Les soins psychiques
« On assiste à un déplacement de l’hôpital psychiatrique vers la prison » s’alarmait déjà il y a dix ans le Comité consultation national d’éthique (CCNE). Plus de 20% des personnes incarcérées sont atteintes de troubles psychotiques dont 7,3% de schizophrénie et 7% de paranoïa et autres psychoses hallucinatoires chroniques. Au total, huit hommes détenus sur dix présentent au moins un trouble psychiatrique, la grande majorité en cumulant plusieurs parmi lesquels la dépression (40%), l’anxiété généralisée (33%) ou la névrose traumatique (20%). Le taux de pathologies psychiatriques est 20 fois plus élevé en prison que dans la population générale. Or, la prison est un milieu pathogène. Et « l’incarcération de personnes atteintes de maladies mentales graves ne peut qu’entraîner une perte de repères et de sens : perte du sens même de la peine et de l’emprisonnement » mais aussi « perte du sens même du soin et du rôle de soignant » comme le relève le CCNE. Pourtant, loin de remédier à ce phénomène par une réflexion sur les failles de la psychiatrie générale en milieu libre, les pouvoirs publics mettent en place des dispositifs judiciaro-sanitaires qui avalisent la présence de ces publics en prison.
Tout comme les soins somatiques, les soins psychiques en détention ne relèvent pas de l’administration pénitentiaire. Ils ont été confiés au service public hospitalier dès 1986, antérieurement aux soins somatiques (1994). Aujourd’hui, le suivi médical des affections somatiques comme le suivi psychiatrique des personnes incarcérées doit être organisé de façon à assurer « aux détenus une qualité et une continuité de soins équivalents à ceux de la population générale » (loi du 18 janvier 1994 relative à la santé publique et à la protection sociale).
Le Code de la santé publique prévoit l’existence d’un ou plusieurs « secteurs de psychiatrie en milieu pénitentiaire » (SPMP), dans chaque région pénitentiaire (article D.372 du Code de procédure pénale, articles R.3221-1 et R.3221-5 du Code de la santé publique). Chaque SPMP est rattaché à un établissement public hospitalier. Il met en œuvre des actions de prévention, de diagnostic et de soins à destination des personnes détenues. Il comprend notamment un « service médico-psychologique régional » (SMPR) implanté au sein d’un établissement pénitentiaire. Toutefois, seuls 26 établissements disposent d’un SMPR (arrêté NOR : SPSH9501492A du 10 mai 1995 fixant la liste des établissements pénitentiaires sièges de services médico-psychologiques régionaux et des établissements pénitentiaires relevant du secteur de psychiatrie en milieu pénitentiaire de chaque service médico-psychologique régional).
Dans les prisons non dotées d’un SMPR, ce sont les secteurs de psychiatrie générale qui sont chargés d’organiser les soins au sein des unités sanitaires en milieu pénitentiaire (USMP). Le dispositif de soins relève de l’hôpital avec lequel l’établissement pénitentiaire a passé une convention et assure les soins courants dans les établissements pénitentiaires relevant de sa zone géographique. Dans les prisons accueillant des mineurs ou des jeunes majeurs (moins de 21 ans), les soins sont assurés par le secteur de psychiatrie infanto-juvénile.
Lorsque l’hôpital de rattachement ne dispose pas de secteur de psychiatrie, le directeur de l’Agence régionale de santé (ARS) désigne un autre établissement de santé, situé à proximité, pour assurer ces soins (article D.368 du Code de procédure pénale et article R.6111-28 du Code de la santé publique).
Depuis 2012, les personnels médicaux et paramédicaux intervenant auprès des personnes détenues sont regroupés sous l’appellation « unité sanitaire en milieu pénitentiaire » (USMP). Sont dispensés au sein des unités sanitaires des soins tant somatiques que psychiatriques (le cas échéant par le SMPR lorsque l’établissement pénitentiaire en est doté). Dès lors, le mode de saisine d’un psychiatre ou d’un psychologue est en principe identique à celui de l’unité sanitaire (voir « La médecine générale – Comment faire appel au médecin ? »).
Les médecins intervenant au Service médico-psychologique régional (SMPR) assurent « des consultations médicales à la suite de demandes formulées par la personne détenue, ou, le cas échéant, par le personnel pénitentiaire ou par toute autre personne agissant dans l’intérêt de la personne » (article R.57-8-1 du Code de procédure pénale).
Dans les premiers jours de son incarcération, toute personne détenue « venant de l’état de liberté » doit bénéficier d’une consultation avec un médecin de l’unité sanitaire ainsi que d’un entretien avec un membre du SMPR dans les établissements qui en sont dotés (Guide méthodologique relative à la prise en charge des personnes placées sous main de justice, 2019). Lors de cet entretien, les prestations psychiatriques offertes au sein de l’établissement pénitentiaire doivent lui être présentées. En fonction de ses besoins et/ou à sa demande, une consultation avec un psychiatre ou psychologue lui sera proposée.
Une demande de soins peut également être effectuée ultérieurement par le détenu, généralement en déposant un courrier dans les boîtes aux lettres spécialement prévues pour le personnel soignant (lorsque l’établissement pénitentiaire en est doté). Une date de rendez-vous sera alors en principe communiquée au détenu. En cas d’urgence, la demande de consultation peut être réalisée oralement par le détenu et transmise à l’unité sanitaire ou au SMPR par un personnel pénitentiaire.
Le directeur de l’établissement pénitentiaire, le médecin généraliste de l’établissement, l’autorité judiciaire compétente dans le cas d’un prévenu ou toute personne connaissant le détenu peuvent également effectuer un signalement à l’attention des soignants. Les proches du détenu peuvent contacter l’USMP ou le SMPR par téléphone afin de transmettre toute information utile, mais ne pourront pas obtenir d’information de la part du personnel médical.
Créés en 1986, les services médico-psychologiques régionaux (SMPR) sont le pivot du secteur de psychiatrie en milieu pénitentiaire (article R.3121-5 du Code de la santé publique). Il s’agit d’un service hospitalier implanté dans des locaux de certaines prisons dont la construction, l’aménagement et l’entretien sont à la charge de l’administration pénitentiaire (arrêté du 14 décembre 1986 relatif au règlement intérieur type fixant organisation des services médico-psychologiques régionaux relevant des secteurs de psychiatrie en milieu pénitentiaire).
