Discriminatoire », « anti-liberté de culte et d’expression », « misogyne », « insultante » : c’est en ces termes que les femmes détenues de Rennes ont alerté l’OIP cet été. En cause, la publication, le 2 juin 2017, d’une nouvelle note de la direction relative au « respect des tenues vestimentaires des personnes détenues ».
Afin de « respecter le principe d’une tenue vestimentaire dite correcte, respectant la pudeur et la sensibilité de chacun », les femmes se voient ainsi rappeler l’interdiction, « sous peine de sanction disciplinaire », de porter hors de leur cellule un « vêtement de type djellaba », un « short court en-deçà du genou », un « débardeur laissant paraître la poitrine et les bras nus » ou encore un « tee-shirt court laissant apparaître la partie basse du ventre ». Exceptionnellement, ces vêtements d’été « peuvent être autorisés uniquement sur cour de promenade en période estivale » – mais à condition d’être couverts par d’autres vêtements lors du trajet de la cellule à la cour.
Si aucune sanction disciplinaire n’a été portée à la connaissance de l’OIP, l’application (et l’interprétation parfois hasardeuse) de ces nouvelles consignes a teinté la période estivale d’une ambiance « assez tendue », rapporte une détenue. « L’autre jour, j’avais mis une robe qui m’arrive au-dessus des genoux, et une surveillante m’a dit d’aller mettre un legging car elle était trop courte. Je ne me déplace qu’en fauteuil roulant, assise, et la robe m’arrivait aux genoux. » Une autre explique avoir vu des surveillantes contraindre des détenues à se changer durant le Ramadan alors qu’ « elles ne sortaient de leur cellule qu’au moment du repas pour prendre leur sac de coupure du jeûne ». Elle-même a dû s’expliquer longuement lorsqu’elle se rendait au parloir début juillet sur sa « robe africaine brodée (plus communément appelée boubou) » – la surveillante lui reprochant d’être en djellaba.
Contacté par l’OIP, le directeur de l’établissement justifie cette note comme rappelant les règles du « vivre ensemble », « depuis trop longtemps non respectées », et posant le principe de la préparation à la sortie : « On ne se présente pas dénudée au travail, on respecte ses interlocuteurs. » Shorts et tee-shirts ne se porteraient, selon lui, que dans les grandes villes, « et encore ». Quant au débardeur, c’est un « sous-vêtement que les hommes portaient au début du XXe siècle sous leurs chemises ».
Par Aliénor Minar et François Bès