Parole contre parole, le détenu perd toujours. Un surveillant accuse Patrick et sa compagne d’avoir eu un rapport sexuel durant un parloir le 3 janvier 2015 au centre pénitentiaire de Poitiers-Vivonne.
L’intéressé conteste. Il indique qu’il enlaçait sa compagne, assise sur ses genoux, lorsqu’un surveillant a interrompu le parloir au motif qu’il les aurait « surpris en plein acte sexuel ». Patrick dément formellement et soutient qu’ils étaient tous deux intégralement vêtus, elle étant assise à califourchon sur lui.
Aucune disposition du Code de procédure pénale ou du règlement intérieur ne leur interdit d’établir un contact physique. Une circulaire de 2012 prévoit même expressément que « les personnes visitées doivent pouvoir étreindre leurs visiteurs ». Face à deux versions contradictoires, la direction a refusé d’entendre les témoins présents ce jour-là et de visionner les enregistrements de vidéosurveillance, s’en remettant aux seules allégations du surveillant. La visite de 48 heures dont le couple devait en principe bénéficier en Unité de vie familiale (UVF) deux semaines plus tard est annulée. A titre provisoire, la direction impose à Patrick des visites en parloir hygiaphone avec l’ensemble de ses visiteurs pour le mois suivant et suspend le permis de visite de sa compagne pour une durée d’un mois. Le 26 février 2015, le directeur supprime la possibilité pour le couple de se voir sans dispositif de séparation, pour une durée de deux mois supplémentaires, cette fois-ci à titre de sanction disciplinaire. Patrick est également sanctionné de 10 jours de quartier disciplinaire avec sursis. Le tribunal administratif de Poitiers a rejeté, le 27 mars, le recours formé par Patrick contre ces sanctions.
Si aucun texte n’interdit expressément les relations sexuelles en prison, le fait d’« imposer à la vue d’autrui des actes obscènes ou susceptibles d’offenser la pudeur » constitue une faute disciplinaire, permettant de fait de sanctionner la sexualité au parloir. Seules les visites en UVF et parloirs familiaux, à l’abri du regard d’autrui, autorisent les rapports sexuels entre le détenu et son visiteur. Fin 2014, seuls 29 établissements sur 190 en étaient dotés. Partie intégrante du droit à la vie privée, protégé par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, le droit à la sexualité est loin d’être respecté dans les prisons françaises.
Coordination OIP sud-ouest