits d’hygiène, tabac, allumettes…) et vêtements qu’elle avait avant la sanction. Toutefois, en cas de « risque pour les personnes » ou « pour des motifs de sécurité », ceux-ci peuvent lui être retirés.

Elle bénéficie d’un suivi médical équivalent à celui des personnes placées au quartier disciplinaire (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

En pratique, la sanction de confinement est peu utilisée en raison du surencombrement chronique des maisons d’arrêt et de la difficulté de placer une personne détenue seule en cellule.

Le placement en cellule disciplinaire consiste en l’enfermement de la personne détenue seule dans une cellule d’un quartier spécifique de la détention, appelé « quartier disciplinaire » ou plus communément « mitard » (article R.57-7-43 du Code de procédure pénale). La personne placée au quartier disciplinaire est totalement isolée, puisque pendant toute la durée de la sanction, elle ne peut en principe rencontrer aucun autre détenu.

En « raison de sa gravité », la sanction de cellule disciplinaire « ne doit être prononcée » que si les autres sanctions sont « insuffisantes eu égard à la nature et à la gravité de la faute » et « à la personnalité de son auteur et à sa responsabilité individuelle » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Dans la pratique, il apparaît cependant que le « mitard » demeure la sanction la plus utilisée (68 % des sanctions prononcées en 2010).

La cellule du quartier disciplinaire présente des aménagements spécifiques par rapport à une cellule ordinaire (article R.57-7-43 du Code de procédure pénale).

De taille généralement réduite, elle comporte un sas grillagé à l’entrée. Les toilettes disposées dans un coin de la cellule ne sont jamais cloisonnées, alors même que les repas sont pris à proximité. Un lavabo est généralement installé à proximité immédiate des WC. En guise de mobilier, la cellule doit comprendre un lit métallique (les lits « bas flanc » en béton sont en principe supprimés depuis 2000), une tablette, une étagère, ainsi qu’un siège, tous étant fixés au sol ou intégrés dans la structure. La fenêtre devrait être d’une « taille suffisante pour permettre, dans la journée, la pratique de la lecture ou de l’écriture sans l’apport de lumière artificielle » et son ouverture devrait « permettre un renouvellement d’air suffisant ». La cellule doit être également dotée d’un luminaire, installé dans le sas d’entrée, « permettant la lecture dans des conditions normales ». Dans la pratique, surtout dans les établissements anciens, les cellules sont très souvent sombres, mal aérées, très chaudes en été et très froides en hiver.

La cellule doit en outre comporter un interphone pour permettre à la personne détenue d’appeler un personnel à tout moment du jour ou de la nuit.

La literie (matelas, traversin, couvertures et draps) doit être laissée à la personne détenue y compris « pendant la journée ».

Celle-ci peut conserver des produits et objets de toilettes, les vêtements qu’elle porte « habituellement », ainsi que du tabac. Elle ne peut toutefois avoir à sa disposition dans la cellule que les vêtements correspondant « aux besoins quotidiens », le reste devant être rassemblé « dans un local prévu à cet effet ». Le change de vêtements doit être assuré « régulièrement » afin de permettre à la personne détenue « de se maintenir dans un état d’hygiène satisfaisant » (article 6 du règlement intérieur type des établissements pénitentiaires annexé à l’article R.57-6-18 du Code de procédure pénale).

Pour des « motifs de sécurité » ou en cas de « risque pour les personnes », notamment en cas de risque de passage à l’acte suicidaire (par exemple en cas d’antécédents d’automutilation) ou de comportement agressif, il peut être décidé le retrait de certains vêtements et effets personnels (lacets, ceinture ou allumettes, mais également les livres, nécessaires de correspondance et objets de pratique religieuse), voire même de l’ensemble des vêtements de la personne détenue. Celle-ci se voir alors remettre des vêtements jetables  (article 6 du règlement intérieur type des établissements pénitentiaires annexé à l’article R.57-6-18 du Code de procédure pénale et circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Enfin, la personne détenue placée en cellule disciplinaire doit pouvoir se rendre à la douche « au moins trois fois par semaine ».

Des « produits et objets de nettoyage » lui sont également fournis et elle doit nettoyer sa cellule « lors de sa sortie ». Les lieux s’avèrent en pratique souvent très sales.

Hormis la promenade, le détenu placé en cellule disciplinaire est privé de toute activité, qu’elles soient sportives, culturelles (bibliothèque, médiathèque, salle de loisirs…), de travail, de formation ou d’enseignement. Les mineurs ne peuvent toutefois être privés d’accès « à l’enseignement ou à la formation » (articles R.57-7-44 et R.57-7-45 du Code de procédure pénale).

L’achat de produits en cantine « autre que l’achat de produits d’hygiène, du nécessaire de correspondance et, pour les personnes majeures, de tabac » n’est pas possible (article R.57-7-44 du Code de procédure pénale).

La privation de télévision n’est prévue par aucun texte mais elle est systématique, les normes relatives aux cellules disciplinaires prévoyant qu’elles ne doivent pas comporter de prises électriques.

L’accès à un poste radio doit en principe être proposé (article 6 du règlement intérieur type des établissements pénitentiaires annexé à l’article R.57-6-18 du Code de procédure pénale), ce qui n’est pas toujours le cas en pratique.

La personne détenue conserve la possibilité de lire. Elle peut se faire remettre les ouvrages qu’elle possède en cellule ou au vestiaire, ainsi que les journaux, revues et publications auxquels elle était abonné « avant le prononcé de la sanction », sauf s’ils « présentent un risque pour les personnes » (article 6 du règlement intérieur type des établissements pénitentiaires annexé à l’article R.57-6-18 du Code de procédure pénale). Bien que n’ayant pas accès à la bibliothèque, elle doit en principe « se voir proposer un choix de livres, journaux et périodiques » mais, en général, elle n’a accès qu’à un panel restreint de livres choisis par le bibliothécaire ou les personnels pour le quartier disciplinaire.

