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Polynésie : entrave aux démarches judiciaires de détenus contre leurs conditions de détention

Durant 77 jours, le directeur du centre pénitentiaire de Faa’a nutania, avec l’aval du procureur de la République, a retenu les courriers adressés le 10 octobre 2012 à une vingtaine de prisonniers par Tamarii nuutania, association polynésienne de défense des détenus.

Dans ces courriers contenant un questionnaire de l’OIP sur les conditions de détention, les avocats de l’association indiquaient la marche à suivre pour engager des recours devant le tribunal administratif contre l’indignité de leurs conditions de détention. Le directeur s’est justifié par la crainte d’« une action collective » au sein d’une prison « sensible », l’association comptant près de 200 adhérents détenus. Parallèlement, le parquet général a saisi l’ordre des avocats, soutenant que la démarche des défenseurs pouvait être assimilée à du démarchage, pratique interdite à cette profession. Des accusations vite levées, le bâtonnier fustigeant un « comportement d’un autre âge » de la part du parquet, jugeant que l’action, « pleinement justifiée par la situation actuelle notoirement intolérable et indigne des conditions de détention », était « déontologiquement irréprochable » et « parfaitement légitime ».

Le parquet de Papeete a également ouvert une enquête préliminaire à l’encontre des représentants de l’association Tamarii nuutania. Le président et le secrétaire ont été auditionnés, des saisies sur l’ordinateur du président et une visite à son domicile effectuées. L’enquête sera classée deux mois et demi plus tard. Après une levée de boucliers des avocats et des associations de défense des détenus, les courriers et questionnaires sur les conditions de détention adressés aux détenus ont été remis à leurs destinataires.

La situation au centre pénitentiaire de Faa’a-nuutania ne s’est pas améliorée pour autant. Au 1er février 2013, les 54 places de la maison d’arrêt étaient occupées par 183 détenus (taux d’occupation de 338,9 %), tandis que le centre de détention présente un taux d’occupation de 215,3 %. Vétusté, promiscuité, problèmes d’hygiène, manque d’activité et de travail reviennent régulièrement dans les plaintes adressées à l’OIP. Le 21 janvier 2013, une lettre ouverte des femmes détenues alertait également sur leurs conditions de détention et la surpopulation de leur quartier. Le 27 février puis le 7 mars 2013, pour la première fois en Polynésie, l’État a été condamné par le tribunal administratif de Papeete à indemniser deux détenus en raison de l’indignité de leurs conditions de détention. Les requêtes des détenus adhérents de l’association Tamarri nuutania devraient suivre.

OIP, coordination régionale outre-mer