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Cour d’appel de Nîmes: examen de la demande de suspension de peine d’un détenu sous assistance respiratoire permanente

La Cour d'appel de Nîmes examina demain la demande de suspension de peine présentée par un détenu du centre pénitentiaire d'Avignon atteint d'une grave maladie pulmonaire, placé sous oxygénothérapie permanente et en fauteuil roulant. La demande de celui-ci avait été rejetée par le TGI d'Avignon, malgré l'inadéquation de sa prise en charge et l'aggravation continue de son état de santé.Agé de 67 ans, J. L est incarcéré depuis 1988 et écroué au centre pénitentiaire d'Avignon-Le Pontet (Vaucluse). Il souffre de longue date d'une insuffisance respiratoire due à un tabagisme ancien et important, qui a provoqué une grave maladie pulmonaire. En février 2009, lors d'une hospitalisation en soins intensifs à l'Hôpital Nord de Marseille, il s'est vu diagnostiquée une broncho-pneumopathie chronique obstructive aggravée d'un emphysème destructif. La maladie affecte de manière permanente ses capacités respiratoires. Il doit subir une oxygénothérapie permanente par extracteur (concentrateur à partir de l'air ambiant) et fait l'objet d'hospitalisations régulières en raison d'épisodes de détresse respiratoire.

Depuis un an, les déplacements de J.L. dans la prison se limitent à un périmètre très restreint. Il « ne se déplace plus, sauf à se rendre à l’infirmerie » relève l’administration pénitentiaire dans un rapport au juge d’application des peines. Il n’a plus aucune activité et a dû renoncer aux unités de vie familiales. Son état requiert, d’après les autorités pénitentiaires, « une prise en charge complexe en raison de son assistance respiratoire, difficilement compatible avec son maintien au centre pénitentiaire du Pontet ». L’un des médecins experts qui examiné M. L en juillet 2009 relevait que celui-ci était « cyanosé des lèvres » malgré son assistance respiratoire, et qu’il présentait de manière significative une désaturation en oxygène lors des efforts de la vie quotidienne comme le simple fait de s’allonger sur un lit.

Depuis la réalisation de cette expertise, son état s’est encore dégradé. En octobre 2009, M. L a présenté une nouvelle détresse respiratoire particulièrement sévère justifiant son hospitalisation en urgence au service de réanimation du CHU d’Avignon. Il a ensuite été admis au sein de l’unité hospitalière sécurisée de Marseille (UHSI), avant de réintégrer le centre pénitentiaire fin novembre 2009.

Depuis, J.L. ne se déplace plus qu’en fauteuil roulant. Se laver, manger, nettoyer sa cellule s’avère particulièrement difficiles. Sa dépendance accrue à l’oxygénothérapie impose désormais la présence de deux extracteurs d’oxygène en cellule. Or, outre le bruit et l’inconfort du dispositif relevé par le service médical de la prison, l’exiguïté des cellules ne permettent pas une utilisation de celui-ci dans des conditions adéquates. Selon un certificat médical émis fin novembre 2009, une cuve d’oxygène liquideserait nécessaire pour assurer la prise en charge de M. L. Mais, compte tenu des risques d’explosion, celle-ci ne peut être installée en détention pour des raisons de sécurité. Au regard de cette impossibilité, les médecins qui le suivent ont estimé que l’état de santé de l’intéressé était « incompatible avec la détention ».

En dépit de la gravité de son état de santé, sa demande de suspension de peine a été rejetée le 21 décembre 2009 par le TGI d’Avignon. Le refus est motivé par le fait que les différentes expertises ne concluent pas de manière concordantes à l’engagement du pronostic vital du fait de la maladie ou à l’incompatibilité durable de l’état de santé avec la détention, à condition que J.L. soit correctement équipé d’un matériel d’oxygénothérapie et bénéficie d’un traitement adapté.

Le 26 janvier 2010, M. L a de nouveau été hospitalisé en urgence au CHU d’Avignon après une nouvelle décompensation respiratoire et transféré à l’UHSI de Marseille le 12 février pour un nouveau bilan de santé.

Selon l’un des magistrats de la juridiction, interrogé par l’OIP, le tribunal a considéré s’être trouvé « dans ce dossier dans un rapport de force », soulignant que l’intéressé « bénéficie de soins adéquats », que « ses conditions de détention sont normales et adaptées à sa pathologie ». Il estime que « c’est son propre comportement qui pose problème », faisant référence à la persistance de son addiction au tabac malgré plusieurs tentatives de sevrage et à plusieurs grèves de la faim menées en protestation contre un éventuel transfert au centre national d’orientation (CNO) de Fresnes (Val-de-Marne), qu’aurait légalement imposé l’examen d’une demande de libération conditionnelle antérieurement présentée par J.L.

L’OIP rappelle que :

– la Cour de cassation juge que « l’incompatibilité durable du maintien en détention avec l’état de santé du condamné doit s’apprécier concrètement au regard des possibilités offertes par les établissements pénitentiaires susceptibles de le recevoir » (Cass. Crim., 7 janvier 2009);

– la Cour européenne des droits de l’homme considère que « l’état de santé, l’âge et un lourd handicap physique constituent désormais des situations pour lesquelles la question de la capacité à la détention est aujourd’hui posée au regard de [l’interdiction des traitements inhumains et dégradants]» (CEDH Rivière c. France, 11 juillet 2006). La France a déjà été condamnée à deux reprises pour avoir maintenu en prison des condamnés dont l’état de santé était incompatible avec la
détention.

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