La personne détenue peut conserver dans la cellule les objets de pratique religieuse « sauf si ces objets présentent un risque pour les personnes » (article 6 du règlement intérieur type des établissements pénitentiaires annexé à l’article R.57-6-18 du Code de procédure pénale).

Elle conserve par ailleurs la possibilité de rencontrer le personnel médical et pénitentiaire (y compris les conseillers du service pénitentiaire d’insertion et de probation), ainsi que l’aumônier.

Les contacts avec l’extérieur sont également réduits s’agissant des visites et de l’accès au téléphone.

– A l’exception des mineurs, pour lesquels aucune restriction de leur droit de visite avec les membres de leur famille ou « tout autre personne participant à leur éducation et à leur insertion sociale » n’est possible, les visites des proches ou d’un visiteur de prison sont réduites à un parloir par semaine (article R.57-7-45 du Code de procédure pénale). Les visites ont en principe lieu dans un parloir sans hygiaphone, sauf si cette mesure est prononcée à titre de sanction ou de mesure de police intérieure (article R.57-7-46 du Code de procédure pénale).

– La personne détenue conserve par contre la possibilité de rencontrer un avocat, ainsi que les différentes autorités consulaires et de contrôle (Contrôleur général des lieux de privation de liberté ou délégué du Défenseur des droits). Ces rencontres doivent avoir lieu dans un local au sein du quartier disciplinaire ou à proximité et garantissant la confidentialité des échanges (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

– S’agissant de l’accès au téléphone, il est restreint à un seul « appel téléphonique par période de sept jours ou à un appel si la sanction prononcée est inférieure à sept jours » (sauf pour les communications avec l’avocat qui ne sont pas limitées – article R.57-6-6 du Code de procédure pénale). En pratique, l’accès au téléphone n’est pas toujours garanti faute d’équipement dans le quartier disciplinaire. Certains établissements permettent dans ce cas de téléphoner depuis le quartier d’isolement ou la détention ordinaire.

– Par contre, « aucune restriction » au « droit de correspondance écrite » ne peut être faite et la personne détenue doit en principe « se voir remettre son nécessaire de correspondance (papier à lettres, enveloppes, timbres, crayons, stylo-bille, stylos, recharges d’encre, etc.) en cellule » (article R.57-7-45 du Code de procédure pénale et circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

La personne détenue placée au quartier disciplinaire doit en principe disposer d’une promenade « d’au moins une heure par jour » dans une cour « dédiée à cet effet » qui doit permettre un accès « à l’air libre » (articles R.57-7-45 et article 12 du règlement intérieur type des établissements pénitentiaires annexé à l’article R.57-6-18 du Code de procédure pénale).

Une circulaire du 9 juin 2011 recommande « de mettre en place au moins deux promenades par jour, l’une le matin et l’autre l’après-midi ».

En pratique, il n’est pas rare que la « promenade » se déroule dans un local fermé, ou que les différents barreaux et grillages posés sur ces cours obstruent fortement la vue du ciel. La surface de ces cours est fréquemment réduite (le plus souvent, une vingtaine de mètres carrés). Une situation contraire à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, qui a condamné la France pour les conditions de détention d’une personne détenue au quartier disciplinaire, relevant notamment que l’intéressé « ne pouvait sortir de sa cellule qu’une heure par jour pour une promenade qui, compte tenu de la configuration des lieux, ne lui permettait pas de faire de l’exercice physique » (arrêt CEDH, Payet c/ France, 20 janvier 2011, n° 19606/08).

L’article 57 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 prévoit que les fouilles doivent être justifiées par la présomption d’une infraction, les risques que le comportement des personnes détenues fait courir à la sécurité des personnes et au maintien du bon ordre dans l’établissement. En vertu de ce texte, la pratique consistant à imposer une fouille à nu à toute personne avant son placement au quartier disciplinaire est illégale (voir par exemple : CAA Lyon, 29 janv. 2015, n° 13LY03116 ; TA Poitiers, 24 mai 2017, OIP-SF, n°1500587 ; TA Versailles, 24 fév. 2017, n°1502106)

De même, la fouille corporelle pratiquée de façon systématique à l’issue de la promenade, au cours de laquelle la personne détenue n’a pu être en contact avec aucun autre détenu, est en principe proscrite.

Les fouilles devant être strictement « justifiées », ce qui peut être le cas lorsque les antécédents ou le comportement du détenu font redouter un danger pour lui (« antécédents d’automutilation, tentative de suicide, stockage de médicaments, etc. »), pour autrui (« attitude agressive lors de la commission de discipline ou lors du placement en cellule disciplinaire, menaces formulées, antécédents d’agression avec arme artisanale, etc. ») ou pour la sécurité de l’établissement (« tentative d’évasion ») – Circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures.

La liste des personnes « présentes au quartier disciplinaire » ou « placées en confinement en cellule individuelle ordinaire » doit être « communiquée quotidiennement à l’équipe médicale » (article R.57-7-31 du Code de procédure pénale). L’information doit être transmise au médecin généraliste de l’UCSA ou, en cas de « mise en prévention le week-end ou la nuit », au médecin de garde (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Le médecin informé décide, en fonction des éléments qui lui sont fournis, s’il se déplace ou non au quartier disciplinaire. Le médecin doit également examiner « sur place » chaque personne « au moins deux fois par semaine et aussi souvent qu’il l’estime nécessaire » (article R.57-7-31 du Code de procédure pénale). Il peut être en outre sollicité directement par la personne détenue ou par le chef d’établissement si ce dernier estime que l’état de santé de la personne détenue est préoccupant.