Le service est placé sous l’autorité d’un psychiatre hospitalier assisté d’une équipe pluridisciplinaire (psychologues, infirmiers, travailleurs sociaux). Il se structure en plusieurs unités et assure différentes missions dont :
- le dépistage systématique des troubles psychiques (notamment au moyen d’un entretien d’accueil avec les entrants) ;
- les soins médico-psychologiques courants à l’attention de la population détenue dans l’établissement pénitentiaire où le SMPR est implanté (entretiens individuels, ateliers thérapeutiques, traitements psychiatriques, préparation à un suivi psychologique à l’extérieur, etc.) ;
- la prévention et la prise en charge médicale des addictions (le cas échéant via un centre de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA));
- la coordination des prestations de santé mentale et des dispositifs de soins psychiatriques dans les prisons de son secteur (notamment en vue d’un transfert vers un établissement doté d’un SMPR).
Sur l’ensemble du territoire, les SMPR sont au nombre de 26. Ils sont majoritairement situés dans une maison d’arrêt, mais couvrent des secteurs bien plus étendus regroupant parfois plus de 5 000 détenus. De nombreux établissements pour peine (centres de détention et maisons centrales) ne disposent pour leur part que de psychiatres et psychologues vacataires, quand bien même de nombreux détenus condamnés à de longues peines nécessiteraient un suivi psychologique très régulier. Les maisons d’arrêt dotées d’un SMPR sont celles de : Amiens, Bois-d’Arcy, Bordeaux-Gradignan, Caen, Châlons-en-Champagne, Dijon, Fleury-Mérogis, Grenoble, Lille, Lyon, Nice, Paris-la-Santé, Poitiers, Rennes, Rouen, Strasbourg, Toulouse. Et les centres pénitentiaires dotés d’un SMPR sont ceux de : Basse-Terre, Châteauroux, Fort-de-France, Fresnes, La Plaine-des-Galets, Marseille-Les Baumettes, Metz-Queuleu, Nantes, Perpignan (arrêté NOR : SPSH9501492A du 10 mai 1995 fixant la liste des établissements pénitentiaires sièges de services médico-psychologiques régionaux et des établissements pénitentiaires relevant du secteur de psychiatrie en milieu pénitentiaire de chaque service médico-psychologique régional).
Chaque région dispose d’au moins un établissement pénitentiaire doté d’un SMPR. Cette répartition permet en théorie à toute la population pénitentiaire une prise en charge psychiatrique de niveau 2 en hospitalisation de jour (voir « La médecine générale – Comment s’organisent les soins en prison ? »). En effet, l’admission en hospitalisation de jour peut être prononcée pour toute personne détenue relevant de la zone géographique de son ressort (Guide méthodologique relatif à la prise en charge des personnes placées sous main de justice, 2019).
La plupart des SMPR disposent d’une unité permettant une hospitalisation de jour en détention. Elle se déroule dans une aile spécifique à l’intérieur de l’établissement pénitentiaire, qui doit en principe comporter en majorité des cellules individuelles et seulement quelques cellules doubles. Les personnes y sont hébergées à temps complet, mais leur prise en charge médicale n’est assurée qu’en journée.
Elle comporte en principe des entretiens réguliers avec les psychiatres, les psychologues et les infirmiers de l’unité de soins, ainsi que des propositions de participation à des activités thérapeutiques de groupe (atelier dessin, théâtre, discussion, etc.). Toute personne détenue souffrant d’importants troubles psychiques ne compromettant ni l’ordre ni la sécurité peut se voir proposer un placement dans cette unité pour y recevoir des soins intensifs.
L’admission en hospitalisation de jour ne peut se faire qu’avec le consentement du patient. Elle est prononcée par le directeur de l’hôpital de rattachement, sur proposition du psychiatre responsable du service. Lorsque la personne est incarcérée dans un établissement dépourvu de SMPR, l’admission est prononcée sur demande d’ « un médecin intervenant dans l’établissement d’origine » et « après accord d’un psychiatre du SMPR » (arrêté du 14 décembre 1986 relatif au règlement intérieur type fixant organisation des services médico-psychologiques régionaux relevant des secteurs de psychiatrie en milieu pénitentiaire). Le transfèrement est alors « ordonné par l’autorité pénitentiaire compétente ». En outre, s’il s’agit d’un prévenu, « l’accord de l’autorité judiciaire est préalablement requis ». Le transfèrement doit intervenir « dans les délais les plus brefs ».
Le placement en SMPR est qualifié « d’hospitalisation libre » (bien que les portes des cellules des malades soient fermées et que seuls les surveillants en détiennent les clefs) parce qu’il s’agit d’une hospitalisation librement consentie. Hormis les activités spécifiques qui peuvent leur être proposées, « les détenus pris en charge par le SMPR sont soumis au régime de détention ordinaire » (en matière de visites, correspondance, etc.). Néanmoins, le placement en quartier disciplinaire n’est rendu possible qu’après avis du médecin quant à la possibilité d’interrompre l’hospitalisation (Guide méthodologique relatif à la prise en charge des personnes placées sous main de justice, 2019).
Dès que l’état de santé de la personne ne nécessite plus son maintien dans l’unité de soins du SMPR, le directeur de l’hôpital de rattachement informe l’administration pénitentiaire qui organise son retour en détention ordinaire et, le cas échéant, son transfert dans les meilleurs délais vers « l’établissement d’origine », ou « toute autre destination pénale », après avis du juge de l’application des peines, ou accord préalable du magistrat instructeur s’il s’agit d’un prévenu.
Enfin, l’hospitalisation de jour en psychiatrie implique une permanence des soins en dehors des heures d’ouverture de l’unité sanitaire, y compris les dimanches et jours fériés (article D.6124-304 du Code de la santé publique).
