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À Fleury-Mérogis, un enfant privé de voir sa mère en raison de son handicap

Depuis plus d’un an, un enfant autiste de cinq ans ne peut plus voir sa mère, détenue à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis. Les modalités de visites, modifiées en raison de la crise sanitaire, ne sont en effet pas adaptées à sa pathologie. Malgré une première intervention du juge administratif, la direction refuse d’adapter les conditions d’accueil du petit garçon à son handicap. Un nouveau recours a donc été déposé le 30 avril dernier.

Cela fait treize mois que Madame B, incarcérée à la maison d’arrêt des femmes de Fleury-Mérogis, n’a pas vu son fils, âgé de 5 ans, en raison des mesures de sécurité pour éviter la propagation de la Covid-19. En effet, le petit garçon souffre de troubles du spectre autistique. Il fait l’objet d’une mesure d’assistance éducative, prononcée en septembre 2019, qui fixe les droits de visite de sa mère à deux fois par mois, au parloir du relais parent-enfant (REP) en présence de son éducatrice. Mais depuis mai 2020, après deux mois de confinement strict, cet espace habituellement dédié aux visites médiatisées n’a pas été réouvert du fait des exigences sanitaires, et ce type de visites a lieu uniquement dans les parloirs avocat. Or, ces derniers sont inadaptés aux difficultés du fils de Madame B. « Le moindre changement dans les repères ainsi que la proximité physique provoquent chez lui une grande angoisse », confirme son éducatrice. Son avis est partagé par la juge des enfants chargée du suivi de la mesure d’assistance éducative.

Après sept mois de séparation imposée, Madame B. a sollicité la réouverture exceptionnelle des parloirs du REP auprès de la direction de Fleury-Mérogis. Celle-ci a opposé un refus, le 9 octobre, motivé par les impératifs sanitaires. Madame B. a donc alerté le Défenseur des droits, qui a tenté une conciliation avec l’établissement. Mais il lui a été signifié qu’« aucune exception ne serait faite ». Seule la mise en place d’un parloir en visiophonie a été proposée. Une solution illusoire, car « ce système […] n’est pas adapté à la pathologie de ce petit garçon, incapable de fixer son attention sur un écran, y compris devant un dessin animé », assure l’avocate de Madame B.

Madame B. a donc saisi, en février, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles. Celui-ci a suspendu, par une ordonnance du 2 mars, la décision de la direction de Fleury-Mérogis refusant à la requérante l’accès à la salle médiatisée avec son fils et son éducatrice, et a enjoint à l’administration de réexaminer la demande de Madame B. dans un délai de quinze jours. Mais plus d’un moins plus tard, la direction de Fleury-Mérogis a réaffirmé qu’aucune exception ne serait faite : « Les visites de l’enfant de Madame B. devront se dérouler en visiophonie ou dans la salle des parloirs avocat. » L’administration pénitentiaire motive sa décision en invoquant la nécessaire mobilisation de personnel pour ouvrir la salle médiatisée et les risques de propagation du virus si les mesures barrières ne sont pas respectées. À la proposition que Madame B. observe une période d’isolement après avoir vu son fils, comme cela est prévu pour les personnes détenues bénéficiant de permissions de sortir, l’établissement oppose un risque de déclassement et de désinscription des activités lié à des absences répétées. Enfin, elle soutient qu’une telle exception « créerait une situation de gestion inégale de la MAF ».

Un nouveau recours a été déposé le 30 avril auprès du juge des référés afin d’obtenir la suspension de cette dernière décision, et qu’il soit une nouvelle fois enjoint à l’établissement d’accorder l’accès à la salle habituellement dédiée aux visites médiatisées. Dénuée de la moindre considération pour le handicap du jeune garçon, l’opposition de la direction de Fleury-Mérogis porte non seulement atteinte à l’intérêt supérieur de l’enfant, protégé par l’article 3 de la Convention internationale des droits de l’enfant, mais aussi à celui de l’enfant en situation de handicap, protégé par l’article 7 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, selon lequel « dans toutes les décisions qui concernent les enfants handicapés, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale ». Et alors même qu’il incombe à l’administration pénitentiaire de mettre en œuvre des mesures adaptées pour aider les personnes détenues à maintenir le contact avec leur famille proche (1), cette décision crée manifestement pour Madame B. et son enfant une rupture aussi brutale que durable de leurs liens familiaux.

Contact presse : Pauline De Smet · 07 60 49 19 96

1. En vertu du droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme