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Inexécution de mesures urgentes à la prison de Bordeaux-Gradignan : l’administration rappelée à l’ordre

Un an plus tard, une ordonnance imposant à l’administration des mesures urgentes pour remédier aux conditions de détention indignes à la prison de Bordeaux-Gradignan n’est toujours pas pleinement exécutée. Saisi par l’Observatoire international des prisons (OIP), le tribunal administratif de Paris en prend acte et réitère deux injonctions.

Parce qu’elles concernent des atteintes aux droits fondamentaux, les injonctions prononcées par le juge des référés sont censées être exécutées sans délai. L’OIP s’est pourtant heurté à un manque de transparence volontaire de l’administration dans le suivi de l’exécution des neuf mesures urgentes ordonnées par le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux dans une ordonnance du 11 octobre 2022, qui constatait l’indignité des conditions de détention à la prison de Bordeaux-Gradignan. À la suite d’un premier recours en référé devant le tribunal administratif de Paris pour que l’administration daigne communiquer les mesures prises, l’OIP a constaté qu’elles n’étaient toujours pas pleinement exécutées plus d’un an après.

Devant cette inertie, l’association a saisi le juge d’un référé-réexamen pour contraindre le ministère de la Justice à exécuter totalement les injonctions ordonnées. Tout en estimant que les autorités ont bien mis en œuvre certaines injonctions – partiellement, au sens de l’OIP –, le juge constate explicitement l’inexécution d’une partie de l’ordonnance d’octobre 2022 et réitère deux de ses prescriptions dans une nouvelle ordonnance en date du 10 novembre 2023.

Le juge des référés considère ainsi que l’administration n’a pas satisfait à l’injonction qui lui imposait « de mettre fin à son interférence dans la mise en œuvre des prescriptions et décisions médicales concernant les détenus et s’agissant des extractions médicales, à tout retard ou annulation non justifiée par des motifs de sécurité » – pour rappel, sur les cinq premiers mois de l’année 2022, 440 extractions médicales avaient été annulées sur les 817 programmées, soit un taux de 54% d’annulation. L’administration s’était d’abord contentée de lister les refus d’extraction, puis après le dépôt de la requête de l’OIP, elle a diffusé une note de service afin de modifier la procédure des rendez-vous médicaux. Mais elle n’a donné aucun élément sur les modalités de communication aux intéressés des motifs de sécurité éventuellement opposés à une extraction médicale ou à l’origine d’un retard. Le juge enjoint donc à l’administration d’intégrer dans sa nouvelle procédure un système permettant d’enregistrer, dès le moment où il apparaît à l’administration, le motif de sécurité qui retarderait ou ferait obstacle à une extraction médicale.

Il revenait également à l’administration pénitentiaire « de procéder au renforcement des moyens matériels et humains de l’équipe médicale, notamment (…) pour garantir la présence à tout moment d’une personne compétente pour assurer les premiers soins, y compris la nuit et le week-end ainsi qu’une présence d’un médecin psychiatre plus effective ». Le ministère n’a pu produire qu’un courriel adressé il y a plus un an à l’agence régionale de santé (ARS), qu’il interrogeait sur ses possibilités de renfort. Constatant l’absence d’efforts suffisants, le juge des référés enjoint donc à nouveau le ministre de la Justice à saisir l’ARS pour renforcer la présence médicale au sein de la prison de Bordeaux-Gradignan.

Une nouvelle fois, l’OIP déplore les délais excessifs dans lesquels l’administration exécute les décisions de justice censées remédier en urgence à des conditions de détention indignes, et son attitude dilatoire vis-à-vis des associations requérantes.

Contact presse : Sophie Larouzée-Deschamps · 07 60 49 19 96 · 01 44 52 88 00 · sophie.larouzeedeschamps@oip.org