L’accès au Pacs est un véritable parcours du combattant quand l’une des deux parties est en prison : c’est ce que rappellent de multiples sollicitations reçues à la permanence de l’OIP. En dépit du droit à une union légale, protégé par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.
Madame R. aura ainsi dû attendre quatorze mois, et l’intervention d’une avocate, pour débloquer sa demande de Pacs avec une personne détenue dans un centre pénitentiaire du sud-est de la France. Un officier de l’état-civil devait en effet se rendre sur place pour recueillir la signature de son conjoint*, mais ce déplacement était constamment reporté. La mairie expliquait être sollicitée par un grand nombre de personnes détenues, notamment pour des demandes de reconnaissance de paternité, qui nécessitent la délivrance d’un permis de communiquer par le tribunal. Les services de l’état-civil attendaient donc ces autorisations pour se rendre en détention, afin de procéder du même coup aux reconnaissances de paternité et aux auditions pour les Pacs et les mariages. À toutes fins utiles, ils ont fait savoir à Madame R. que l’union civile pouvait aussi être établie en faisant intervenir un notaire – une alternative qui a cependant un coût, là où les services de l’état-civil se déplacent gratuitement.
De leur côté, Madame V. et Monsieur G., tous deux incarcérés au centre de détention d’Orléans-Saran, sont confrontés à « une véritable cacophonie » : leur demande de Pacs est en attente depuis plus de six mois, un blocage pour lequel la mairie et le procureur de la République se renvoient la balle.
Quant à Madame A., incarcérée dans un centre de détention de la région centre-est, elle a vu sa demande d’union avec Monsieur L., détenu dans le même établissement, refusée catégoriquement par la mairie, qui jugeait que « sa demande [n’était] pas sérieuse ». En cause, une première demande de Pacs introduite un an plus tôt, et retirée quand elle et son partenaire avaient mis fin à leur relation. Deux courriers circonstanciés à la mairie n’y ont rien fait : « On ne change pas de partenaire comme de chemise ! » s’est exclamée une employée de mairie en réponse aux demandes d’explication de l’OIP. Ce n’est qu’après l’intervention de l’association et la saisine du Défenseur des droits que la mairie a fini par accepter de former le Pacs, début avril 2024.
Par Lia B. et Zoé M.
Cet article est paru dans la revue Dedans Dehors n°122 – mai 2024 : Isolement carcéral « je suis dans un tombeau »