Depuis le 1er juillet 2013, on ne se brûle plus les poumons en chauffant son repas en cellule. Une note du 13 juin du directeur de l’administration pénitentiaire (DAP) interdit la vente aux détenus des pastilles chauffantes, dont le caractère toxique a été dénoncé à maintes reprises.
« Il est en effet apparu que leur emploi dans des espaces confinés est inapproprié en l’état », précise le DAP. Des données connues de longue date : la combustion de ces pastilles libère des oxydes d’azote, de l’ammoniac, du cyanure d’hydrogène ou encore du formaldéhyde, une substance cancérigène.
Dès 2005, l’Inspection générale des affaires sociales, saisie par l’OIP, interrogeait l’administration centrale sur la vente aux détenus de ces pastilles toxiques. Le Comité de coordination de toxicovigilance emboîtait le pas en janvier 2007, rappelant qu’elles « ne devraient pas être utilisées en atmosphère confinée ». Le 12 avril 2012, le tribunal administratif de Versailles accordait une indemnité de 24 000 euros à Nasser M., incarcéré pendant plus de deux ans à Fleury-Mérogis : une expertise médicale avait établi le lien « indéniable » entre « le déclenchement de ses [troubles] respiratoires [et] l’utilisation des [pastilles] ».
L’administration pénitentiaire s’était contentée, depuis 2008, de diffuser aux détenus une notice d’information les invitant à « pratiquer une aération de la cellule pendant et après la combustion des pastilles », et à « maintenir une certaine distance » lors de leur utilisation. Des précautions dérisoires compte tenu de l’exiguïté des cellules et de l’impossibilité dans bien des cas de procéder é une ventilation satisfaisante. L’OIP avait insisté auprès du ministère de la Justice et demandé, en juin 2012, le retrait des pastilles et « l’installation d’équipements permettant des modes de cuisson alternatifs ». Un an après, les pastilles se retrouvent enfin bannies des établissements pénitentiaires. La question de la chauffe des aliments en cellule n’est pas entièrement réglée pour autant, comme en témoigne un détenu dans un courrier d’août2013 à l’OIP: «Le chef d’établissement refuse l’accès aux plaques chauffantes pour raison de puissance insuffisante [du circuit électrique]. J’utilise une chauffe à l’huile mais la fumée m’étouffe (surtout que je suis malade). » L’insuffisante puissance des circuits électriques est en effet régulièrement avancée pour justifier le refus d’équiper les cellules en plaques chauffantes. Un argument récusé par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté dans un rapport de visite de la maison d’arrêt de Villefranche-sur-Saône en septembre 2010 : « Le risque de saturation du réseau électrique pourrait être pris en compte en introduisant des plaques à la puissance limitée ». Le Contrôleur retoquait aussi « l’argument avancé parfois par les personnels, selon lequel une plaque chauffante constituerait potentiellement une arme par destination entre les mains des détenus. » Les établissements où les plaques sont autorisées « ne semblent pas avoir enregistré d’incidents provoqués par cet équipement ».
Note DAP du 13 juin 2013