Si le médecin constate que le maintien en cellule disciplinaire « est de nature à compromettre la santé de l’intéressé », la sanction doit être « suspendue » (article R.57-7-31 du Code de procédure pénale). Concrètement, le médecin transmet « sans délai un certificat médical au chef d’établissement ». Ce dernier est lié par l’avis du médecin : il doit dans ce cas suspendre l’exécution de la sanction. En outre, la « reprise éventuelle de la sanction » doit en principe être « subordonnée à un avis médical conforme ». En pratique, l’administration demande parfois au médecin d’indiquer dans son certificat d’incompatibilité une durée pendant laquelle la sanction ne pourra être remise à exécution.

La circulaire du 9 juin 2011 précise que le médecin doit considérer « l’état physique et mental » du détenu. Mais les conditions de visite du médecin au quartier disciplinaire ne permettent pas toujours réellement d’apprécier l’état de santé de l’intéressé : visites très rapides, se déroulant généralement en présence d’un personnel pénitentiaire au mépris du secret médical, examen très sommaire ayant parfois lieu à travers la grille du sas de la cellule… En outre, les médecins hésitent fréquemment à se prononcer sur l’incompatibilité de l’état de santé du détenu avec le maintien au mitard, préférant éviter de s’immiscer dans des considérations qu’ils estiment relever exclusivement de l’administration pénitentiaire.

Tout placement au quartier disciplinaire d’une personne « présentant des troubles du comportement et bénéficiant à ce titre d’un suivi psychiatrique » ou « placée au service médico-psychologique régional » devrait également entraîner une information du psychiatre, qui doit « évaluer notamment l’impact de cette mesure sur la santé mentale de cette personne ». En pratique, l’administration ne procède pas toujours à l’information du psychiatre (alors qu’elle devrait le faire dès le stade de l’enquête) et la coordination entre services de santé somatique et psychiatrique n’est en outre pas toujours efficace. Or, pour la Cour européenne, « les autorités qui sont en présence d’un détenu dont il est avéré qu’il souffre de graves problèmes mentaux et présente des risques suicidaires » doivent prendre « les mesures particulièrement adaptées en vue de s’assurer de la compatibilité de cet état avec son maintien en quartier disciplinaire » et en particulier « à tout le moins, une consultation avec son psychiatre avant son placement en quartier disciplinaire et un suivi adapté durant son séjour ». A défaut, le placement en cellule disciplinaire peut constituer « un traitement et une peine inhumains et dégradants » (CEDH, Ketreb c/ France, 19 juillet 2012).

Aucune interdiction de placement au quartier disciplinaire des personnes fragiles ayant un comportement suicidaire n’est prévue. Hormis le cas où un médecin « constate que son exécution est de nature à compromettre la santé de l’intéressé » (voir question précédente), les mesures préconisées en cas « d’état de souffrance » repéré ou de « risque de passage à l’acte » suicidaire ne vont pas dans le sens d’une suspension de la mesure.

Une circulaire de juin 2011 invite les chefs d’établissement à maintenir la personne au quartier disciplinaire et à assortir la sanction de mesures visant à prévenir le passage à l’acte, comme par exemple « retirer à la personne certains objets ou vêtements laissés habituellement à sa disposition » (annexe n° 13 de la circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Mais en aucun cas, la personne ne peut être « laissée nue dans sa cellule ».

Une « audience systématique avec un personnel d’encadrement » doit être prévue afin notamment de pouvoir « détecter une éventuelle fragilité ». Cet entretien doit avoir lieu « le jour même du placement » (annexe n°13 de la circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

En cas de « risque imminent de passage à l’acte suicidaire ou de crise suicidaire aiguë », le chef d’établissement peut décider de recourir à la « dotation de protection d’urgence » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Cette dotation, appelée aussi « kit anti-suicide », est composée de deux couvertures « indéchirables », d’un pyjama, d’un gant et d’une serviette de toilette déchirables, ainsi que d’un matelas présentant des garanties de résistance au feu. Elle est remise au détenu en échange de ses effets et peut lui être imposée en cas de refus. Une telle mesure doit en principe être limitée dans le temps, mais il n’est pas rare, qu’en pratique, elle soit appliquée pendant plusieurs jours (note DAP du 15 juin 2009 relative à la prévention du suicide des personnes détenues). Lorsque le chef d’établissement décide de recourir à la « dotation de protection d’urgence », il doit en informer le service médical « ou le centre 15, en dehors des heures d’ouverture de l’UCSA », afin que « les mesures de prise en charge sanitaire nécessaires soient prises », y compris, le cas échéant, une « hospitalisation d’office » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures et note DAP du 13 juillet 2009).

Enfin, les personnes détenues placées en cellule disciplinaire sont, de manière générale, considérées comme devant faire l’objet d’une « surveillance spécifique » : ils sont soumis à des rondes plus fréquentes qu’en détention ordinaire et peuvent parfois être réveillées plusieurs fois au cours de la nuit (les surveillants allument la lumière pour vérifier que la personne détenue n’a pas attenté à ses jours).