La loi du 9 septembre 2002 a créé de nouvelles structures, les « unités hospitalières spécialement aménagées » (UHSA), implantées dans des centres hospitaliers et sécurisées par l’administration pénitentiaire. Elles doivent permettre une hospitalisation à temps complet, volontaire ou sous contrainte, des personnes détenues atteintes de troubles mentaux (article L.3214-1 du Code de la santé publique). Sont également concernées les personnes hébergées dans un établissement pénitentiaire à temps partiel (semi-liberté, placement extérieur sous surveillance, permission de sortir).
Le programme de construction des UHSA, débuté en 2010, inclut 17 unités pour une capacité totale de 705 places, réparties en deux tranches. La première tranche a été achevée en mars 2018 avec l’ouverture de l’UHSA de Marseille (arrêté NOR : SASH1019961A du 20 juillet 2010 relatif au ressort territorial des unités spécialement aménagées destinées à l’accueil des personnes incarcérées souffrant de troubles mentaux). Fin 2019, 9 UHSA étaient ainsi en activité : à Lyon, Nancy, Toulouse,Villejuif, Lille, Rennes, Orléans, Bordeaux et Marseille).
La vocation affichée des UHSA est d’offrir aux personnes détenues souffrant de troubles mentaux « un accès équivalent à celui des autres patients aux soins de qualité nécessités par [leur] état de santé » (circulaire NOR: ETSH1107932C du 18 mars 2011 relative à l’ouverture et au fonctionnement des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA)). De fait, ces structures représentent une amélioration de l’offre de soins pour les personnes détenues, en permettant notamment des hospitalisations complètes libres (c’est-à-dire volontaires), et en limitant l’usage inapproprié des moyens de contrainte utilisés à l’égard des personnes détenues dans les services de psychiatrie classiques.
Depuis la loi du 9 septembre 2002, toute hospitalisation psychiatrique d’une personne détenue, qu’elle soit consentie ou sous contrainte, doit désormais se dérouler dans une UHSA ou, lorsque la personne présente une particulière dangerosité, dans une unité pour malades difficiles (UMD), ce qui n’est pas encore effectif du fait de l’implantation progressive de ces structures.
L’hospitalisation en UHSA avec le consentement du détenu est demandée par un médecin intervenant dans l’établissement pénitentiaire et décidée par le directeur de l’UHSA après avis d’un médecin de cette même unité (article R.3214-1 du Code de la santé publique). Le transport du patient de l’établissement pénitentiaire est assuré par le personnel pénitentiaire, le personnel soignant pouvant également intervenir si l’état de santé de la personne le nécessite (article R.3214-21 du Code de la santé publique).
L’hospitalisation sans le consentement de la personne intervient pour sa part sur arrêté du préfet du département dans lequel se situe l’UHSA, au vu d’un certificat médical circonstancié établi par un médecin intervenant dans l’établissement pénitentiaire (article L.3214-3 du Code de la santé publique). La charge du transport du détenu incombe alors à l’établissement de santé siège de l’UHSA, qui l’organise avec le personnel pénitentiaire de l’UHSA chargé de l’escorte de la personne détenue (circulaire NOR: ETSH1107932C du 18 mars 2011 relative à l’ouverture et au fonctionnement des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA)).
Lorsque l’hospitalisation prend fin, le médecin de l’UHSA informe au moins 48 heures à l’avance des prévisions de sortie l’administration pénitentiaire, qui organise le retour en établissement pénitentiaire. Il s’agit généralement de l’établissement pénitentiaire d’origine ou éventuellement, sur demande du psychiatre et avec l’accord du patient, de l’établissement pénitentiaire siège de SMPR. La levée d’une hospitalisation sans consentement est cependant décidée par le préfet sur avis du psychiatre de l’UHSA (circulaire NOR: ETSH1107932C du 18 mars 2011 relative à l’ouverture et au fonctionnement des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA)).
Lorsqu’il arrive que l’UHSA territorialement compétente n’est pas en mesure de prendre en charge une personne détenue, faute de place, ou bien lorsque deux personnes détenues ne doivent pas être hospitalisées dans la même unité pour des raisons de sécurité, une place est recherchée au sein de l’UHSA la plus proche (article R.3214-2 du Code de la santé publique).
Les UHSA sont des unités hospitalières régies par le Code de la santé publique, et les soins sont en principe dispensés aux personnes détenues dans les mêmes conditions que dans les autres unités d’hospitalisation.
Chaque UHSA a sa propre organisation, divisée en différentes unités permettant une liberté de circulation plus ou moins grande. La « garde des personnes détenues hospitalisées » en UHSA incombe à l’administration pénitentiaire : les personnels pénitentiaires assurent la « surveillance de l’enceinte et des locaux », ainsi que du « contrôle des accès » à l’unité (article R.3214-8 du Code de la santé publique). Les surveillants doivent en principe assurer leur mission de garde dans le respect de la confidentialité médicale et n’ont en principe pas accès aux salles de soins et aux chambres, excepté pour assurer des « fouilles de locaux » et un « contrôle des équipements et aménagements », programmés régulièrement de manière aléatoire. Toute fouille générale des locaux doit néanmoins être « décidée avec l’accord du directeur de l’établissement de santé » et être en principe réalisée en sa présence, ainsi que celle du médecin responsable de l’unité (article R.3214-12 du Code de la santé publique).
Un dispositif de vidéosurveillance est mis en œuvre pour la protection des abords et des locaux de l’UHSA, à l’exception des chambres et des salles de soins. Les personnels pénitentiaires peuvent toutefois intervenir ou assurer une surveillance ponctuelle dans les chambres ou espaces de soins à la « demande du personnel hospitalier lorsque la sécurité des personnes ou des biens est compromise ». Ils peuvent également procéder à des fouilles individuelles « sans faire obstacle au bon déroulement des soins ». En dehors de ces situations, le personnel hospitalier est en principe chargé de la sécurité dans les zones de soins (articles R.3214-9 au R.3214-12 du Code de la santé publique).
