Le centre de détention de Roanne prend une mesure conservatoire avant toute décision officielle
La direction de la prison de Roanne a décidé de placer un détenu à l’isolement, le 18 novembre, en raison de son « attitude qui consiste à donner le sentiment à l’extérieur, par des moyens condamnables et mensongers, que le régime de vie à Roanne est proprement scandaleux ». Des quatre motifs invoqués, aucun ne correspond à ceux qui sont légalement prévus pour justifier une telle décision. Le premier grief de l’administration concerne « une pétition adressée à l’OIP sur le fonctionnement des parloirs familles et des UVF que nous a transmis votre avocat le 13 octobre 2011 ». En fait de pétition, la direction n’a pu produire qu’un courrier que l’avocat du détenu lui avait transmis pour soutenir la démarche de son client. En second lieu, elle reproche à l’intéressé « [ses] demandes répétées d’être entendu aux côtés de [son] avocat par le Chef d’établissement suite à cette pétition ». Ensuite, la direction s’appuie sur « un courrier anonyme » qu’elle aurait reçu mi-octobre, et qui dénonce ce détenu « comme ayant incité à un mouvement collectif ». Enfin, elle fonde sa décision sur «un courrier en recommandé » adressé début novembre, « dans lequel vous présentez une lettre que vous envisagez d’envoyer au ministère de la Justice et à d’autres autorités ». Et relève que « cette lettre reprend les mêmes sujets que la pétition transmise par votre avocat », et « doit également faire l’objet d’une diffusion à la population pénale […] pour multiplier les signatures ». Rien qui ne corresponde aux dispositions légales selon lesquelles l’isolement est une mesure « de protection ou de sécurité » (article 726-1 du code de procédure pénale) qui doit « procéder de raisons sérieuses et d’éléments objectifs et concordants » permettant « de redouter des incidents graves de la part de la personne détenue concernée ou dirigés contre elle »*. La direction du centre de détention de Roanne n’a pourtant pas hésité à placer G.A. à l’isolement dès le 14 novembre, et ce de manière conservatoire, c’est-à-dire avant toute décision officielle, et avant que l’intéressé puisse faire valoir ses observations avec l’assistance d’un avocat. Cette procédure conservatoire n’est permise qu’en cas d’urgence lorsqu’elle « est l’unique moyen de préserver la sécurité des personnes ou de l’établissement ». Le 14 décembre, le tribunal administratif de Lyon, saisi d’une requête en urgence (référé), a refusé d’examiner la demande de suspension de la mesure d’isolement, estimant que la condition d’urgence n’était pas remplie. C’est-à-dire qu’il n’y avait « aucune atteinte grave et immédiate » aux intérêts du détenu. Cette décision pose une nouvelle fois la question de l’effectivité des voies de recours pour les personnes détenues.
* Circulaire du 14 avril 2011 relative au placement à l’isolement des personnes détenues.