L’objectif d’insertion ou de réinsertion des personnes détenues est affirmé par la loi mais peine à se concrétiser en pratique.
La détention renforce les facteurs de précarité sociale
Outre que l’incarcération favorise la rupture des liens sociaux et familiaux, les troubles ou fragilités psychiques et les problèmes d’addiction – qui concernent 8 détenus sur 10 – sont souvent aggravés par les conditions de détention : isolement affectif, promiscuité, hygiène défaillante, inactivité, violence et tensions, etc.
Sécurité vs. insertion
En prison, l’objectif de sécurité et de gestion des flux prend le pas sur l’objectif d’insertion. Cela se retrouve en particulier dans la faiblesse des moyens qui lui sont alloués. Dans des prisons surpeuplées, les conseillers d’insertion et de probation sont surchargés et ne sont pas en mesure de suivre l’ensemble des personnes détenues dans leurs projets. Un conseiller peut ainsi parfois être amené à suivre jusqu’à 120 personnes si bien qu’en pratique, il n’est pas rare qu’un détenu sorte de détention sans avoir pu rencontrer son conseiller. S’y ajoutent la faiblesse des moyens consacrés à la formation et aux activités (voir question sur les activités) et des contraintes logistiques et organisationnelles qui tendent à renforcer la déresponsabilisation et la désocialisation des personnes détenues. L’interdiction d’Internet par exemple, indispensable pour toute démarche de recherche d’emploi, prive les prisonniers d’un outil précieux d’insertion et d’autonomisation.
Détention et droit commun
La prise en charge des personnes détenues par les services de droit commun est souvent dysfonctionnelle ou insuffisante. Ainsi, par exemple, seulement 67 postes équivalents temps-plein (assurés par 153 conseillers pôle emploi) sont consacrés aux publics détenus, répartis dans 187 établissements pénitentiaires. Moins d’un quart des sortants de prison (16 000 environ) voit un conseiller en entretien avant leur libération. Encore moins parviennent à s’inscrire comme demandeur d’emploi avant de sortir (environ 10 000).
Aménagements de peine
Les aménagements de peine comme la libération conditionnelle, qui permettent un retour progressif et accompagné des personnes détenues à la vie extérieure, sont largement sous-utilisés. Ainsi, 80% des prisonniers sortent sans accompagnement (en « sortie sèche »), alors même que des études ont montré que les risques de récidive étaient, pour eux, beaucoup plus élevés que si leur peine était aménagée (63% sont recondamnés dans les cinq ans, contre 45% autrement).
Une fois dehors
Les sortants de prison sont confrontés à une série d’obstacles et de difficultés qui compromettent encore leurs chances de réinsertion : isolement social et familial, difficultés d’accès à un logement (16% des sortants n’ont qu’une solution précaire d’hébergement, 6% n’en ont aucune), casse-tête administratif pour régler leur situation, endettement (amendes pénales, dommages et intérêts), éloignement du marché de l’emploi aggravé par un trou dans le CV et un casier judiciaire chargé, etc.