Pour la Cour européenne des droits de l’homme, le placement ou le maintien au quartier disciplinaire de personnes détenues fragiles psychiquement et au comportement suicidaire peut pourtant constituer un « traitement inhumain et dégradant » et une « atteinte au droit à la vie ». En 2008, elle a condamné la France, sur ces fondements, pour le placement au mitard pour 45 jours d’une personne souffrant de « troubles psychotiques » qui avait « tenté de mettre fin à ses jours peu de temps auparavant » (CEDH, Renolde c/France, 16 octobre 2008). En 2012, elle a de nouveau condamné la France pour le placement en cellule disciplinaire pour 15 jours d’un détenu décrit comme « borderline » par les médecins, qui avait fait des tentatives de suicide au cours des mois précédents, notamment au quartier disciplinaire (CEDH, Ketreb c/ France, 19 juillet 2012).

En droit interne, le juge administratif estime également que le placement en cellule disciplinaire d’une personne présentant une « fragilité psychologique » et ayant une attitude suicidaire peut porter atteinte à son « intégrité physique et mentale » (TA Grenoble, 17 décembre 2009, décision devenue définitive). Dans cette décision, le tribunal a jugé que l’administration a commis une faute en plaçant et maintenant au quartier disciplinaire un détenu qui avait tenté de se pendre à l’annonce de la sanction disciplinaire et avait, en outre, des antécédents de crises d’épilepsie. Pour le juge administratif, le détenu aurait dû être sorti du quartier disciplinaire, même en l’absence d’avis en ce sens du médecin généraliste.

Le président de la commission de discipline doit prononcer des sanctions qui « lui paraissent proportionnées à la gravité des faits » et « adaptées à la personnalité de leur auteur » (article R.57-7-49 du Code de procédure pénale).

Pour ce faire, il doit tenir compte « des circonstances dans lesquelles la faute a été commise », mais également de « la personnalité de l’auteur de la faute » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Par ailleurs, la « nature de la faute » peut orienter le choix de la sanction (ainsi lorsqu’il est reproché à un détenu de jeter des détritus par la fenêtre de sa cellule, le prononcé d’une sanction de nettoyage des abords paraît particulièrement adapté – circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Certaines circonstances peuvent constituer des facteurs d’aggravation de la sanction. Il en va ainsi de « la vulnérabilité de la victime » (personne âgée ou handicapée) ou de la « volonté préméditée » de commettre une faute. L’« existence d’antécédents disciplinaires » ou le fait d’avoir commis la faute « en réunion » peuvent aussi constituer des facteurs d’aggravation.

Au contraire, en « l’absence d’antécédent disciplinaire », il « apparaît disproportionné de s’orienter vers la sanction la plus sévère, voire d’appliquer le maximum légal encouru pour cette sanction », précise la circulaire du 9 juin 2011. De même, « l’excuse de provocation » peut permettre de « diminuer la sévérité de la sanction prononcée » (comme, par exemple, une personne détenue qui se fait insulter et répond en donnant une gifle). Le juge administratif considère lui aussi que « l’exercice d’une modalité légitime de défense » exclut que soit retenue une faute de violences physiques contre le détenu agressé s’étant défendu (CAA Marseille, 11 décembre 2001, n° 98MA00849). Dans cette affaire, un détenu avait porté des coups à plusieurs autres détenus qui l’avaient bloqué dans une salle d’activité et agressé.

Enfin, il doit être tenu compte de la personnalité du détenu, « de ses antécédents, de ses capacités physiques et intellectuelles ou de son éventuelle fragilité » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Ainsi, les troubles du comportement de la personne détenue peuvent être pris en compte pour atténuer la sanction, voire conduire au prononcé d’une relaxe si le discernement était aboli. Un handicap physique (personne en fauteuil roulant, par exemple) peut aussi être pris en compte dans le choix de la sanction. La circulaire du 9 juin 2011 recommande ainsi de privilégier, dans ce cas, le confinement en cellule considérant que « le placement en cellule disciplinaire d’une personne détenue paraplégique qui bénéficie à ce titre d’un aménagement spécifique de sa cellule est inadapté ».

Les sanctions collectives sont « prohibées » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Un détenu ne peut donc être poursuivi pour des faits qui ne lui sont pas directement imputables. Par exemple, lorsqu’une une faute a été commise par un groupe de détenus sans qu’on puisse identifier celui ou ceux qui l’ont commise, il est interdit de sanctionner l’ensemble du groupe.

Rien n’empêche cependant le prononcé de sanctions individuelles à l’égard des détenus qui ont collectivement commis une même faute, quitte à moduler la sanction en fonction du degré de participation de chacun. Il faut cependant qu’ils soient identifiés « formellement et individuellement ».

Dans le cas où une seule faute a été commise :

A l’exception des mineurs pour lesquels une faute ne peut donner lieu qu’à une seule sanction (soit générale, soit spéciale – voir question correspondante), le président de la commission de discipline peut prononcer de manière cumulée une sanction générale (par exemple, le confinement) et une sanction spéciale (par exemple, parloir avec hygiaphone) à l’encontre d’un détenu ayant commis une faute disciplinaire.

Par contre, il ne lui est pas possible de prononcer plusieurs sanctions « générales » pour réprimer une même faute disciplinaire (par exemple, 10 jours de quartier disciplinaire et 10 jours de confinement) – articles R.57-7-50 et R.57-7-52 du Code de procédure pénale.

• Dans le cas où plusieurs fautes ont été commises

Deux cas de figure sont possibles :

1.     Les fautes sont sanctionnées à l’occasion d’une même audience.

Lorsque plusieurs fautes commises par une même personne détenue sont examinées, le président de la commission de discipline peut prononcer, pour chaque faute commise, une sanction générale et une sanction spécifique (article R.57-7-51 du Code de procédure pénale). En pratique, une personne détenue peut donc se voir infliger plusieurs sanctions générales (comme une sanction de quartier disciplinaire pour une première faute et de déclassement pour une deuxième).

