Par une décision du 7 janvier 2025, le tribunal administratif de Lyon a reconnu la responsabilité pour faute de l’État dans la mort d’Alexis Di Grazia, 27 ans, à la prison de Roanne. Le jeune homme était décédé d’une intoxication au monoxyde de carbone, le 18 juillet 2020, après avoir mis le feu à sa cellule pour protester contre ses conditions de détention.
Le tribunal relève qu’Alexis Di Grazia se trouvait alors à l’isolement malgré un certificat médical délivré dix jours plus tôt, attestant d’un état de santé incompatible et préconisant son hospitalisation. Il avait incendié sa cellule une première fois lors d’un passage au quartier disciplinaire, en janvier 2020, pour des « dégradations » et « insultes » envers le personnel. Une expertise diagnostique alors une « pathologie schizophrénique » chez le jeune homme, qui est déclaré pénalement irresponsable des faits reprochés et hospitalisé. Cela n’empêche pas l’administration de le sanctionner « à hauteur de 74 jours de cellule disciplinaire au cours de la séance du 2 mars ». La sanction est interrompue pendant l’hospitalisation d’Alexis Di Grazia, qui bénéficie d’une suspension de peine pour raison médicale entre avril et juin 2020. Mais dès son retour en prison, il est placé à l’isolement, l’administration invoquant ses antécédents et son « comportement imprévisible ». Et malgré l’expertise psychiatrique du 8 juillet, il s’y trouve toujours le jour de son décès.
Les juges concluent que « le fréquent placement à l’isolement [d’Alexis Di Grazia], pourtant incompatible avec son état de santé et alors qu’il avait déjà mis une première fois le feu à sa cellule pour protester contre ses conditions de détention quelques mois auparavant », constitue « une faute de l’administration pénitentiaire », tout comme « l’absence de surveillance renforcée dans un tel contexte, qui a conduit à une intervention tardive sur les lieux de l’incendie ». Ils soulignent que l’administration « n’a pas pris, compte tenu des informations dont elle disposait, en particulier quant à l’existence chez le détenu de troubles mentaux, d’actes d’agressions antérieurs, de signes de détresse physique ou psychologique, les mesures que l’on pouvait raisonnablement attendre de sa part pour prévenir son décès ». L’État est donc condamné à indemniser les parents, la grand-mère et le cousin du jeune homme.
Une procédure pénale est toujours en cours à l’encontre des surveillants qui, d’après les proches d’Alexis Di Grazia, auraient tardé à intervenir.
Par Johann Bihr
Ce texte est paru dans la revue de l’Observatoire international des prisons – DEDANS DEHORS n°126 – Surpopulation carcérale : les personnes détenues prennent la parole