«Je demande, en vain depuis vingt-sept mois, un rendez-vous avec un ophtalmologue. Je ne vois plus assez pour lire et pour écrire », signale à l’OIP au mois de juin 2016, M.V., détenu au centre de détention (CD) de Châteaudun.
Saisie par l’OIP, l’unité sanitaire confirme en août 2016 avoir « une liste de trente-quatre personnes en attente de consultations », dont « certaines depuis janvier 2014 ». Parmi ces patients, « quatre diabétiques » pour lesquels un fond d’œil doit être pratiqué « tous les ans ou tous les deux ans, selon la rétinopathie ». M.V. « va devoir encore attendre malheureusement », conclut l’unité sanitaire. En effet, aucune consultation ophtalmologique n’est assurée par l’hôpital de Châteaudun, auquel l’unité sanitaire du CD est rattachée.
A l’hôpital de Chartres, seul un ophtalmologue intervient, « à mi-temps ». Et hors du département, à Orléans, où « les praticiens hospitaliers ne sont pas nombreux », les consultations s’obtiennent au compte-gouttes. Les besoins ne sont pourtant pas immenses. L’unité sanitaire estime que « deux consultations par mois » seraient « l’idéal ».
« L’Agence régionale de santé (ARS) est prévenue, les préfets sont prévenus, nous sommes toujours à la recherche d’une solution », explique l’unité sanitaire. Contactée par l’OIP, l’ARS confirme être au courant d’une situation « à laquelle il est très compliqué de remédier » car le département « connaît une grave pénurie médicale » en généralistes et spécialistes.
La solution de la permission de sortir pour raison médicale, si elle ne concerne que les détenus qui y sont éligibles *, leur permettrait de se rendre à des consultations de ville ou dans des hôpitaux des départements voisins, désengorgeant ainsi la liste d’attente. Sollicitée fin septembre 2016 par l’OIP, la vice-présidente chargée de l’application des peines du TGI de Chartres répond ne pas avoir été saisie de demandes de permissions « ayant pour motif médical la nécessité de bénéficier de soins ou de consultations ophtalmologiques », ni avoir été saisie par des détenus « faisant état de cette difficulté ». Et pour cause : l’unité sanitaire, devant la frilosité des juges précédents à accorder ce type de permissions, avait cessé de les solliciter. « Si de telles demandes devaient être formulées par les détenus, elles seraient naturellement audiencées en commission d’application des peines et traitées avec une attention particulière », précise la vice-présidente à l’OIP. Une rencontre entre unité sanitaire et service de l’application des peines devrait être prochainement organisée.
Par Manon Picaronie, coordination Centre et Est
* Articles 723-3 et D.142 à 147 du Code de procédure pénale