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Évolution de la jurisprudence administrative concernant la prison : le législateur au pied du mur

Le Conseil d'Etat a tenu ce jour un point de presse portant sur l'évolution de sa jurisprudence concernant les droits des personnes détenues, opérée par une série de décisions récentes rendues dans des actions initiées ou accompagnées par l'Observatoire international des prisons (OIP).

A cette occasion, l’OIP salue les progrès accomplis dans le sens d’un plus grand respect de l’Etat de droit en prison, qu’il s’agisse de la reconnaissance du principe selon lequel la personne demeure titulaire de ses droits fondamentaux, à l’exception de la liberté d’aller et de venir, comme de l’extension du contrôle du juge administratif sur les décisions des autorités pénitentiaires.

Par ailleurs, la section française de l’Observatoire se félicite de l’affirmation par la Haute juridiction de la compétence exclusive du législateur pour fixer les restrictions pouvant être apportées à l’exercice des droits et libertés en milieu carcéral.

Elle observe à cet égard que le projet de loi pénitentiaire soumis au Parlement est très loin de satisfaire à cette exigence constitutionnelle. Le gouvernement a en effet pris le parti de présenter un texte ne comportant que de rares dispositions sur le statut juridique des détenus, essentiellement conçues pour servir de point d’appui à des dispositions réglementaires, auxquelles reviendrait le soin de déterminer effectivement le régime de fonctionnement des établissements pénitentiaires.

Cette conception de l’ordonnancement normatif en prison, comme la vision restrictive des droits garantis aux personnes détenues, apparaissent condamnées par les évolutions récentes de la jurisprudence du Conseil d’Etat. Sous peine d’encourir une censure pour inconstitutionnalité, le projet de réforme doit subir une refonte en profondeur, tant dans son architecture que dans sa substance. Les requérants pouvant désormais mettre en cause la constitutionnalité d’une loi à l’occasion d’un recours devant les juridictions, l’OIP contesterait toute disposition qui lui paraîtrait méconnaître le texte fondamental.

Enfin, les avancées de la jurisprudence, obtenues de haute lutte, ne doivent pas faire perdre de vue que les personnes incarcérées ne bénéficiant pas d’appui extérieur demeurent confrontées à des difficultés concrètes difficilement surmontables pour saisir le juge administratif et faire valoir devant lui une argumentation susceptible de prospérer. Le faible volume du contentieux pénitentiaire traduit de façon criante cet état de fait. Compte tenu du caractère éminemment restrictif des conditions posées pour l’octroi d’une mesure de référé, l’impossibilité concrète d’obtenir du juge la sauvegarde en urgence des droits fondamentaux demeure un point noir du droit interne.

Le projet de loi pénitentiaire ne comporte aucune disposition sur les recours accessibles aux personnes détenues. L’OIP souligne que les exigences résultant de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme appellent à l’inverse une extension et une intensification du contrôle du juge administratif, ainsi qu’un aménagement des voies de recours en vue de faciliter leur accès aux détenus. La Cour est d’ores-et-déjà saisie de requêtes mettant en cause l’absence d’effectivité des voies de recours ouvertes en droit interne contre des mesures pénitentiaires.

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