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Centre de détention de Muret : le Procureur empêche un mariage, en toute illégalité

Depuis septembre 2013, Martin, détenu au centre de détention de Muret, et sa compagne Glwadys, essaient de se marier. En vain. Le Parquet s'oppose systématiquement à leur union, en dehors de tout cadre légal.

Martin est incarcéré au centre de détention de Muret, où il purge une peine de réclusion criminelle à perpétuité depuis 23 ans. Il est en couple avec Glwadys, depuis avril 2012. Le 23 Août 2013, ils se sont pacsés. Une première étape, car le couple souhaite renforcer cette union. Ils décident de se marier en septembre 2013. Le « mariage revêt un caractère très symbolique de nos engagements respectifs » écrit Glwadys au Procureur.

Le début d’une série d’embûches… Cette première demande étant restée sans réponse, Martin et Glwadys la renouvellent en février dernier. A nouveau sans réponse, ils ont la surprise d’apprendre le refus dans un jugement du tribunal de l’application des peines du 23 mars 2015, qui indique que Martin « avait un projet de mariage auquel s’est opposé le Procureur ». Le jugement porte même une appréciation qualitative sur leurs liens : « Depuis deux ans, il a noué une relation qu’il qualifie « d’amoureuse » avec une femme qu’il a rencontré par l’intermédiaire de petites annonces et qui lui rend régulièrement visite en détention ». Un avis subjectif plutôt inapproprié qui contraint Martin à justifier leur relation : « Je dépense chaque mois entre 400 à 500 euros rien que pour le téléphone avec ma femme. » La fréquence de leurs rencontres a même été invoquée par la direction de l’établissement pour leur refuser un parloir prolongé : « Vous bénéficiez depuis le début de l’année de 87 rendez-vous. Vous avez bénéficié par ailleurs d’un double parloir il y a peu. »

© Grégoire Korganow

Dans un courrier du 30 mars, Martin était effectivement informé par Parquet que le Procureur n’autorisait pas l’officier de l’état civil à se rendre au centre de détention pour y célébrer le mariage car « le juge de l’application des peines émet un avis très réservé compte tenu des faits » pour lesquels il est incarcéré. Une prérogative dont ne dispose pourtant pas le Procureur ! S’il conserve la possibilité de s’opposer au mariage, il doit démontrer l’existence d’une fraude ou d’une cause de nullité, dans le cadre d’une procédure strictement encadrée par la loi. Procédure qu’il n’a pas respectée dans le cas de Martin et Glwadys, agissant en dehors de tout cadre légal…

L’OIP a tenté d’entrer en contact avec le Procureur de la République de Toulouse par deux fois en mars et avril derniers, mais celui-ci n’a pas donné suite à la demande. Face à un tel abus de pouvoir, Martin et Glwadys attendent désormais que l’acte d’opposition soit valablement formé, pour en demander la mainlevée, comme la loi les y autorise.

Se marier en prison

Le droit de se marier est une liberté fondamentale garantie par la Constitution et par la Convention européenne des droits de l’homme. Sous réserve du respect des conditions posées par la loi (majorité, monogamie, consentement, absence de lien de parenté ou d’alliance), toute personne a le droit de se marier, y compris les personnes détenues.

Si en principe le mariage doit avoir lieu en mairie, il existe un régime aménagé pour les personnes dans l’impossibilité de se déplacer, par exemple, quand un des époux est hospitalisé ou lorsqu’il est détenu et qu’il ne peut pas bénéficier d’une permission de sortir pour la cérémonie. Dans cette hypothèse, le procureur de la République demande à l’officier d’état civil de se rendre au domicile ou au lieu de résidence des intéressés pour célébrer l’union

Si le procureur peut faire obstacle au mariage, il ne peut le faire qu’en respectant les conditions de forme et de fond visées par les articles 175 et suivants du Code civil. Une opposition à mariage ne peut être prononcée que si le mariage encourt la nullité, du fait du non respect des conditions légales précédemment rappelées. Cette décision, qui doit être écrite et motivée, doit être notifiée aux intéressés et peut être contestée devant le juge judiciaire.