Les sanctions s’exécutent alors les unes après les autres et leurs durées s’ajoutent les unes aux autres. Toutefois, en cas de cumul, lorsque les sanctions sont de même nature, leur durée cumulée ne peut excéder la limite du maximum prévu pour la faute la plus grave (article R.57-7-51 du Code de procédure pénale). Par exemple, un détenu sanctionné de 15 jours de cellule disciplinaire pour une faute du premier degré commise sans violences et de 10 autres jours une faute du deuxième degré ne pourra exécuter en tout plus de 20 jours de quartier disciplinaire (ce qui correspond à la durée maximale pouvant être prononcée pour une faute du premier degré sans violence).

Sont considérés de même nature le confinement en cellule individuelle ordinaire et le placement en cellule disciplinaire ; la privation de la faculté d’effectuer des achats en cantine et l’interdiction de recevoir des subsides ; la privation de tout appareil acheté ou loué par l’intermédiaire de l’administration et la privation d’activités culturelles, sportives ou de loisirs (article R.57-7-51 du Code de procédure pénale).

D’office ou sur demande de la personne détenue, le président de la commission de discipline peut décider de confondre des sanctions qu’il prononce « afin de les faire s’exécuter simultanément » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Ce mécanisme ne fonctionne toutefois qu’entre sanction de même nature (par exemple, il ne pourra confondre une sanction de quartier disciplinaire et une sanction de confinement).

2. Si les fautes sont sanctionnées à des audiences différentes, ou si le détenu fait l’objet d’un nouveau compte rendu d’incident alors qu’il exécute déjà une sanction, ou encore en cas de révocation d’un sursis.

Les règles précédentes relatives au cumul doivent s’appliquer de la même manière. En aucun cas, un détenu ne peut exécuter de façon continue des sanctions au-delà de la durée maximale pouvant être prononcée pour la faute la plus grave.

Lorsqu’une faute disciplinaire est reprochée à un détenu se trouvant déjà au quartier disciplinaire, un délai de 24 heures doit être « impérativement respecté » entre la sortie de la cellule de discipline et la comparution devant la commission de discipline. Au cours de ce délai, le détenu peut être placé en détention ordinaire ou à l’isolement (circulaire AP, 16 novembre 1999 – Sanction de cellule disciplinaire susceptible d’excéder le maximum réglementaire).

Il en va de même en cas de refus du détenu de sortir du quartier disciplinaire. Une circulaire du 16 novembre 1999 préconise dans ce cas de recourir à « l’usage proportionné de la force » pour l’extraire, sauf en cas d’ « impossibilité absolue de faire sortir le détenu du quartier disciplinaire ». Dans ce cas, le chef d’établissement adresse un compte rendu aux autorités judiciaires et administratives compétentes (préfet, procureur de la République, Directeur inter-régional des services pénitentiaires… – article D.280 du Code de procédure pénale).

« Lors du prononcé » de la sanction, le président de la commission de discipline peut décider d’accorder un sursis au détenu « pour tout ou partie de l’exécution de la sanction disciplinaire » (article R.57-7-54 du Code de procédure pénale).

Le prononcé d’un sursis est également possible « au cours de [l’] exécution » de la sanction (article R.57-7-54 du Code de procédure pénale). Le prononcé d’un sursis au cours de l’exécution de la sanction intervient généralement en raison du bon comportement de la personne. La décision est prise par le président de la commission de discipline au cours d’une réunion de la commission. Il n’est toutefois pas nécessaire dans ce cas de respecter la procédure de convocation préalable, ni les délais car il ne s’agit pas d’une audience disciplinaire à proprement parler (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Une telle hypothèse n’est cependant pas fréquente en pratique.

Le président de la commission de discipline peut prononcer soit un sursis simple, soit un sursis assorti de l’obligation d’accomplir un travail d’intérêt général. Il fixe par ailleurs la durée du délai d’épreuve, qui ne peut excéder six mois pour les majeurs et trois mois pour les mineurs (article R.57-7-55 du Code de procédure pénale).

Lors du prononcé du sursis, il doit attirer l’attention du détenu sur les conséquences du sursis et les risques d’une éventuelle réitération (article R.57-7-55 du Code de procédure pénale).

• Le sursis simple

Le prononcé d’un sursis simple est possible pour toutes les sanctions (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Comme en matière pénale, le sursis simple signifie concrètement que la personne détenue n’exécutera pas la sanction, ou pas en totalité, sauf s’il commet une nouvelle faute disciplinaire pendant le délai d’épreuve, qui ne peut excéder six mois pour les majeurs et trois mois pour les mineurs (article R.57-7-55 du Code de procédure pénale).

Si la personne détenue commet une nouvelle faute disciplinaire entraînant le prononcé d’une sanction au cours du délai d’épreuve, le sursis sera révoqué automatiquement, totalement ou en partie. A moins que le président de la commission n’en décide autrement (article R.57-7-56 du Code de procédure pénale). Dans la mesure où « une trop grande différence de nature et de gravité entre la faute ayant suscité le sursis et celle qui entraîne sa révocation peut susciter l’incompréhension de la personne sanctionnée », la circulaire du 9 juin 2011 recommande dans ce cas de « lui faire profiter d’une dispense de révocation ».

