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L’établissement pour mineurs de Meyzieu en surchauffe

Alors que le principe de l’encellulement individuel est habituellement respecté dans les établissements pénitentiaires pour mineurs (EPM), à Meyzieu, dans le Rhône, il est fréquent que des adolescents soient obligés de partager pendant quelques jours leur cellule avec un nouveau venu. Une situation qui place l’établissement en surchauffe et rend quasi impossible la prise en charge éducative des jeunes.

Dans la nuit du 11 au 12 février 2020, faute de places disponibles, deux adolescents incarcérés à l’établissement pour mineurs de Meyzieu ont été placés dans des cellules déjà occupées. Une situation qui viole le principe d’encellulement individuel, habituellement strictement respecté chez les mineurs. Le lendemain, toujours faute de place, un jeune garçon était placé dans une cellule de l’aile réservée aux filles.

L’EPM de Meyzieu est régulièrement saturé, voire surpeuplé. Depuis cet été, il tourne à plein régime :  certaines cellules avaient déjà été doublées en juin 2019, décembre 2019 et janvier 2020. Installés sur des matelas posés sur des sommiers pliables, les mineurs se voient contraints de cohabiter à deux dans une cellule où ni les toilettes ni les douches ne sont isolées du regard des occupants.

Pourtant, l’ensemble des acteurs impliqués ont été avertis de la situation. En décembre déjà, la direction interrégionale de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) alertait les juges des libertés et de la détention ainsi que les Unités éducatives auprès du tribunal (UEAT) et les juridictions de la forte occupation de l’EPM et des « disponibilités » des quartiers mineurs de la région. Au regard des incarcérations survenues la semaine dernière, le Directeur interrégional des services pénitentiaires aurait par ailleurs « demandé à ce qu’une nouvelle alerte soit transmise par l’administration pénitentiaire aux juridictions ».

Cette suroccupation se fait au détriment de la prise en charge éducative, dénonce la CGT-PJJ. « L’EPM a un nombre de places théoriques [60], mais si on dépasse 50, 53 mineurs, ça ne tourne plus » déplore un membre du syndicat. Qui poursuit : « L’éducatif a été complètement abandonné en raison d’une politique axée uniquement sur la gestion des flux. »  On peut en effet observer une augmentation croissante du nombre de mineurs incarcérés à Meyzieu : alors qu’en 2017 et 2018, ils étaient en moyenne 40 (avec des pics à 48 en août 2017 et 47 en février 2018), en 2019, la barre des 50 est franchie : 56 en février 2019, 51 en octobre, pour une moyenne annuelle de 46. Au 1er janvier 2020, 56 mineurs étaient détenus à l’EPM.

Ces situations récurrentes de surpopulation ne durent jamais plus de quelques jours, la DISP utilisant régulièrement les transferts de désencombrement vers les quartiers mineurs des prisons les plus proches (Varces ou Bonneville, le plus souvent). Décidés par la DISP dès le 12 février 2020, les derniers transferts ont été effectués en début de semaine. Ces transferts s’avèrent cependant pénalisants pour les mineurs, l’accompagnement éducatif étant moindre en quartier mineurs qu’en EPM. Ils peuvent aussi être discriminatoires. « Dans les faits, ce sont souvent les mineurs non accompagnés qui sont ‘‘désencombrés’’ prioritairement », pointe la CGT-PJJ.

Ce qui se passe à Meyzieu est à l’image la situation à l’échelle nationale : 816 mineurs étaient incarcérés en janvier 2020, un chiffre en constante augmentation (+ 16% entre 2015 et 2020). Cette tendance ne devrait pas s’inverser avec la réforme de la justice des mineurs, qui entrera en vigueur en octobre prochain. Au contraire, cette dernière pourrait même l’aggraver, avec des dispositions qui accélèrent les procédures et l’extension de la contrainte sur les mineurs, mettant encore à mal le principe de la primauté de l’éducatif sur le répressif[1].

Contact presse : Charline Becker · 06 50 73 29 04

[1] Lire « Enfermement des mineurs, l’impasse », Dedans Dehors n° 105, OIP-SF, octobre 2019.

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