Le personnel soignant doit porter « une attention permanente » à la « présence effective » des personnes détenues dans l’UHSA et signaler immédiatement « toute absence irrégulière ». Il a également l’obligation de signaler « tout manquement grave au règlement intérieur » au responsable de l’établissement de santé, qui « alerte le responsable pénitentiaire de l’UHSA » (article R.3214-13 du Code de la santé publique et circulaire NOR: ETSH1107932C du 18 mars 2011 relative à l’ouverture et au fonctionnement des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA)).
Les décisions de l’autorité judiciaire, notamment en matière d’isolement, de séparation de certains détenus ou d’interdiction temporaire de communiquer sont applicables au sein de l’UHSA. Les personnes hospitalisées demeurent également « soumises au régime disciplinaire des établissements pénitentiaires lorsqu’elles se trouvent sous la surveillance exclusive du personnel pénitentiaire ». Cependant aucune sanction disciplinaire ne peut être prononcée pendant l’hospitalisation ; ce n’est qu’à son retour en détention que le détenu passera en commission de discipline, à condition que celle-ci puisse se tenir sans dépasser le délai « d’un mois après les faits » (article R.3214-17 du Code de la santé publique et circulaire NOR: ETSH1107932C du 18 mars 2011 relative à l’ouverture et au fonctionnement des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA)).
Les liens avec l’extérieur sont soumis aux mêmes règles qu’en détention. Les patients peuvent recevoir des visites des personnes titulaires d’un permis de visite. Celles-ci se déroulent aux horaires fixés par convention dans un parloir placé sous la surveillance du personnel pénitentiaire, « qui a la possibilité d’écouter les conversations », excepté lorsque le visiteur est un avocat ou un visiteur de prison. Pour des raisons médicales, le parloir peut se dérouler en présence d’un soignant. La correspondance et l’accès au téléphone sont soumis aux mêmes règles qu’en détention. Les personnels de l’UHSA ne sont pas autorisés à communiquer aux membres de la famille, aux proches et aux visiteurs les dates d’entrée et de sortie de la personne détenue, ni les dates et heures des examens réalisés hors de l’unité. Toutefois, « sous réserve du respect des règles de sécurité », le médecin « peut communiquer des informations sur l’état de santé du patient détenu placé en UHSA à sa famille ou à ses proches » (articles R.3214-18 et R.3214-19 du Code de la santé publique et circulaire NOR: ETSH1107932C du 18 mars 2011 relative à l’ouverture et au fonctionnement des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA)).
Les détenus hospitalisés sont autorisés à conserver dans leur chambre des effets personnels ainsi que des produits d’hygiène, mais leur volume ne doit pas dépasser la contenance d’un bagage à main. Ces objets font l’objet d’un contrôle du personnel pénitentiaire et du personnel hospitalier, qui peuvent interdire ceux présentant un caractère dangereux ou non autorisés par la réglementation. Le linge de toilette est mis à disposition, selon les UHSA, par le service hospitalier ou l’administration pénitentiaire. Le papier toilette est systématiquement fourni, mais pas toujours les produits d’hygiène, excepté pour les patients sans ressource. Durant l’hospitalisation à l’UHSA, le compte nominatif du détenu continue d’être géré par la prison et il peut acheter des produits sur une liste de cantine propre à l’UHSA, le personnel pénitentiaire étant chargé de la livraison des produits. L’accès à la télévision répond à la réglementation de l’établissement hospitalier, il est gratuit dans certains UHSA (circulaire NOR: ETSH1107932C du 18 mars 2011 relative à l’ouverture et au fonctionnement des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA)).
Dans la journée, le temps d’ouverture des portes des chambres est variable et peut évoluer en fonction de l’état clinique du patient, il est généralement décidé entre le patient et le personnel soignant. La prise des repas peut, toujours selon l’état de santé du patient, avoir lieu dans la chambre ou dans une salle commune. Les dispositions relatives au tabac dans les locaux publics s’appliquent à l’intérieur de l’UHSA. Ainsi, contrairement à la cellule de prison, la chambre d’hôpital est un espace strictement non fumeur. Les patients ne peuvent conserver leur tabac et leur briquet dans leur chambre, mais ils sont autorisés à fumer dans les cours de promenade auxquelles ils ont accès plusieurs fois par jour selon un horaire défini dans chaque UHSA (circulaire NOR: ETSH1107932C du 18 mars 2011 relative à l’ouverture et au fonctionnement des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA)).
L’hospitalisation sans consentement (anciennement nommée hospitalisation d’office, HO) d’une personne détenue est en principe obligatoire lorsqu’elle « nécessite des soins immédiats assortis d’une surveillance constante en milieu hospitalier en raison de troubles mentaux rendant impossible son consentement et constituant un danger pour elle-même ou pour autrui » (article L.3214-3 du Code de la santé publique).
Le choix de l’établissement de santé pour les hospitalisations sans consentement varie selon les besoins spécifiques en termes de prise en charge médicale, l’accessibilité en urgence, les places disponibles, les mesures de sécurité nécessaires, etc. En principe, une hospitalisation en UHSA est privilégiée, mais elle peut également avoir lieu en « unité pour malades difficiles » (UMD) ou, plus exceptionnellement, au sein d’un établissement hospitalier autorisé en psychiatrie (article L.3214-1, II° du Code de la santé publique et article D.398 du Code de procédure pénale).
Les personnes détenues atteintes de tels troubles « ne peuvent être maintenus dans un établissement pénitentiaire » et il appartient à un médecin intervenant dans la prison d’établir un certificat médical circonstancié pour une demande d’hospitalisation sans consentement (article D.398 du Code de procédure pénale). Il doit en outre informer le directeur de l’établissement pénitentiaire de sa demande.
Au vu du certificat médical, il revient au préfet du département dans lequel se trouve l’établissement pénitentiaire (ou au préfet de police de Paris) de prononcer l’hospitalisation dans les meilleurs délais par arrêté préfectoral qui doit être notifié à la personne détenue. L’hospitalisation sans consentement constituant une mesure de privation de liberté, les arrêtés préfectoraux doivent être motivés et énoncer « avec précision les circonstances qui ont rendu la mesure nécessaire » (article L.3213-1 du Code de la santé publique). Ils désignent en outre l’établissement de santé qui doit assurer la prise en charge de la personne malade.
