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Une personne détenue sanctionnée pour avoir tenté de se suicider : l’inhumanité disciplinaire en prison

Incarcéré au centre pénitentiaire de La Santé, Monsieur B. a été sanctionné par quatorze jours de cellule disciplinaire pour, notamment, s’être jeté dans le vide depuis une coursive. Soulignant que cette sanction n’avait pas tenu compte de ses intentions suicidaires, le tribunal administratif de Paris a prononcé l’annulation de la sanction par un jugement rendu le 2 février.

Traiter la tentative de suicide de Monsieur B. comme une faute était « une erreur d’appréciation », a jugé le tribunal administratif de Paris dans sa décision du 2 février 2024. Et que dire de la sanction prononcée contre lui ? En l’envoyant pour deux semaines au quartier disciplinaire, la commission de discipline l’a soumis à des conditions dans lesquelles le risque suicidaire est quinze fois plus élevé qu’en détention ordinaire.

Le 22 février 2022, au centre pénitentiaire de La Santé, Monsieur B. s’est « jeté dans le vide par-dessus la rambarde d’une coursive en étage, ce qui l’a fait atterrir dans le filet de protection de la rue haute », retrace le tribunal administratif. Il revenait alors de l’unité sanitaire où il avait consulté un psychiatre, et suivait un traitement destiné à apaiser ses angoisses. Devant la commission de discipline, le 7 mars, il a répété qu’il « voulai[t] [s]e suicider » et « [s]e casser les dents au sol ».

Cela n’a pas empêché l’administration de sanctionner Monsieur B. – en toute connaissance de cause : « Si la délibération de la commission de discipline n’a pas tenu compte de l’intention qui était celle de l’intéressé lorsqu’il s’est jeté dans le vide, la présidente de la commission a tout de même décidé, cinq minutes après la notification de la délibération à l’intéressé, de le placer aussitôt en cellule de protection d’urgence, avant l’exécution de la décision disciplinaire prononcée à son encontre, en raison du “risque auto-agressif” qu’il présentait, qualifié dans la décision de placement de “grave et immédiat” », relève le tribunal administratif.

La sanction prononcée à l’encontre de Monsieur B. se fondait également sur un autre incident : le 2 mars 2022, il aurait « bousculé un surveillant » et « fait obstacle à la fermeture » de la porte de sa cellule. Des faits mal établis, d’après le tribunal administratif, qui considère que seul est avéré le blocage de sa porte par Monsieur B. pendant quelques instants avec son pied. « Au regard de ce seul fait, la sanction de mise en cellule disciplinaire, qui constitue la plus lourde de l’échelle des sanctions, et de surcroît pour une durée de quatorze jours, […] présentait un caractère disproportionné », souligne-t-il.

Enquête à charge, non-prise en compte d’éléments de contexte et de personnalité, envoi systématique au quartier disciplinaire, ineffectivité du recours administratif préalable obligatoire : loin d’être exceptionnelles, ces dérives sont caractéristiques de l’application de la discipline en prison, comme en témoigne un récent rapport d’enquête de l’Observatoire international des prison (OIP) . Ferme ou avec sursis, le quartier disciplinaire représente près de 70% des sanctions prononcées en 2022 – malgré des effets dévastateurs sur les personnes et les Règles pénitentiaires européennes, qui prescrivent que « la mise à l’isolement ne peut être imposée à titre de sanction que dans des cas exceptionnels et pour une période définie et aussi courte que possible ». Conformément aux recommandations des Nations unies, l’OIP réclame la suppression de cette sanction aussi inhumaine que contre-productive.

Contact presse : Sophie Larouzée-Deschamps · 07 60 49 19 96 ·  sophie.larouzeedeschamps@oip.org

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