En prison depuis 37 ans, Philippe El Shennawy n’a pas obtenu de grâce présidentielle le 25 mars, mais le relèvement des trois ans de période de sûreté qui lui restaient.
Une marche de plus dans le long combat d’un détenu et de ses proches, qui lui ouvre la possibilité d’engager une demande de libération conditionnelle. Le 12 décembre 2012, le tribunal de l’application des peines de Versailles avait parcouru la moitié du chemin en réduisant déjà de trois ans la période de sûreté. L’issue de sa peine est aujourd’hui fixée à 2032. S’il la purge entièrement, il sortira à l’âge de 78 ans, après avoir passé 54 ans emprisonné.
Philippe El Shennawy est derrière les barreaux depuis le braquage d’une banque à Paris, en 1975, qui lui vaut la perpétuité. En 1991, il bénéficie d’une libération conditionnelle, assortie d’une interdiction de se rendre à Paris. Il ne résiste pas à la tentation de venir voir son fils et sera réincarcéré. A deux reprises, Philippe El Shennawy s’évade, commet d’autres braquages. A chaque fois, il est arrêté, repasse devant les juges. « Détenu particulièrement signalé » jusqu’en août 2012, il a passé dix-neuf ans à l’isolement, six en hôpital psychiatrique, sans qu’aucune pathologie ne soit diagnostiquée, et a changé quarante fois de lieu de détention. Il a aussi obtenu plusieurs baccalauréats, deux CAP, une maîtrise d’histoire, trouvé un emploi dans l’informatique… et s’est marié. « Ce détenu a donné toutes les preuves d’une capacité de se réinsérer dans la vie active, et en apporte aujourd’hui les garanties », défend un comité de soutien à l’appui d’avis favorables de l’administration pénitentiaire. « L’esprit de la justice est d’amener [les criminels] à réintégrer la communauté des citoyens. Garder quelqu’un [en prison] pendant 54 ans, ce n’est pas le corriger, c’est le détruire, le tuer. »
L’historien Tzvetan Todorov, le sociologue Michel Wieviorka, le magistrat Louis Joinet ou encore l’avocat Henri Leclerc figurent parmi les signataires d’une tribune, publiée dans Le Monde du 26 janvier 2013 : « N’est-il pas temps de rompre avec la logique dominante de ces dernières années, et d’en finir avec l’allongement infini des peines de prison ? » C’est en effet sur « les peines sans fin » qu’il convient aujourd’hui d’attirer l’attention.
Appel du comité de soutien à M. El Shennawy, www.petitionpublique.org