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Série noire – épisode 7 – Prison de Saint-Étienne-La Talaudière : l’État à nouveau mis en cause pour l’indignité des conditions de détention

Alors qu’au cours des douze derniers mois, six établissements pénitentiaires ont déjà été condamnés en référé pour leurs conditions de détention dégradantes, une nouvelle procédure de référé-liberté vise cette fois le centre pénitentiaire de Saint-Étienne-La Talaudière. Engagé par l’OIP, ce recours dénonce des conditions d’incarcération contraires à la dignité et demande que l’administration agisse en urgence. L’audience aura lieu au tribunal administratif de Lyon, le mardi 4 novembre à 14h.

En 2022, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) tirait la sonnette d’alarme : la surpopulation de la prison stéphanoise « aggrav[e] l’indignité des conditions de détention induites par l’état de délabrement avancé, la vétusté et l’exiguïté des locaux ». Depuis, les alertes se multiplient : la députée Andrée Taurinya lors de sa visite l’année suivante, puis plusieurs décisions du juge des référés en 2023 et 2024 ordonnent à l’administration d’agir.

Or, malgré la rénovation d’une partie des locaux, les personnes détenues demeurent soumises à des conditions de vie attentatoires à la dignité humaine, comme ont pu le constater ces derniers mois le bâtonnier de l’ordre des avocats au barreau de Saint-Étienne et la députée Andrée Taurinya après une nouvelle visite de l’établissement. Ils pointent la vétusté du quartier femmes, ainsi que d’une partie du quartier hommes (douches collectives insalubres, toilettes non suffisamment cloisonnées, fenêtres détériorées qui ne garantissent pas l’isolation thermique des cellules, murs rongés par l’humidité, etc.).

Ils dénoncent également un état d’insalubrité répugnant : des cours de promenade saturées de déchets, des espaces de circulation empestant l’urine de rats, des salles d’attente de l’unité sanitaire dont les murs sont souillés de traces d’urine et autres déjections séchées, ou encore des traces d’excréments dans les toilettes vétustes des cellules du quartier disciplinaire. L’état des équipements électriques dans certaines cellules fait courir des dangers supplémentaires, tout comme l’absence de système d’alarme dans les douches collectives, dans un contexte de violence alimenté par la suroccupation des locaux.

Car, dans cette prison, comme ailleurs, la surpopulation explose.

Au 1er septembre 2025, on comptait 425 personnes incarcérées pour 263 places – un taux d’occupation de 161,6%, nécessitant de faire dormir plusieurs dizaines de personnes incarcérées sur des matelas posés à même le sol, parfois à proximité immédiate des toilettes, dans des cellules exigües.

En raison du manque d’activités proposées, les personnes détenues passent souvent 22 heures sur 24 – dans ces cellules surpeuplées, mal isolées, insuffisamment aérées et ne disposant pas d’un mobilier adapté au nombre d’occupants.

L’année 2025 est aussi marquée par les suicides de deux jeunes hommes de 26 et 29 ans à la prison de la Talaudière. Pour un surveillant, représentant syndical, cette « tragédie souligne les problèmes posés par la vétusté de l’établissement [et son] taux d’occupation ».

Après une longue série de condamnations déjà prononcées, ce nouveau référé-liberté montre que la situation reste tout aussi indigne — et que cela ne suffit toujours pas à faire réagir le ministère de la Justice. Face à la surpopulation et l’état catastrophique des prisons françaises, le silence du garde des Sceaux résonne plus fort que les alertes répétées des juridictions, des associations et des institutions de contrôle.

Alors que les murs s’effritent et que des vies s’y brisent, le garde des Sceaux multiplie les annonces, sans jamais aborder le scandale le plus manifeste de son ministère : des établissements pénitentiaires délabrés et une surpopulation carcérale hors de contrôle. Pas un mot sur les taux d’occupation indécents. Pas un mot sur les cellules où l’on dort à même le sol. Pas un mot sur les conditions qui, chaque jour, mettent des vies en danger.

L’indignité ne disparait pas parce que l’on a choisi de ne pas la regarder. Elle s’impose, implacable, dans les rapports, dans les décisions de justice, dans les drames humains qu’elle provoque — et que l’État ne peut plus prétendre ignorer.

Contact presse : Sophie Deschamps – 07 60 49 19 96 – sophie.deschamps@oip.org