En cas de révocation du sursis, la première sanction est alors exécutée en plus de celle prononcée pour la seconde faute, sous réserve de la règle relative au cumul des sanctions de même nature (voir question précédente). La sanction de cellule disciplinaire s’exécute « préalablement à toute autre sanction » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Si le détenu ne fait pas l’objet d’une nouvelle sanction disciplinaire pendant le délai d’épreuve, la sanction est « réputée non avenue » : elle ne pourra plus être exécutée, et mention doit en être portée sur le « registre des sanctions disciplinaires prononcées » (article R.57-7-57 du Code de procédure pénale).

• Le sursis assorti de l’obligation d’effectuer des travaux d’intérêt collectif

Le président de la commission de discipline peut décider d’assortir le sursis d’une obligation pour les majeurs d’accomplir des « travaux d’intérêt collectif » au cours d’une partie ou de la totalité du délai de suspension, pour une durée globale n’excédant pas 40 heures (Article R.57-7-58 du Code de procédure pénale).

Le prononcé de « travaux d’intérêt collectif » ne peut s’appliquer qu’en cas de sanction de cellule disciplinaire ou de confinement avec sursis pour les personnes majeures.

Concernant les mineurs de plus de seize ans, suite au prononcé d’un sursis à exécution « de l’une des sanctions de cellule prévues au 6° de l’article R. 57-7-35 et à l’article R. 57-7-36 » du Code de procédure pénale, « des travaux de nettoyage » peuvent être décidés par le président de la commission de discipline  « pendant tout ou partie du délai de suspension de la sanction » et « pour une durée globale n’excédant pas vingt heures » (article R.57-7-58 du Code de procédure pénale).

Dans tous les cas, le consentement de la personne détenue doit être préalablement recueilli.

Les travaux d’intérêt collectif ou de nettoyage sont une sanction et ne font donc pas l’objet d’une rémunération (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Outre le cas où la personne détenue commettrait une nouvelle faute, le sursis peut être totalement ou en partie révoqué en cas « d’inexécution totale ou partielle du travail ordonné » qui doit être « constatée par l’autorité disciplinaire sur rapport d’un membre du personnel », la personne détenue devant « être entendue » (article R.57-7-59 du Code de procédure pénale). Un compte rendu d’incident doit alors être rédigé.

Le chef d’établissement peut par ailleurs décider de poursuivre les faits, auquel cas une nouvelle procédure disciplinaire peut être engagée. Au terme de cette procédure, le président de la commission de discipline peut « prononcer la révocation du sursis à titre principal », ainsi qu’une nouvelle sanction pour « refus de se soumettre à une sanction disciplinaire ».

En l’absence de nouvelle faute commise durant le délai d’épreuve et si le travail est exécuté, la sanction est « réputée non avenue », dans les mêmes conditions que pour le sursis simple (article R.57-7-57 du Code de procédure pénale).

Le président de la commission de discipline « détermine la date de mise à exécution des sanctions prononcées » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Les sanctions de parloir avec hygiaphone, de privation de cantine, de privation d’appareil, de privation d’activité, de suspension du travail ou de la formation, et de déclassement, doivent avoir la même date de début d’exécution que la sanction de cellule disciplinaire ou, le cas échéant, de confinement (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Une sanction ne peut être mise à exécution plus de six mois après son prononcé (article R.57-7-27 du Code de procédure pénale).

Ce délai de six mois est prolongé en cas de sursis ou de suspension de la sanction. En revanche, si la suspension excède six mois, la sanction ne peut plus être exécutée (article R.57-7-61 du Code de procédure pénale).

En pratique, les sanctions sont généralement exécutées immédiatement.

Le président de la commission de discipline peut dispenser la personne sanctionnée de tout ou partie de son exécution et peut aussi suspendre ou fractionner cette exécution (article R.57-7-60 du Code de procédure pénale). La dispense fait disparaître la sanction ; le fractionnement entraîne son exécution en plusieurs fois ; la suspension ne fait que différer l’exécution de la sanction.

Cette décision peut être prise « lors du prononcé ou au cours de l’exécution de la sanction » (article R.57-7-60 du Code de procédure pénale), auquel cas la réunion de la commission de discipline n’est pas nécessaire.

Un aménagement de la sanction peut être décidé soit « en raison de la bonne conduite de l’intéressé » (notamment, « lorsque le délai qui sépare la commission de la faute de la comparution en commission de discipline est particulièrement long »), soit « à l’occasion d’une fête légale ou d’un événement national », soit « pour suivre une formation ou pour passer un examen », soit « pour lui permettre de suivre un traitement médical » (article R.57-7-60 du Code de procédure pénale et circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). La circulaire du 9 juin 2011 recommande « une interprétation large de la notion de traitement médical », la participation du détenu à « divers groupes de parole » pouvant par exemple justifier un aménagement de la sanction.

Ces décisions d’aménagement doivent être notifiées au détenu, qui se voit alors informé des modalités de mise en œuvre de l’aménagement décidé. Elles doivent également être mentionnées au registre des sanctions, versées au dossier individuel du détenu et jointes à la procédure disciplinaire (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Le juge de l’application des peines (JAP), ou le juge des enfants pour les mineurs, doit être obligatoirement avisé dans les cinq jours (articles R.57-7-28 et R.57-7-29 du Code de procédure pénale) dès qu’un détenu définitivement condamné fait l’objet d’une sanction disciplinaire.

Si la sanction consiste en un placement en cellule disciplinaire ou un confinement en cellule qui « excède sept jours », le chef d’établissement doit en informer également la commission d’application des peines (CAP). Pour les mineurs, cette obligation d’information de la CAP concerne toutes les sanctions de cellule disciplinaire ou de confinement en cellule, quelle que soit leur durée (article R.57-7-29 du Code de procédure pénale).