Si l’établissement de santé n’est pas en mesure d’accueillir la personne détenue (il arrive que certains services soient complets ou encore refusent d’accueillir des patients détenus car ils estiment ne pas présenter des conditions de sécurité suffisantes), l’Agence régionale de santé doit être en mesure de trouver une place dans un autre établissement. Dans les 24 heures suivant l’hospitalisation, un médecin réalise un examen somatique complet de la personne et un psychiatre de l’établissement d’accueil établit un certificat médical constatant son état mental et confirmant ou non la nécessité de maintenir l’hospitalisation (article L.3211-2-2 du Code de la santé publique). Ce psychiatre ne peut être « l’auteur du certificat médical […] sur la base [duquel] la décision d’admission a été prononcée ». Dans les 72 heures suivant l’admission, « un nouveau certificat médical est établi dans les mêmes conditions ». Lorsque les deux certificats concluent à « la nécessité de maintenir les soins psychiatriques », un psychiatre de l’établissement d’accueil propose une forme de prise en charge.
En outre, « après le cinquième jour et au plus tard le huitième jour à compter de l’admission », un psychiatre de l’établissement d’accueil établit un nouveau « certificat médical circonstancié indiquant si les soins sont toujours nécessaires » et « si la forme de la prise en charge […] demeure adaptée » et, le cas échéant, en propose une nouvelle (article L.3212-7 du Code de la santé publique). Les copies de ces certificats médicaux sont adressées « sans délai par le directeur de l’établissement d’accueil au représentant de l’État dans le département ou, à Paris, au préfet de police, et à la commission départementale des soins psychiatriques ». Une copie est également adressée « sans délai au juge des libertés et de la détention compétent dans le ressort duquel se trouve l’établissement d’accueil ».
Les unités pour malades difficiles (UMD) sont des unités de soins destinées à accueillir toute personne considérée comme présentant « pour autrui un danger tel » qu’elle nécessite des « protocoles de soins intensifs et de mesures de sécurité particulières » (article R.3222-1 du Code de la santé publique et arrêté du 14 octobre 1986 relatif au règlement intérieur type des unités pour malades difficiles). Ces unités spécialisées ne sont pas réservées qu’aux personnes détenues. Elles sont appelées à recevoir l’ensemble des malades dont le comportement est considéré comme dangereux pour autrui. Implantées dans des centres hospitaliers, elles sont entourées d’un large mur d’enceinte. Elles sont placées sous l’autorité d’un psychiatre hospitalier assisté d’une équipe pluridisciplinaire (médecins psychiatres, médecin somaticien, médecins spécialistes, infirmiers, psychologues, aides-soignants, travailleurs sociaux).
Il existe 10 UMD sur le territoire national, portant la capacité totale d’accueil à 530 places : à Villejuif, Montfavet, Sarreguemines, Cadillac, Plouguernével, Monestier-Merlines, Bron, Albi, Châlons-en-Champagne, Sotteville-lès-Rouen. La capacité d’une UMD peut varier de 40 (comme à Châlons-en-Champagne) à 144 lits (comme à Sarreguemines) répartis en plusieurs sous-unités ne pouvant excéder vingt lits. Chaque UMD a sa propre organisation et les modalités de prise en charge peuvent varier. Pour exemple, l’UMD de Villejuif dispose d’un pavillon « entrants », destiné aux soins intensifs et à l’évaluation, en vue d’obtenir l’adaptation du patient et une réduction du comportement violent (les règles de fonctionnement de cette unité sont particulièrement sécurisées) ; une unité « intermédiaire » ou pavillon de transit, dont l’objectif est l’adaptation aux soins sous contrainte au moyen d’un assouplissement progressif des règles institutionnelles ; une unité « pré-sortants », destinée à préparer la sortie ou le retour en secteur psychiatrique de droit commun, et à travailler notamment sur les affects, la compréhension des faits et de la maladie.
Les patients sont hébergés dans des chambres individuelles, exceptionnellement en dortoirs. Les chambres sont meublées d’un mobilier sommaire, entièrement scellé au sol. Les fenêtres sont pourvues de barreaux et sont verrouillées. L’emploi du temps d’une journée est organisé de manière stricte et ritualisée : le lever et le coucher se font à heure fixe, ainsi que la distribution des médicaments et la prise des repas qui se déroulent dans une salle à manger collective.
Sauf avis contraire du médecin psychiatre, le patient n’est généralement pas autorisé à avoir accès à sa chambre dans la journée. Un créneau peut être toutefois défini après le déjeuner pour la sieste. Seule l’équipe soignante assure la gestion de l’accès et de la sortie de la chambre ainsi que la gestion du placard, sauf avis médical.
Certains achats personnels peuvent s’effectuer au sein de l’UMD, à conditions qu’ils ne soient pas interdits par le règlement intérieur (comme l’alcool, les contenants métalliques ou en verre).
Au cours de la journée, les patients peuvent avoir accès à des activités thérapeutiques, de psychomotricité, de sports ou de vie sociale (jeux de société, télévision, presse, etc.). La participation à ces activités s’effectue après accord du médecin psychiatre et accompagné par le personnel soignant. Les personnes détenues n’ont pas le droit de participer aux sorties en ville ou en forêt qui peuvent être organisées pour les autres patients. Cependant, elles peuvent librement circuler, aux heures prévues, au sein de l’espace délimité de l’UMD. Les déplacements à l’intérieur des unités ne peuvent néanmoins s’effectuer qu’avec l’accompagnement des soignants.
Le tabac est formellement interdit dans les locaux et seul un briquet collectif extérieur est autorisé pour les fumeurs.
Les téléphones portables ne sont pas autorisés, l’UMD est dotée de cabines téléphoniques ou d’un téléphone sans fil. Les patients ne peuvent recevoir et émettre des appels téléphoniques qu’après avis du médecin psychiatre. Les communications ne sont pas écoutées mais les lieux ne permettent pas la confidentialité (même espace que pour les visites). Pour les patients détenus, une liste limitative de numéros autorisés est transmise par l’administration pénitentiaire à l’UMD.
