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Conditions indignes de détention à la prison de Bois d’Arcy : l’État condamné à prendre des mesures en urgence

Saisi début avril d’une requête concernant l’indignité des conditions de détention de la prison de Bois d’Arcy, le tribunal administratif de Versailles a, dans une décision importante rendue ce 17 avril, rappelé l’administration à ses obligations et enjoint à l’État de prendre en urgence douze mesures pour préserver la sécurité et les droits fondamentaux des personnes détenues.

Dans une ordonnance en date du 17 avril 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a estimé que les conditions d’incarcération au sein du centre pénitentiaire de Bois d’Arcy exposent les personnes détenues à des traitements inhumains et dégradants et, plus grave encore, à une mise en danger de leur vie. Il avait été saisi le 3 avril dernier par l’Association des avocats pour la défense des droits des détenus (A3D), l’Observatoire international des prisons (OIP) et l’Ordre des avocats du barreau de Paris – soutenus par le Conseil national des barreaux, cinq barreaux d’Ile-de-France et trois associations d’avocats.

Pour rappel, dans des recommandations en urgence publiées au mois de décembre dernier, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) constatait « des conditions de détention indignes : surpopulation, désoeuvrement, entrave à l’accès aux soins, recours excessif aux mesures de contrôle et de contrainte, désorganisation générale de la détention »[1]. De façon tout à fait inédite, elle recommandait la suspension pure et simple des incarcérations « jusqu’à ce qu’une inspection générale de la justice confirme que la sécurité des détenus est assurée au regard des situations décrites ».

Dans sa décision, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a ordonné au préfet des Yvelines ainsi qu’au garde des Sceaux de mettre en œuvre pas moins de douze mesures destinées à agir contre l’indignité des conditions de détention au sein du centre pénitentiaire. Contrairement à son homologue lyonnais, le tribunal a explicitement reconnu la force probante des éléments produits par les requérants au soutien de leurs demandes, sans se laisser abuser par les arguments et pièces opposés par l’administration.

Il a ainsi reconnu que « l’établissement présente indéniablement une vulnérabilité importante aux risques incendies, tant à raison de sa conception que de ses modalités d’occupation, de la forte rotation des personnes pénitentiaires et de leur sous-effectif » et ce, en dépit des affirmations contraires de l’administration qui prétendait que l’établissement était en parfaite conformité avec les règles de sécurité incendie. Fort de ce constat, le juge a donc enjoint à l’administration de faire procéder à très bref délai à une nouvelle visite de la sous-commission incendie ou encore d’améliorer le système dit du « drapeau »[2] pour le signalement des incendies en cellule, afin qu’il soit concrètement efficace.

S’agissant de l’état des douches communes, dont les détenus n’ont de cesse de dénoncer l’insalubrité, le juge relève « l’exactitude des clichés produits par les requérants » et ce, après avoir souligné que l’état dégradé des douches ne ressortait pas des photographies produites par le ministère de la Justice. De la même manière, il questionne la valeur probante des documents produits par l’administration à propos du nettoyage des parties communes, affirmant que la communication d’une « simple » fiche de poste démontrant que sept personnels du service général nettoient deux fois par jour les cours de promenade ne saurait établir la réalité de la fréquence de ce nettoyage.

S’il relève à certains égards que l’administration a effectivement pris des mesures pour remédier aux désordres constatés par la CGLPL au cours de sa visite, notamment s’agissant des questions d’hygiène alimentaire, le juge des référés les estime insuffisantes et enjoint au préfet de faire diligenter une nouvelle visite de contrôle par l’inspecteur du secteur de la restauration collective afin de s’assurer de l’efficacité des mesures d’ores et déjà mises en œuvre par l’administration et de l’absence de tout risque sur le plan sanitaire.

Prenant pleinement mesure de son office, le juge constate la violation de la dignité des détenus et précise, dans son ordonnance, que les mesures prescrites devront être mises en œuvre dans un délai de dix jours. L’OIP, l’A3D et l’Ordre des avocats de Paris seront particulièrement vigilants quant à leur exécution.

Ce communiqué est co-signé par l’A3D, le barreau de Paris et l’Observatoire international des prisons (OIP)

Contact presse : Sophie Larouzée Deschamps – 07 60 49 19 96 – sophie.larouzeedeschamps@oip.org


[1] Recommandations en urgence relatives au centre pénitentiaire de Bois-d’Arcy (Yvelines), CGLPL, 16 déc. 2022
[2] En raison de l’absence de boutons d’appel d’urgence dans les cellules les détenus ont développé un système de « drapeau » qui consiste à glisser une feuille de papier à travers la fente de la porte pour attirer l’attention des surveillants.

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