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Statistiques pénales du Conseil de l’Europe : la France dans le bas du tableau

Le Conseil de l’Europe a publié, le 3 mai 2013, la mise à jour annuelle de ses statistiques pénales (SPACE 1). Qu’il s’agisse du taux d’incarcération (en 25e position sur 51, derrière 24 administrations affichant un taux inférieur), de surpopulation (39e), de mortalité (37e) ou de suicide (48e), la France figure bien souvent dans le bas du tableau.

Le document compile les données au 1er septembre 2011 fournies par 51 des 52 administrations pénitentiaires des 47 États membres (1) – seule la Fédération de Russie n’ayant pas répondu. Au-delà des difficultés à comparer des situations hétérogènes, l’exercice dresse un inventaire contrasté de l’archipel carcéral européen. Si le nombre total de personnes détenues dans les États membres a légèrement décru (– 2 % entre 2010 et 2011), le taux de détention moyen, lui, a augmenté : 154 détenus pour 100 000 habitants, contre 149,3 l’année précédente. Avec un taux de 111,3 (24 pays affichant une proportion inférieure), la France se place parmi les 34 pays dont le Conseil de l’Europe considère qu’ils ont un taux de détention « élevé » (supérieur à 100 pour 100 000). L’Allemagne, l’Irlande, les Pays-Bas, la Suisse, la Slovénie, l’Islande, la Norvège, la Suède ou la Finlande… se situent en dessous de ce seuil. La France figure également au 7e rang des 11 pays ayant connu la plus forte augmentation entre 2010 et 2011 (+ 7,6 %), quand 28 pays ont vu leur taux de détention décroître (dont l’Angleterre et le pays de Galles, les Pays-Bas, l’Italie, l’Espagne ou l’Irlande).

Les prisons européennes sont utilisées au maximum de leur capacité, avec 99,5 détenus pour 100 places (contre 98,4 dans la précédente édition), la moitié des systèmes pénitentiaires étant affectée par la surpopulation. Une moyenne à lire avec précaution, les modalités de calcul variant considérablement d’un pays à l’autre. Elle masque de fortes disparités entre les États (de 16,7 à San Marin à 157,6 en Serbie), mais aussi à l’intérieur d’un pays, comme le montre la situation française: derrière un taux moyen de 113,4 détenus pour 100 places se cachent 34 prisons occupées à plus de 150 % (au 1er septembre 2011). Seuls dix pays (Slovénie, Espagne, Monténégro, Belgique, Croatie, Chypre, Hongrie, Italie, Grèce et Serbie) affichent un taux de surpopulation plus élevé que celui de la France – trois n’ont pas fourni les données.

La comparaison de la durée des peines révèle des pratiques hétérogènes. Les Pays-Bas et l’Allemagne, à titre d’exemple, comptent 44 % de détenus purgeant des peines inférieures à un an – contre 35 % en France et seulement 3,6 % en Belgique ou 6,5 % en Italie. Deux pays où le taux de détenus purgeant des peines de trois à dix ans est, en revanche, élevé (61 % en Belgique et 51 % en Italie), quand cette catégorie affiche 20 % aux Pays-Bas, 32 % en Allemagne… et 19,5 % en France. Également élevé est le pourcentage de détenus concernés par des peines de dix ans et plus : la France, avec 15 % de détenus condamnés à une longue peine, se trouve en 32e position, parmi les « mauvais élèves » (contre 9 % au Danemark, 7 % aux Pays-Bas et 4,7 % en Allemagne).

Les données relatives aux décès en milieu carcéral font état pour la France en 2010 de 178 décès, soit un taux de mortalité de 29 pour 10 000 détenus (29 pays présentant des chiffres moins élevés), similaire à celui affiché par l’Azerbaïdjan, la Lettonie ou la Lituanie. Bien en dessous du taux de la Belgique (47 pour 10 000), mais au-dessus de ceux de l’Allemagne (18), l’Italie ou les Pays-Bas (24). Ce taux remonte néanmoins à 43 pour 10 000, faisant reculer la France à la 37e position, si l’on comptabilise les 262 décès de personnes écrouées (c’est-à-dire pas seulement celles qui sont détenues). Le directeur de l’Administration pénitentiaire invoque « une erreur d’imputation » pour expliquer que ce dernier chiffre n’ait pas été retenu. L’erreur se répète avec le nombre des suicides, qui ne tient compte que des 95 actes ayant conduit à un décès en détention, classant la France au 6e rang des pays connaissant le plus fort taux de suicide en détention. Mais elle remonte au 3e rang (17,8 pour 10 000) dès lors que sont comptabilisés les 14 suicides commis en détention dont l’auteur est décédé hors détention (le plus souvent à l’hôpital). Si l’on ajoute les 12 suicides de personnes écrouées non détenues, ce taux atteint alors 19,8 pour 10 000.

SPACE I, Statistiques pénales annuelles du Conseil de l’Europe, Strasbourg, 3 mai 2013

(1) Le Royaume-Uni compte trois administrations distinctes (Angleterre et pays de Galles, Écosse, Irlande du Nord) ; l’Espagne, deux (la Catalogne dispose d’une administration spécifique) ; la Bosnie-et-Herzégovine deux (Bosnie-Herzégovine et République serbe de Bosnie).