Le patient peut émettre et recevoir du courrier, qui sera ouvert en présence d’un personnel soignant. Les colis sont soumis au contrôle de l’équipe soignante afin de vérifier la présence ou non d’objets suspects ou interdits. Le courrier sortant est également contrôlé, à l’exception de celui adressé à des instances officielles.
Le patient peut recevoir des visites, mais toujours sur autorisation médicale préalable. Elles se déroulent généralement dans un salon familial. Dans les UMD ne disposant pas de lieux spécialement prévus pour les visites, celles-ci se déroulent selon les possibilités dans le hall d’entrée, des bureaux d’entretiens des médecins ou des salles d’activités et de détente. Un infirmier se trouve toujours à proximité.
L’admission en unité pour malades difficiles est prononcée par arrêté du préfet du département où se situe l’établissement dans lequel est hospitalisé le patient avant son admission (ou, à Paris, le préfet de police), sur la base d’un certificat médical établi par le psychiatre participant à sa prise en charge et avec l’accord du psychiatre responsable de l’UMD (article R.3222-2 du Code de la santé publique). Ce dernier peut se rendre sur le lieu d’hospitalisation ou de détention du patient afin de l’examiner et se prononcer sur le bien-fondé d’un placement en UMD. Si le psychiatre de l’UMD estime que ce placement n’est pas justifié, le préfet peut saisir la « commission du suivi médical » qui doit statuer sur l’admission dans les plus brefs délais.
Par ailleurs, si le patient a été placé en UMD sans examen préalable des psychiatres du service, le responsable de l’unité peut, dans un délai de trente jours à compter de l’admission du patient, proposer au préfet la sortie de l’intéressé, s’il estime que le placement n’est pas justifié. En cas de contestation du médecin ayant proposé l’admission, le préfet doit là encore solliciter l’avis de la « commission du suivi médical » puis s’y conformer (arrêté du 14 octobre 1986 relatif au règlement intérieur type des unités pour malades difficiles). Cette commission est composée de quatre membres nommés par le directeur de l’Agence régionale de santé (ARS), qui doivent être : un médecin-inspecteur de santé et trois psychiatres extérieurs à l’UMD (article R.3222-4 du Code de la santé publique).
La « commission du suivi médical » examine au moins tous les six mois le dossier de chaque patient hospitalisé en UMD et en informe la « commission départementale des soins psychiatriques » (article R.3222-5 du Code de la santé publique). Si elle estime que le patient est stabilisé et que les conditions de son maintien ne sont plus remplies, la « commission du suivi médical » doit saisir le préfet d’implantation de l’UMD. Ce dernier doit alors prononcer par arrêté la sortie du patient de l’UMD, et en informer le préfet qui a pris l’arrêté initial d’admission ainsi que l’établissement de santé à l’origine de la proposition d’admission (article R.3222-6 du Code de la santé publique). Cette sortie peut prendre soit la forme d’une levée de la mesure de soins sans consentement (ayant pour conséquence le retour en UHSA ou en détention), soit la poursuite de l’hospitalisation sans consentement dans un établissement de santé dédié (UHSA ou établissement de santé autorisé en psychiatrie).
La « commission de suivi médical » peut aussi se saisir à tout moment de la situation d’un patient hospitalisé en UMD, spontanément, ou à la demande du patient, de sa famille, du procureur de la République, du préfet, du psychiatre responsable de l’unité, du soignant traitant le patient, du directeur de l’établissement où est implantée l’UMD, ou encore du directeur de l’établissement d’origine (article R.3222-5 du Code de la santé publique). Enfin, la « commission du suivi médical » visite l’UMD à tout moment qu’elle juge utile, et au moins une fois par semestre : elle doit rendre compte de ses investigations aux autorités administratives (article R.3222-7 du Code de la santé publique).
La durée de séjour des patients détenus n’est pas plus limitée que celle des autres patients, certains peuvent ainsi y être maintenus pendant des années. Mais en pratique, les personnes détenues restent en moyenne moins longtemps en UMD que les autres patients. A titre d’exemple, à l’UMD de Plouguernevel (Côtes-d’Armor), la durée moyenne de séjour était 151 jours en 2014 mais de 117 jours pour les patients détenus.
En prison comme à l’extérieur, une personne ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sans son consentement ou, le cas échéant, sans celui de son représentant légal, en dehors des cas où elle est atteinte de troubles psychiatriques constituant un danger pour elle-même ou pour autrui et rendant impossible son consentement (article L.3211-1 du Code de la santé publique). Le consentement libre et éclairé de la personne est la condition sine qua non du suivi thérapeutique.
Ce principe vaut également pour les détenus condamnés pour une infraction pour laquelle le suivi socio-judiciaire (SSJ) est encouru, l’injonction de soins dont peut être assortie le SSJ ne prenant effet qu’à la libération de la personne (article 131-36-4 du Code pénal). Toutefois le refus de soin d’une personne détenue en raison d’une infraction pour laquelle le SSJ est encouru peut conduire le juge de l’application des peines à refuser l’octroi de réductions supplémentaires de peine ou d’une libération conditionnelle (article 721-1 du Code de procédure pénale). A sa libération, la personne soumise à une injonction ou obligation de soins encourt en outre une peine d’emprisonnement ou une révocation de son aménagement de peine pour non-respect de ses obligations.
La personne détenue hospitalisée sans consentement est en principe titulaire des mêmes droits que tout autre patient, « sous réserve des restrictions rendues nécessaires par [sa] qualité de détenu » ou « par [son] état de santé » (article L.3214-2 du Code la santé publique).
Les restrictions à l’exercice de ses libertés individuelles doivent être « adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental », ainsi qu’à « la mise en œuvre du traitement requis » (article L.3211-3 du Code de la santé publique). En toutes circonstances, « la dignité de la personne doit être respectée » et son adhésion aux soins recherchée. « Le plus rapidement possible et d’une manière appropriée à son état », elle doit être informée « de la décision d’admission » et « des raisons qui la motivent ». De même, « dès l’admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite à sa demande », elle doit être informée « de sa situation juridique », « de ses droits », « des voies de recours qui lui sont ouvertes », et « des garanties qui lui sont offertes ».
