Près d'ici, il existe une ville...
Dans cette ville surpeuplée où le nombre d’habitants augmente inexorablement mois après mois, un numéro est associé au nom de tout nouvel arrivant.
Ici, les déplacements sont limités et encadrés. Tout ce qui n’est pas explicitement autorisé est interdit. Ici, le maire de la ville est aussi le chef de la police et le président du tribunal. Et bien souvent, les procès se déroulent sans avocats.
Dans cette ville, la prise en charge sanitaire est déficiente. Aucune permanence de soins n’est organisée la nuit ou le week-end. Il n’est pas rare de devoir patienter de nombreux mois avant de pouvoir rencontrer un dentiste ou un psychiatre. Pourtant, la population souffre plus qu’ailleurs de pathologies somatiques et de troubles psychiques. Ici, la transgression du secret médical est fréquente.
Dans cette ville, un habitant sur 4 est dans une situation d’illettrisme ou a d’importantes difficultés de lecture. Pourtant, l’écrit demeure le mode de communication de référence. Ici, l’école n’est ouverte que quelques heures par semaine. Un habitant sur deux n’a aucun diplôme.
Dans cette ville, le taux de chômage atteint les 70%. Les personnes qui travaillent sont pour la plus grande majorité rémunérées entre 20 et 45% du SMIC. Elles ne bénéficient pas d’indemnités en cas de suspension de l’activité ou lorsqu’elles sont malades ou victimes d’un accident.
Près d’un habitant sur 5 vit avec moins de 60€ par mois, et les minima sociaux n’existent pas.
Dans cette ville, les grèves, les mouvements de protestation, même pacifiques, sont interdits. Une simple pétition est immédiatement sanctionnée.
Ici, les rencontres familiales et amicales sont soumises à autorisation, limitées dans le temps et surveillées.
Le téléphone coûte jusqu’à 11 fois plus cher qu’ailleurs, pour seulement 20 minutes d’appel par jour. Les conversations sont généralement écoutées. Les autorités ouvrent, lisent et peuvent retenir les courriers.
Dans cette ville, le problème de surpopulation est alarmant. Les logements où sont entassés les habitants sont vétustes, souvent insalubres et ne disposent pas toujours de l’eau chaude. On y reste 22h/24, à 2 ou 3 dans une pièce de moins de 9m².
Cette promiscuité dégradante engendre régulièrement des comportements de violence. Contre autrui, ou retournés contre soi. Un habitant se donne la mort tous les 3 jours. Près de 10 fois plus qu’ailleurs.
Cette ville n’appartient pas au passé. Elle n’est pas non plus tirée d’un ouvrage de science-fiction. Ce quotidien tel qu’il vient d’être décrit est une réalité. La réalité pour les femmes et les hommes, détenus dans les établissements pénitentiaires. En France. Aujourd’hui.