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Gel des crédits de la CNDS : les prisons hors contrôle

La section française de l’Observatoire international des prisons fait part de sa stupéfaction devant la neutralisation de la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS), opérée au travers du gel de ses crédits par les services financiers de Matignon. La CNDS a, depuis 2001, fait la preuve de l’efficacité de son intervention pour faire la lumière sur des interventions abusives des forces de sécurité, le nombre de dossiers dont elle est saisie est en constante augmentation. Dans ces conditions et compte tenu du faible enjeu financier, l’arbitrage opéré ne peut que revêtir une dimension de sanction politique.

S’agissant du champ carcéral, la CNDS se trouve, de facto, paralysée jusqu’à nouvel ordre. Aucun organe national indépendant n’exercera donc de contrôle effectif sur le fonctionnement des établissements pénitentiaires. Si elles demeureront théoriquement possibles, les saisines réalisées ne pourront être suivies d’aucune investigation hors région parisienne dans un délai raisonnable, ce qui ne pourra que compliquer l’établissement de la matérialité des faits litigieux. D’autre part, l’un des intérêts les plus précieux est de pouvoir mener ses investigations sur place et indépendamment des procédures judiciaires engagées le cas échéant. Les avis relatifs à ces saisines étant reportés sine die, la CNDS sera tenue juridiquement de s’aligner sur l’appréciation contenue dans les jugements rendus dans certaines des affaires examinées. Il convient de rappeler ici que la carence des autorités judiciaires dans leur mission de contrôle des prisons avait conduit, il y a plus de cinq ans, le Premier président de la Cour de cassation Guy Canivet à préconiser la mise en place d’un Contrôleur général indépendant. Ce gel est d’autant plus étonnant, que, dans sa réponse à une Etude sur les droits de l’homme dans la prison de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, le gouvernement a précisément prétendu vouloir faire de la CNDS l’organe ad hoc préconisé par le rapport de Guy Canivet, en lui confiant « les compétences et les moyens dont elle aurait besoin ».

L’OIP tient par ailleurs à souligner que cette mesure intervient dans un contexte où les atteintes aux droits fondamentaux des personnes détenues se multiplient, compte tenu des orientations sécuritaires définies par la Chancellerie. Une telle décision témoigne, à tout le moins, du mépris dans lequel le gouvernement tient l’exigence d’un contrôle de l’action des services de sécurité dans un Etat de droit.

L’OIP rappelle que la Cour européenne des droits de l’homme considère que « le droit interne doit offrir une certaine protection contre des atteintes arbitraires de la puissance publique. […] Or le danger d’arbitraire apparaît avec une netteté singulière là où le pouvoir exécutif s’exerce en secret » (CEDH, Kruslin c/France, 24 avril 1990).

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