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Marseille- les Baumettes (13) : un homme souffrant de débilité mentale profonde incarcéré depuis plus d’un an

La section française de l'OIP informe des faits suivants :
Bien que s'étant vu diagnostiqué une « anomalie mentale majeure » et un « niveau intellectuel se situant au niveau d'une débilité mentale caractérisée », Monsieur D.P., âgé de 55 ans, est en détention provisoire à la maison d'arrêt de Marseille depuis juin 2006. Tous les experts qui ont eu à l'examiner s'accordent pourtant à dire que son état est incompatible avec la détention.

Ecroué le 17 juin 2006 sur décision d’un Juge de la liberté et de la détention,, D.P est soumis le 11 juillet suivant à une expertise psychiatrique. Selon les conclusions de l’expert, « l’infraction constatée est en relation directe avec la pathologie mentale » dont est atteint D.P. et ce dernier « doit être considéré comme ayant été atteint, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuro-psychique abolissant totalement son discernement et le contrôle de ses actes ». En conséquence, « D.P. n’est pas accessible à une sanction pénale » et « doit faire l’objet d’une hospitalisation d’office dans un établissement psychiatrique, et ceci rapidement ».

D.P. est cependant maintenu en détention. Une contre-expertise, dont les conclusions sont rendues le 29 décembre 2006, retient pour sa part que si D.P. est atteint d’ « arriération mentale » caractéristique d’une « débilité légère », il « ne relève pas d’une mesure d’internement psychiatrique » et reste « accessible à la sanction pénale ». Au moment des faits, son discernement n’a pas été aboli mais seulement « altéré ». Les auteurs de l’expertise constatent toutefois que l’intéressé manifeste de « sensibles difficultés d’adaptation au milieu carcéral » et que de ce fait, « il pourrait être utilement orienté vers une institution adaptée, tel une maison de retraite, de manière à le soustraire aux situations exposées ».

Trois ans plus tôt, en avril 2003, D.P. avait déjà été soumis à une expertise psychiatrique en vue de son placement sous de protection juridique. Durant l’examen, l’expert avait constaté que « consécutivement à une hémorragie cérébrale néonatale, sa pensée est ralentie, pauvre, rudimentaire, lui interdisant tout raisonnement logique, toute possibilité d’abstraction, de conceptualisation. Le patient a une vie affective instinctuelle, ses facultés intellectuelles sont frustres ». En conclusion, avait-il affirmé, DP « présente une débilité profonde », « son quotient intellectuel est voisin de 30 » et « il a besoin de tutelle et de surveillance » de manière à être « protégé de façon continue ». En outre, l’examen pratiqué révèle sur le plan somatique, « de nombreuses séquelles physiques. La démarche [de D.P.] est assurée mais le périmètre de déplacement est limité ».

De fait, depuis le début de son incarcération, D.P. ne s’ est jamais rendu en promenade, ses consultations médicales et ses rendez-vous au parloir sont ses seules occasions de sortir de sa cellule. Son avocate précise également que son état de santé s’est considérablement dégradé au fil de l’incarcération. Il a notamment « perdu beaucoup de poids et se déplace de moins en moins bien », au point qu’elle « n’ose plus le faire descendre au parloir avocat tellement cela lui est difficile ».
Contactée par l’OIP le 23 juillet, un travailleur social explique qu’en règle générale D.P. occupe une cellule proche de l’Unité de consultation et de soins ambulatoires (UCSA). « Les infirmières peuvent alors s’en occuper quotidiennement et lui faire prendre une douche une fois par semaine. Toutefois, ajoute-t-il, il est arrivé à plusieurs reprises qu’il soit transféré dans des cellules situées au troisième ou au quatrième étage de la maison d’arrêt. Livré à lui même, sa situation devient alors particulièrement précaire ». En effet, comme l’a fait remarquer un membre du personnel soignant, l’UCSA ne dispose « que de cinq chambres aménagées pour accueillir des détenus handicapés et malheureusement D.P. est loin d’être la personne la plus mal lotie de l’établissement ».

Selon ce praticien, « étant donné les capacités intellectuelles de D. P., le mettre en prison revient à le mettre en danger ». Interrogé par l’OIP, le juge d’instruction qui a rejeté deux demandes de remise en liberté au motif qu’elles ne présentaient pas les garanties de sécurité nécessaires, a fait valoir qu’« aucune proposition alternative à la détention ne m’a été faite ».

L’OIP rappelle :

– l’article D 398 du Code de procédure pénale, aux termes duquel « les détenus atteints de troubles mentaux (…) ne peuvent être maintenus dans un établissement pénitentiaire. »

– que la Cour européenne des droits de l’homme considère que « la détention d’une personne malade dans des conditions inadéquates, peut en principe constituer un traitement [inhumain et dégradant] ». La Cour a condamné la France à raison du maintien en prison d’un détenu souffrant de graves troubles mentaux par un arrêt du 11 juillet 2006 (CEDH, Rivière c/France)

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