L'OIP-section française alerte sur l'absence de remise d'un rapport gouvernemental sur la situation des personnes détenues à l'égard des droits à la retraite, que la loi du 9 novembre 2010 lui imposait de déposer avant le 30 juin 2011. Dans son article 94, la loi sur la réforme des retraites indiquait précisément que le gouvernement devait transmettre « au plus tard le 30 juin 2011, aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat, un rapport portant sur l'assimilation des périodes de travail en détention à des périodes de cotisations [à l'assurance vieillesse] à part entière ».
Cet engagement avait été pris, et intégré dans la loi, à la faveur d’un amendement défendu par le groupe communiste au Sénat auquel le ministre du travail s’était déclaré favorable, à condition de disposer d’un délai (fixé au 30 juin). Il avait estimé qu’un rapport sur les questions de retraite pour les détenus « permettrait d’examiner plus précisément la question du travail en prison et des cotisations », que « ce sujet n’est pas tabou » et qu’ « il doit être examiné ».
Aucune explication n’est avancée par les pouvoirs publics pour justifier du non-respect de cette disposition légale, alors même que l’élaboration de ce rapport était la seule perspective ouverte pour que soit prise en compte la situation particulière des personnes incarcérées.
Pour rappel, un travailleur à l’extérieur percevant le SMIC peut valider quatre trimestres par an pour sa retraite, tandis qu’un travailleur détenu peut en valider tout au plus un ou deux du fait de la faiblesse de sa rémunération. En effet, la validation d’un trimestre pour la retraite suppose des revenus au moins égaux à 1722 euros brut en 2010 (200 fois le SMIC horaire). Or, les revenus mensuels des travailleurs détenus ne dépassent pas 343 euros en moyenne. Le paradoxe consiste à soumettre les personnes incarcérées aux règles de droit commun pour la cotisation à l’assurance vieillesse, tandis que leurs modalités de rémunération sont pour leur part dérogatoires au droit du travail.
A titre d’exemple, une personne récemment libérée n’avait acquis que 35 trimestres après 21 années de travail en prison. Sur la même période, et pour le même travail, un salarié extra-muros en aurait acquis 84, soit plus du double.
Lorsqu’à 62 ans, cet ancien détenu s’est enquis de ses droits à la retraite, la Caisse nationale d’assurance vieillesse lui a répondu qu’il pouvait soit percevoir immédiatement 22,40 euros brut par mois, soit attendre ses 65 ans pour bénéficier de 129,47 euros brut par mois.
L’OIP rappelle que dans les commentaires des Règles pénitentiaires européennes, le Conseil de l’Europe souligne que « tous les détenus devraient recevoir une rémunération conforme aux salaires pratiqués dans l’ensemble de la société » (règle n°26-17).