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Incendies : les troubles psychiatriques en question

S’il faut se garder de toute généralisation, une donnée néanmoins interroge : au moins neuf des vingt-et-une personnes décédées dans des incendies ces dernières années souffraient de troubles psychiques. Parmi elles, quatre étaient déjà passées par l’hôpital psychiatrique (ou devaient y être internées prochainement), et cinq avaient en outre déjà incendié leur cellule auparavant. Décédé en août 2018 à la prison de Fleury, D. était ainsi connu pour son instabilité et ses troubles du comportement. Dépressif, sous traitement, il s’était déjà mutilé avec des lames de rasoir à de nombreuses reprises. Il était également connu pour allumer des feux de mouchoirs sur le bord de sa fenêtre – comme il le faisait encore une heure avant sa mort. Certains profils se révélaient même totalement incompatibles avec un maintien en détention – a fortiori avec un placement à l’isolement. C’était ainsi le cas d’Hamidi Bensouina, décédé à la prison de Douai en 2020. Hospitalisé en psychiatrie à plusieurs reprises, il n’avait, aux dires de l’administration pénitentiaire, « pas sa place en détention »*. Son parcours, jalonné par des dizaines de condamnations, était marqué par des aller-retours entre l’hôpital et la prison. Devenu indésirable dans les structures hospitalières, il l’était tout autant en détention, où il était décrit comme « ingérable ». Lors de sa dernière incarcération, un mois après son arrivée, il mettait une première fois le feu à son rideau de douche. Deux jours avant sa mort, un rapport cité par le journal Le Parisien alertait une « énième » fois sur la situation de ce détenu « dépourvu de toutes ses facultés mentales », estimaient ses auteurs. Le 8 novembre 2020, Hamidi périssait dans l’incendie de sa cellule**. Comme lui, Alexis, décédé à la prison de Roanne en 2020, n’avait pas sa place en détention. Diagnostiqué bipolaire depuis longtemps, déclaré irresponsable par un expert psychiatre, il avait été interné à l’hôpital, avant qu’un arrêté préfectoral ne le renvoie en prison. Placé au quartier disciplinaire, il décédera dans un incendie de cellule dans la nuit du 17 au 18 juillet 2020.

par Charline Becker et Laure Anelli

* « “Ingérable en détention” et “indésirable en psychiatrie” : chronique d’une mort annoncée en prison », Le Parisien, 11 avril 2021.
** Ibid.