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La Talaudière: les détenus toujours privés de moyens d’alerte en cas d’urgence la nuit

En dépit des interpellations répétées de plusieurs autorités, et des risques avérés pour la santé et la vie des personnes détenues, aucun système d'appel n'a été installé dans les cellules du quartier homme de la maison d'arrêt de La Talaudière (Loire) pour alerter les personnels en cas d'urgence la nuit.

A ce jour, aucun dispositif d’alerte efficace n’a été mis en place pour permettre aux personnes détenues au quartier homme de la maison d’arrêt de La Talaudière d’avertir le personnel de surveillance en cas de situation d’urgence survenant la nuit. Le service médical de l’établissement a confirmé à l’OIP, le 15 décembre 2009, que la seule solution offerte aux détenus pour obtenir les secours des surveillants la nuit est « le mirador » : en cas de problème, les détenus doivent faire du bruit et crier par la fenêtre pour attirer l’attention du surveillant en poste au mirador (situé sur le mur d’enceinte de l’établissement), afin que celui-ci prévienne les personnels à l’intérieur de la prison par téléphone.

Le 7 juillet 2009, le Tribunal administratif de Lyon avait pourtant condamné l’État au motif que « l’absence d’équipement des cellules d’un dispositif d’appel d’urgence des surveillants, de nature àmettre en danger la vie des détenus, est constitutif d’une faute ». Appelé à se prononcer sur la responsabilité de l’État dans le décès d’un homme détenu à la maison d’arrêt de La Talaudière enoctobre 2004, le tribunal a considéré que « le caractère rudimentaire et aléatoire du système d’alerte ne pouvait permettre à un malade affaibli d’être secouru au cours de la nuit ». Décédé des suites d’unulcère gastrique, l’intéressé avait souffert « durant toute la nuit » précédant sa mort. « Le fait qu’il n’ait plus été en mesure d’alerter le personnel pénitentiaire a empêché sa prise en charge en urgence dansun service hospitalier et, par suite, lui a fait perdre une chance de survie ».

Ce constat confirme celui de la mission d’inspection sanitaire qui avait visité l’établissement en octobre 2007 : elle avait alors relevé que « les détenus peuvent utiliser une alarme visuelle située dans le couloir d’accès aux cellules », mais que dans la pratique ceux-ci « ne disposent d’aucun moyen pour alerter le personnel pénitentiaire si ce n’est de créer du vacarme pour prévenir, ce qui est difficile lorsqu’il s’agit d’alerter un personnel qui assure la surveillance sur un voire deux étages la nuit ». Estimant que ce dispositif « n’est pas acceptable », la direction des affaires sanitaires et sociales recommandait, dans le rapport publié à l’issue de sa visite de contrôle, que des solutions soient« activement recherchées » et qu’il soit mis fin à cette situation « dans les plus bref délais ».

Interrogée par l’OIP le 16 décembre 2009, la direction interrégionale des services pénitentiaires (DISP) de Lyon affirme néanmoins que « l’administration pénitentiaire fait de la mise en place de l’interphonie une priorité », et évoque, pour expliquer la persistance du problème, « des études préalables, des procédures lourdes de marché et des travaux lourds » qui impliquent « une programmation pluriannuelle » et nécessitent « de dégager des budgets d’investissement ». Et d’indiquer que « la Direction interrégionale a obtenu une première tranche de crédits d’étude pour 2010 sur Saint-Étienne qui doivent permettre de commencer la restructuration lourde de cet établissement ». Dans un communiqué le 12 septembre 2007, l’OIP avait déjà alerté sur l’absence de moyens d’alerte la nuit à la maison d’arrêt de La Talaudière.

 

L’OIP rappelle :

– que le Conseil d’État affirme qu’ « en vertu d’un principe rappelé notamment par la première phrase de l’article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, aux termes de laquelle le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi, qu’eu égard à la vulnérabilité des détenus et à leur situation d’entière dépendance vis à vis de l’administration, il appartient tout particulièrement à celle-ci, et notamment au garde des sceaux, ministre de la justice et aux directeurs des établissements pénitentiaires, en leur qualité de chefs de service, de prendre les mesures propres à protéger leur vie » (CE, 17 décembre 2008, Section française de l’OIP

– que les Règles pénitentiaires européennes (RPE) du Conseil de l’Europe recommande que les détenus soient « en mesure de contacter le personnel à tout instant, y compris la nuit » (règle n°52.4).

– que dans son étude sur l’accès aux soins des personnes détenues (19 janvier 2006), la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme « recommande la généralisation des moyens d’appels des secours dans les cellules de détention (interphones) »