Par ailleurs, une personne hospitalisée sans consentement dispose en principe du droit :
- de communiquer avec les autorités habilitées à recevoir les réclamations des personnes hospitalisées (le président du tribunal de grande instance, le procureur de la République, le maire de la commune) ;
- de porter sa situation à la connaissance du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) ;
- de saisir la commission départementale des soins psychiatriques et celle des relations avec les usagers ;
- de prendre conseil d’un médecin ou d’un avocat de son choix ;
- d’émettre et de recevoir des courriers, de consulter le règlement intérieur de l’établissement, d’exercer son droit de vote, de se livrer aux activités religieuses ou philosophiques de son choix (article L.3211-3 du Code de la santé publique).
La personne détenue hospitalisée doit également se voir proposer de désigner une personne de confiance « qui sera consultée au cas où elle-même serait hors d’état d’exprimer sa volonté et de recevoir l’information nécessaire à cette fin » (article L.1111-6 du Code de la santé publique). Il peut s’agir d’un parent, d’un proche, ou de son médecin traitant. Si le malade le souhaite, la personne de confiance doit pouvoir l’accompagner dans « ses démarches et assiste(r) aux entretiens médicaux afin de l’aider dans ses décisions ». Cette désignation doit se faire par écrit pour le temps de l’hospitalisation, elle est « révocable à tout moment ». Là encore, cette disposition n’est pas respectée partout, nombre d’hôpitaux n’en informant pas le patient et ne lui permettant pas d’accéder à cette aide.
Par ailleurs, la personne détenue hospitalisée a le droit d’avoir accès aux informations concernant sa santé (comptes-rendus de consultation ou d’hospitalisation, prescriptions thérapeutiques, dossier médical, etc.) directement ou par l’intermédiaire d’un médecin qu’elle désigne (voir « La médecine générale – Qu’est-ce que le dossier médical et comment le consulter ? »). Ces informations doivent lui être communiquées au plus tard dans les huit jours suivant sa demande et au plus tôt après qu’un « délai de réflexion » de 48 heures aura été accordé au patient (articles L.1111-7, 1° et R.1111-1 du Code de la santé publique). Le délai de communication est porté à deux mois lorsque les informations médicales datent de plus de cinq ans. À titre exceptionnel, la consultation des informations recueillies dans le cadre d’une hospitalisation sans consentement peut être subordonnée à la présence d’un médecin désigné par le demandeur « en cas de risques d’une gravité particulière », notamment si les informations techniques nécessitent, pour être bien comprises, d’être explicitées au patient par un professionnel ou si leur révélation risque de heurter sa sensibilité.
En cas de refus d’une présence d’un médecin par le demandeur, la commission départementale des hospitalisations psychiatriques est saisie (article L.1111-7, 4° du Code de la santé publique). Son avis s’impose au détenteur des informations comme au demandeur.
Dans le cas d’une personne mineure, le droit d’accès aux informations médicales est exercé par un titulaire de l’autorité parentale, ou à la demande du mineur par l’intermédiaire d’un médecin (article L.1111-7, 5° du Code de la santé publique).
La consultation sur place des informations médicales est gratuite. Lorsque le demandeur souhaite la délivrance de copies, quel qu’en soit le support, les frais laissés à sa charge ne peuvent excéder le coût de la reproduction et, le cas échéant, de l’envoi des documents (article L.1111-7, 7° du Code de la santé publique).
Depuis la loi n°2011-803 du 5 juillet 2011, un contrôle systématique des hospitalisations sous contrainte par le juge des libertés et de la détention (JLD) a été instauré, sans préjudice des recours pouvant être exercés devant ce même juge. Ce contrôle doit avoir lieu dans un délai de 12 jours à compter de l’admission du patient en hospitalisation sans consentement (articles L.3211-12-1, 1° et 2° et L.3216-1 du Code de la santé publique). Dans le cadre de ce contrôle systématique, le JLD est saisi dans un délai de 8 jours soit par le directeur de l’établissement de santé s’agissant d’une hospitalisation à la demande d’un tiers, soit par le préfet dans le cas d’une hospitalisation sur décision d’un représentant de l’État décidée par ce dernier.
Le JLD du ressort de l’établissement hospitalier peut également être saisi, à tout moment, afin d’ordonner à bref délai la mainlevée immédiate d’une mesure d’hospitalisation psychiatrique contrainte (articles L.3211-12 et L.3216-1 du Code de la santé publique). La saisine peut émaner de la personne hospitalisée, des titulaires de l’autorité parentale ou du tuteur si la personne est mineure, et plus généralement de toute « personne susceptible d’agir dans l’intérêt de la personne faisant l’objet des soins ». Le procureur de la République dispose lui aussi de la faculté d’effectuer une telle saisine. Et le juge des libertés et de la détention peut également se saisir d’office.
La saisine du juge doit prendre la forme d’une requête datée et signée (article R.3211-10 du Code de la santé publique). Elle doit comporter les informations suivantes relatives à la personne hospitalisée sous contrainte : nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance (les mêmes indications doivent être précisées concernant le demandeur s’il ne s’agit pas de la personne hospitalisée). La requête doit ensuite exposer les faits et son objet.
Elle peut être déposée au secrétariat de l’établissement de santé, mais la personne hospitalisée peut également former sa requête par « une déclaration verbale recueillie par le directeur de l’établissement, qui doit établir un procès-verbal contenant les mentions [précitées] » (article R.3211-28 du Code de la santé publique). Le procès-verbal est daté et signé par le directeur et la personne hospitalisée. La requête ou le procès-verbal doivent être transmis sans délai au greffe du tribunal. Le directeur transmet par ailleurs tous les éléments utiles au tribunal : copie de l’arrêté du préfet, copie des certificats et avis médicaux, etc.
Le JLD doit rendre sa décision dans un délai de 12 jours à compter de l’enregistrement de la requête au greffe, et dans un délai de 25 jours si une expertise a été ordonnée (article R.3211-30 du Code de la santé publique). Ces délais sont généralement tenus dans la pratique, leur non-respect constituant un vice de forme.
