Dans une note du 15 novembre 2013 rendue publique le 31 décembre, la ministre de la Justice vient clairement rappeler aux services pénitentiaires « la prohibition du caractère systématique des fouilles » à nu.
Le texte rappelle que la décision de soumettre une personne détenue à une mesure de fouille intégrale doit être individualisée, c’est-à-dire fondée sur le risque effectif que le comportement de l’intéressé fait courir à la sécurité ou au bon ordre dans l’établissement, et adaptée à sa personnalité. Et qu’elle ne peut être prise que si les autres moyens de contrôle (fouille par palpation, portique de détection métallique) s’avèrent insuffisants. Ce rappel à la loi était attendu: bien que posé par la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, ces principes n’ont jamais été respectés dans l’ensemble des prisons françaises, malgré de nombreuses condamnations en justice. Après plus de deux années de contentieux pour obtenir la fin des pratiques de fouilles à nu systématiques, l’OIP ne peut que saluer ce rappel. Mais doit aussi en souligner les limites. Le cadre posé par la note du 15 novembre n’est pas suffisamment protecteur des droits des personnes détenues. Ainsi, aucune procédure contradictoire préalable n’est imposée à l’administration lorsqu’elle décide de procéder à la fouille à nu d’une personne. Sa décision peut n’être motivée que sommairement et elle n’a pas l’obligation d’être notifiée à la personne concernée. Surtout, la note laisse ouverte la possibilité d’appliquer un « régime exorbitant » de fouilles intégrales systématiques à l’encontre de certaines personnes détenues «identifiées comme présentant des risques ». En n’encadrant pas strictement les motifs qui peuvent justifier une telle application, elle ne fait pas en pratique obstacle à un recours toujours massif aux fouilles à nu en détention. Ces derniers mois, dans plusieurs établissements, des listes de personnes devant se soumettre à des fouilles intégrales systématiques ont été établies par l’administration pénitentiaire, comme l’y invite désormais la note ministérielle, sur la base de critères de dangerosité larges ou imprécis. À Fleury-Mérogis par exemple, la moitié des détenus figurent sur cette liste. Le caractère exceptionnel de la fouille à nu, voulu par le législateur en 2009, risque de ne pas être encore réalité dans les prisons françaises.
Note du 15 novembre 2013 relative aux moyens de contrôle des personnes détenues, NOR : JUSK1340043N