Constitutive d’un « mauvais comportement en détention », la commission d’une faute disciplinaire peut entraîner un retrait total ou partiel du crédit de réduction de peine par le JAP (article 721 du Code de procédure pénale). Le retrait peut aller jusqu’à trois mois par an et sept jours par mois. La décision de retrait est en général prise après avis de la commission d’application des peines sans débat contradictoire (ni le détenu, ni son avocat n’auront été entendus avant la prise de décision).

En pratique, la plupart des JAP retirent systématiquement des CRP lorsqu’un détenu a été sanctionné par un placement en cellule disciplinaire ou de confinement, avec ou sans sursis. C’est pourquoi, à titre préventif, rien n’empêche le détenu ou son avocat d’adresser au JAP des observations par courrier dès qu’une sanction disciplinaire a été prise. Toutefois, la Cour de cassation a estimé qu’une décision de retrait des CRP est prise « indépendamment de la procédure disciplinaire suivie ». Ce qui signifie qu’une éventuelle annulation de la procédure disciplinaire par le juge administratif n’oblige nullement le JAP à modifier sa décision (Chambre criminelle de la Cour de cassation, 18 mars 2009, n° 08-83.325.).

Le détenu est informé de la décision de retrait des CRP et peut en faire appel dans un délai de vingt-quatre heures auprès du président de la chambre de l’application des peines (articles 712-11 et 712-12 du Code de procédure pénale).

Les juridictions de l’application des peines peuvent également tenir compte du comportement en détention lors de l’examen des demandes d’octroi d’une mesure d’aménagement de peine. Ils peuvent ainsi se fonder sur des sanctions disciplinaires pour refuser une permission de sortir, une semi-liberté, un placement extérieur, une libération conditionnelle, etc. La « mauvaise conduite » d’un condamné peut même justifier le retrait d’une mesure d’aménagement « précédemment accordée » (article D.49-25 du Code de procédure pénale). Ainsi, un détenu auquel a été accordée une permission de sortir ou une libération conditionnelle par exemple, qui n’a pas encore été mise à exécution, peut se voir retirer le bénéfice de la mesure en cas de sanction disciplinaire prononcée entre-temps.

Nombre de fautes disciplinaires constituent également des infractions pénales (par exemple, les violences, les « outrages », l’introduction de stupéfiants ou de téléphones portables en prison).

Le chef d’établissement ou toute personne témoin d’une infraction pénale étant censé la signaler au parquet, le détenu pourra faire l’objet de poursuites disciplinaires et judiciaires pour les mêmes faits, et par conséquent être éventuellement condamné à une peine de prison supplémentaire. Ce cumul de sanctions aux plans pénal et disciplinaire a été jugé licite par la chambre criminelle de la Cour de cassation (Chambre criminelle, arrêt Bykowski, 27 mars 1997, n° 96-82669). En pratique, ce type de poursuites s’avère fréquent, plus particulièrement en cas de violences contre des personnels, de trafic de stupéfiants ou de détention de téléphone portable. Les politiques des parquets ou des chefs d’établissement peuvent néanmoins varier selon les établissements.

Les sanctions disciplinaires peuvent d’abord être contestées dans le cadre d’un recours hiérarchique adressé au directeur interrégional des services pénitentiaires (article R. 57-7-32 du code de procédure pénale).

Toutes les sanctions disciplinaires prononcées sont également susceptibles d’être contestées devant le juge administratif, y compris si elles ont été prononcées avec sursis (CE, M. B., 22 janvier 2013, n°349806).

Il en va évidemment ainsi de la sanction de placement en cellule disciplinaire, et ce, quelle que soit sa durée (CE, 17 février 1995, Marie.), mais également par exemple des sanctions de confinement en cellule ordinaire (CAA de Lyon, 9 octobre 2008, n° 06LY00287) ; de déclassement disciplinaire (CAA de Nancy, 18 février 2010, n° 09NC01260) ou encore de simple avertissement (CE, 21 mai 2014, n° 359672).

La personne détenue qui entend former un recours contre une sanction disciplinaire doit, en premier lieu, exercer un « recours hiérarchique » auprès du directeur interrégional des services pénitentiaires (article R. 57-7-32 du code de procédure pénale). Le tribunal administratif ne pourra être saisi, en second lieu, qu’en cas de rejet du recours hiérarchique par le directeur interrégional des services pénitentiaires.

1)   Le recours hiérarchique auprès du directeur interrégional des services pénitentiaires

Ce recours hiérarchique préalable est obligatoire avant tout recours devant le juge administratif (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Le recours doit être exercé dans le délai de 15 jours (article R.57-7-32 du Code de procédure pénale). Le délai commence à courir le lendemain du jour de la notification de la sanction disciplinaire (c’est-à-dire le lendemain du jour où le détenu est invité à signer la décision) et expire 15 jours plus tard à minuit. Si le dernier jour est un samedi, un dimanche ou un jour férié, le délai de recours est « prorogé » jusqu’au premier jour ouvrable suivant.

Aucune formalité particulière n’est exigée s’agissant de la forme du recours hiérarchique, hormis le fait qu’il doit être rédigé en français (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures). Le recours peut être envoyé par lettre simple mais il  est préférable de l’adresser par lettre recommandée avec accusé de réception afin de pouvoir conserver une preuve de son envoi dans le délai de 15 jours.

La personne détenue doit veiller à rédiger ce recours de la manière la plus complète possible. Elle a donc intérêt à se faire assister d’un avocat, qu’elle doit saisir rapidement pour ne pas dépasser le délai de 15 jours.

Il est recommandé d’invoquer au moins un vice se rapportant à chacune des deux « causes juridiques » du recours pour excès de pouvoir (« légalité externe » et « légalité interne » – voir la fiche « Saisir le juge administratif »).

