Free cookie consent management tool by TermsFeed

Maison d’arrêt de Gradignan : Pas de promenades ni d’activités depuis plus trois ans pour un homme vulnérable

Un homme handicapé, détenu à la maison d'arrêt de Gradignan, n'est pas sorti en promenade depuis juin 2008 par crainte de subir de nouvelles violences de la part d'autres personnes détenues, et passe depuis lors ses journées entières enfermé dans sa cellule. Le personnel pénitentiaire local se dit démuni quant à ses conditions de vie, tandis que l'administration pénitentiaire ne donne pas suite à sa demande de transfert dans un autre établissement.

M. V. est détenu à la maison d’arrêt de Gradignan depuis le mois de mars 2008. Alors placé dans une cellule de six lits, avec cinq autres personnes, il affirme avoir subi, entre mars et juin 2008, de graves agressions de la part de certains de ses co-détenus, qui avaient eu connaissance des motifs de son incarcération. Une plainte a été déposée pour ces faits au mois d’août 2010 et est toujours en cours d’instruction. Bien qu’ayant été depuis lors changé de cellule et placé en cellule double, il persiste à éviter autant que possible les contacts avec les autres et n’est plus sorti en cour de promenade depuis trois ans, craignant d’y subir d’autres agressions et humiliations.

Âgé de 47 ans, reconnu travailleur handicapé, il souffre de troubles de la sensibilité de tout l’hémicorps droit entraînant des douleurs chroniques et doit être muni de cannes ou d’un fauteuil pour se déplacer. Dans ce contexte, M. V. ne peut accéder ni à un travail ni à des activités et il vit, selon ses dires, 24h sur 24 en cellule. Monsieur V. est pris en charge par le service médical de l’établissement et bénéficie d’un suivi psychologique.

Contacté par téléphone par l’OIP le 12 juillet 2011, un personnel pénitentiaire avoue son impuissance face à cette situation. Mettant en cause le fort taux de surpopulation dans l’établissement (163 % au 1er juillet 2011), ce personnel précise que l’absence de promenades concerne également d’autres détenus, et que les travaux qui doivent démarrer dans l’établissement « ne vont pas arranger » la situation. En concluant que « la grabatérisation, ça va vite en prison… »

Définitivement condamné depuis le mois d’avril 2011, M. V. a donc demandé son transfert vers le centre de détention de Bédenac, qu’il estime mieux adapté à sa situation et qui le rapprocherait de sa famille. Cette demande est à ce jour restée sans suite. Un courrier de l’OIP, daté du 25 juillet 2011, interpellant la Direction interrégionale des services pénitentiaires de Bordeaux (DISP) sur la mise en œuvre de cette demande de transfert, est lui aussi resté sans réponse. Contacté par téléphone le 16 septembre, le chef du département de la sécurité et de la détention de la DISP a informé l’OIP qu’une demande avait été transmise au Centre national d’évaluation (CNE) de Fresnes afin que M. V. puisse intégrer une prochaine session d’évaluation en vue de déterminer quelle sera, par la suite, l’affectation la mieux adaptée. Aucune réponse du CNE n’a été reçue à ce jour.

L’OIP rappelle :

– l’article 22 de la loi pénitentiaire n°2009-1436 du 24 novembre 2009 prévoyant que « l’administration pénitentiaire garantit à toute personne détenue le respect de sa dignité et de ses droits » et que l’exercice de ceux-ci ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles résultant des contraintes inhérentes à la détention, du maintien de la sécurité et du bon ordre des établissements, de la prévention de la récidive et de la protection de l’intérêt des victimes. »

– l’article 33 de la loi pénitentiaire n°2009-1436 du 24 novembre 2009 prescrivant que « le chef d’établissement s’assure que les mesures appropriées sont prises afin de garantir l’égalité de traitement en matière d’accès et de maintien à l’activité professionnelle en faveur des personnes handicapées détenues. »

– que la Commission nationale consultative des droits de l’homme, avait attiré l’attention sur les « inégalités considérables entre condamnés qui naissent des conditions dans lesquelles la peine est réellement subie » ; et sur les « situations particulièrement difficiles liées à la nature des infractions commises, à l’âge, à l’état de santé (…) qui constituent autant de facteurs aggravants de la sanction pénale et d’inégalités cachées ». Commission nationale consultative des droits de l’homme, Les droits de l’homme dans la prison, volume 1, 2004

Soutenez la diffusion du guide du prisonnier