Lorsqu’un recours a été introduit parallèlement à l’examen systématique effectué dans les 12 premiers jours d’hospitalisation, le juge pourra ne rendre qu’une seule et même décision (article L.3211-12-3 du Code de la santé publique).
Par la suite, le JLD devra à nouveau statuer à l’issue de chaque période de six mois à compter de la précédente décision judiciaire (article L.3211-12-1, 3° du Code de la santé publique). Il devra néanmoins être saisi au maximum 15 jours avant l’issue de six mois.
Le juge statue publiquement après débat contradictoire (article L.3211-12-2 du Code de la santé publique). Généralement, l’audience se déroule au tribunal de grande instance, mais si le juge l’estime plus approprié et que l’établissement hospitalier dispose d’une salle adaptée, il pourra décider de statuer dans cette salle. Il ne peut en revanche statuer sans avoir mis la personne hospitalisée en mesure d’être entendue. Celle-ci peut choisir de comparaître en personne avec ou sans l’assistance d’un avocat, de ne pas comparaître ou d’être représentée par un avocat. L’audience peut aussi se tenir sous la forme d’une visioconférence, à la condition que le patient ne s’y oppose pas et que cela soit compatible avec son état de santé.
Les autres personnes entendues à l’audience sont le directeur de l’établissement hospitalier ou le préfet, le parquet, et éventuellement le tiers qui a demandé l’hospitalisation (article R.3211-13 du Code de la santé publique).
Dans certains cas, et notamment lorsque la personne est ou a déjà été hospitalisée en UMD, le juge ne peut statuer qu’après avoir diligenté deux expertises psychiatriques, ainsi qu’après avoir recueilli l’avis d’un collège composé d’un psychiatre et d’un représentant de l’équipe pluridisciplinaire participant à la prise en charge du patient, ainsi que d’un autre psychiatre ne participant pas à la prise en charge du patient (article L.3211-9 du Code de la santé publique). Le délai dans lequel statue le juge peut alors être prolongé d’une durée maximale de 14 jours (article L.3211-12-1 du Code de la santé publique).
A l’issue de l’audience, le juge rend une ordonnance qui ordonne le maintien ou la mainlevée de l’hospitalisation. En cas de demandes répétées, et lorsqu’elles sont manifestement infondées, le JLD peut décider de rejeter la requête sans tenir d’audience.
L’ordonnance du JLD est susceptible d’appel devant le premier président de la cour d’appel dans un délai de 10 jours à compter de sa notification (article R.3211-18 du Code de la santé publique). Cet appel n’est en principe pas suspensif. Toutefois, lorsque le juge ordonne la mainlevée de l’hospitalisation contrainte, le procureur de la République peut, en formant appel dans un délai de 6 heures à compter de la notification, demander au premier président de la cour d’appel de déclarer le recours suspensif « en cas de risque grave d’atteinte à l’intégrité du malade ou d’autrui ». Le premier président statue sans délai par une ordonnance motivée non susceptible de recours (article L.3211-12-4 du Code de la santé publique).
Lorsque dans le cadre de la procédure de contrôle systématique de la légalité, ou consécutivement à un recours, le juge des libertés et de la détention ordonne la mainlevée de l’hospitalisation, cette décision est notifiée sans délai à l’établissement pénitentiaire par le procureur de la République afin que le retour de la personne en détention soit organisé dans les meilleurs délais (article L.3214-2 du Code de la santé publique).
La fin de l’hospitalisation sans consentement peut aussi intervenir à tout moment sur décision du préfet, avant ou après que le JLD ne se prononce. En effet, si un psychiatre participant à la prise en charge du patient dans l’établissement d’accueil atteste par un certificat médical que les conditions ayant justifié l’hospitalisation ne sont plus remplies, et que la levée de cette mesure peut être ordonnée, le directeur de l’établissement de santé est tenu d’en référer au préfet du département dans un délai de 24 heures (article L.3213-9-1 du Code de la santé publique). Le préfet doit dès lors statuer dans un délai de trois jours francs après réception du certificat médical. Si le préfet décide de ne pas suivre l’avis du psychiatre à l’origine du certificat médical, il doit saisir l’avis d’un second psychiatre par le biais du directeur d’établissement. Si le deuxième psychiatre confirme l’absence de nécessité de l’hospitalisation, le préfet doit prononcer la levée de la mesure de soins sans consentement. En revanche, si l’avis préconise le maintien de l’hospitalisation, le préfet qui décide d’en prendre acte doit en informer le directeur de l’établissement hospitalier qui saisit le juge des libertés et de la détention afin qu’il statue à bref délai (dans les conditions détaillées précédemment).
Quelles sont les conséquences d’une levée d’écrou au cours d’une hospitalisation sans consentement ?
Lorsque la fin de la peine d’emprisonnement intervient pendant l’hospitalisation sans consentement, la levée d’écrou peut être effectuée au sein de l’établissement de santé (article D.151 du Code de procédure pénale). Le greffe de l’établissement pénitentiaire doit alors se rendre dans l’établissement hospitalier pour procéder à la levée d’écrou.
S’il est hospitalisé dans un hôpital psychiatrique de droit commun, le détenu conserve son statut de patient soumis au régime de l’hospitalisation sans consentement jusqu’au moment où le juge des libertés et de la détention ou bien le préfet mettront fin à la mesure. Pendant cette période d’hospitalisation, le patient ne relève plus que de l’hôpital et de ses services.
En cas d’hospitalisation sans consentement en UHSA, si le psychiatre de la structure estime que la personne libérée nécessite le maintien de la mesure préfectorale d’hospitalisation sans consentement, il établit un certificat en ce sens à l’attention du préfet. Celui-ci prend, s’il estime que les conditions sont réunies, un « arrêté modificatif portant hospitalisation sur décision d’un représentant de l’État ». L’orientation du patient vers « un établissement de santé de son département d’origine » est possible dans son intérêt. Un « arrêté préfectoral de transfert », après « accord du préfet du département d’origine », sera alors nécessaire (circulaire NOR: ETSH1107932C du 18 mars 2011 relative à l’ouverture et au fonctionnement des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA)).