La personne détenue peut d’une part invoquer des moyens de « légalité externe » tel un vice de procédure (si la personne mis en cause n’a pas eu accès au dossier disciplinaire au plus tard 24h avant la réunion de la commission de discipline par exemple) ou un vice de forme (l’insuffisance de motivation par exemple), ou encore l’incompétence de l’auteur de la décision de poursuite ou de sanction (si la décision a été prise par un personnel ne disposant pas de délégation ou que cette délégation n’a pas fait l’objet de mesures de publicité).

La personne détenue peut d’autre part soulever des critiques relatives à la « légalité interne » de la décision de sanction (inexistence des faits reprochés, disproportion de la sanction, actes sanctionnés non constitutifs d’une infraction disciplinaire, etc.) – circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures.

Il est très fortement conseillé de conserver une copie du recours envoyé au directeur interrégional (cette devra être produite devant le tribunal administratif si une procédure de référé est engagée)

Dès réception du recours, le directeur interrégional doit en accuser réception par courrier adressé à la personne détenue ou à son avocat éventuel.

Il dispose d’un délai d’un mois à compter de la réception du recours pour répondre au recours (article R.57-7-32 du Code de procédure pénale). L’absence de réponse dans ce délai vaut à une décision implicite de rejet du recours.

En théorie, le directeur interrégional doit contrôler tous les motifs d’illégalité éventuelle de la sanction, même ceux « qui n’ont pas été soulevés par le requérant ». En réalité, ce contrôle est souvent très restreint et le directeur interrégional n’annule les décisions que si elles présentent des illégalités reconnues comme telles par l’administration.

2)     Le recours devant le tribunal administratif

A compter de la décision explicite ou implicite (pas de réponse au recours hiérarchique pendant plus d’un mois) de rejet du directeur interrégional des services pénitentiaires, la personne détenue dispose d’un délai de deux mois pour saisir le tribunal administratif. En pratique, ce délai commence un mois après la date de l’accusé de réception envoyé par l’administration (en cas de rejet implicite) ou à la date de réception de la décision du directeur interrégional (en cas de rejet explicite).

La personne détenue doit formellement diriger son recours contre la décision du directeur interrégional des services pénitentiaires qui est regardée comme se substituant à la décision de la commission de discipline. En pratique cependant, un recours contre la sanction initiale sera « réputé » dirigé contre la décision du directeur interrégional, sous réserve que le recours hiérarchique a bien été exercé (Conseil d’Etat, 19 décembre 2008, n° 297187).

Le recours doit être effectué auprès du tribunal administratif territorialement compétent en fonction du lieu de détention (voir l’annuaire des tribunaux administratifs).

Comme pour le recours hiérarchique, il est recommandé d’invoquer au moins un moyen se rapportant à chacune des deux « causes juridiques » du recours pour excès de pouvoir (« légalité externe » et « légalité interne » – voir la fiche « Saisir le juge administratif »).

L’assistance d’un avocat est particulièrement recommandée.

Ni le recours auprès du directeur interrégional, ni celui auprès du tribunal administratif ne sont suspensifs. Les exercer n’entraîne donc pas la suspension de l’exécution de la sanction prononcée.

Le plus souvent, la sanction aura depuis longtemps été entièrement subie la juridiction administrative rendra sa décision.

Il peut en être autrement si le détenu exerce, avec succès, une procédure de référé-suspension ou de référé-liberté pour solliciter la suspension de la sanction (voir la fiche « Saisir le juge administratif »). Une telle procédure peut être engagée sans attendre la réponse du directeur interrégional au recours hiérarchique (ce recours hiérarchique doit avoir été tout de même formé pour pouvoir engager une procédure en référé).

Les conditions pour engager une procédure de référé dépendant du type de référé (référé-liberté ou référé-suspension) et sont globalement restrictives (voir « Saisir le juge administratif »). Il est donc vivement recommandé de faire appel à un avocat.

Si elle est décidée, la suspension de la décision prend effet à compter de la notification de l’ordonnance de référé et dure jusqu’à l’intervention de la décision (implicite ou explicite) du directeur interrégional pénitentiaire sur le recours hiérarchique formé par le détenu.

Aucun texte n’impose à l’administration de retirer une procédure du dossier si elle a été annulée par le directeur interrégional ou par le juge, ni même à mentionner l’existence d’une telle décision.

Seules doivent être signalées dans le dossier individuel les décisions d’aménagement de l’exécution des sanctions.

En pratique, l’ensemble des comptes rendus d’incident sont en général gardés dans le dossier du détenu, même s’ils n’ont pas fait l’objet de poursuites. La circulaire du 9 juin 2011 prévoit même qu’en cas de « classement sans suite », le compte rendu d’incident et le rapport d’enquête doivent être « versés au dossier individuel », ces documents étant « communicables à la personne détenue qui en fait la demande » (circulaire DAP du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

En outre, le décret ayant modifié le traitement de données dans le logiciel « gestion informatisée des détenus en établissement » (GIDE) prévoit que peuvent être conservées des données au titre de la gestion des procédures disciplinaires, pour chaque détenu et notamment le « type de faute », la « date de l’événement », la « description des faits », les « rapports d’enquêtes et d’incidents » et les « décisions de la commission de discipline » (article 4 du décret 2011-817 du 6 juillet 2011).

Quelle que soit l’issue de la procédure disciplinaire, l’ensemble des pièces (du compte rendu d’incident à la décision) sont communicables au détenu « dès lors que la procédure disciplinaire en cause est désormais close », selon la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) – avis CADA n° 20052050 du 9 juin 2005.