La médecine générale

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Depuis la loi du 18 janvier 1994, la prise en charge sanitaire des personnes détenues dépend du service public hospitalier (articles 46 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 et L.6111-1-2, 2° du Code de la santé publique). Cette loi posait également comme principe que les personnes détenues doivent avoir accès à une qualité de soins équivalente à celle de l’ensemble de la population.

Pour chaque prison, le directeur de l’agence régionale de santé (ARS) désigne un ou plusieurs hôpitaux de proximité chargés de dispenser les soins courants aux personnes détenues, de participer à l’accueil et au traitement des urgences, ainsi que de coordonner les actions de prévention et d’éducation pour la santé (articles D.368 du Code de procédure pénale et R.6111-27 du Code de la santé publique).

Un protocole est signé entre la prison et la ou les structures hospitalières fixant les modalités d’intervention de l’établissement public de santé (articles D.369 du Code de procédure pénale et R.6111-29 du Code de la santé publique).

À titre dérogatoire, la prise en charge sanitaire des personnes détenues dans les prisons des collectivités d’outre-mer (Saint-Pierre-et-Miquelon, Polynésie française et Nouvelle-Calédonie) relève de la responsabilité du ministère de la Justice. En pratique, une convention est signée entre les services de l’administration pénitentiaire et l’hôpital local qui assure les soins.

Au sein des établissements pénitentiaires, les soins somatiques et psychiatriques sont dispensés par les unités sanitaires en milieu pénitentiaire (USMP) (Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice).

La structure hospitalière désignée est tenue de doter en équipement médical et non médical les locaux mis à disposition par l’administration pénitentiaire pour les consultations et examens médicaux en détention, et à en assurer leur maintenance (articles D.370 du Code de procédure pénale et R.6111-32 du Code de la santé publique). Ceux-ci doivent en principe répondre à des normes de superficie et à des règles d’hygiène mais en pratique ils sont souvent exigus et peu fonctionnels.

L’entretien des locaux est assuré par l’hôpital (qui peut faire appel à une entreprise de nettoyage extérieur ou à ses propres agents). Si le nettoyage des salles d’attente et des sanitaires de l’unité sanitaire est parfois assuré par des personnes détenues employées au service général, celles-ci ne sont pas censées intervenir au sein des parties médicales (article D.433-3 du Code de procédure pénale).

L’administration pénitentiaire doit également assurer aux personnes détenues un « hébergement, un accès à l’hygiène, une alimentation et une cohabitation propices à la prévention des affections physiologiques ou psychologiques » (article 46 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009). En pratique, cette exigence est loin d’être respectée dans de nombreux établissements pénitentiaires.

Elle décide enfin des adaptations et modifications du régime pénitentiaire rendues nécessaires par l’état de santé des personnes (comme un transfert dans un autre établissement pénitentiaire pour des raisons de santé, par exemple).

Depuis 2012, l’organisation des soins somatiques et psychiatriques repose sur trois niveaux d’intervention (Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice) :

  • Le niveau 1 concerne les soins ambulatoires dispensés en détention par l’unité sanitaire en milieu pénitentiaire (USMP).

Dans cette unité, sont assurés les consultations et examens ne nécessitant pas d’hospitalisation et relevant de la médecine générale ou de la psychiatrie, mais également les soins dentaires, certaines consultations spécialisées, la réalisation des examens de laboratoire et de radiologie nécessaires au diagnostic, ainsi que la fourniture des appareillages, prothèses, médicaments et autres produits pharmaceutiques.

Toutefois, dans 26 établissements pénitentiaires français, les soins psychiques sont dispensés au sein de Services médico-psychologiques régionaux (SMPR).

  • Le niveau 2 concerne les soins nécessitant une hospitalisation courte ou à temps partiel.

Les soins somatiques sont réalisés dans le service hospitalier correspondant à la spécialité requise de l’hôpital de rattachement ou, lorsque cela le justifie, en chambre sécurisée avec garde statique.

Les soins psychiatriques ont lieu en hospitalisation de jour au sein des SMPR (donc en détention, mais en cellules dédiées). Pendant la durée de la prise en charge, le soin prime de manière temporaire sur les autres aspects de la détention.

  • Le niveau 3 concerne les soins requérant une hospitalisation à temps complet.

Ces soins sont délivrés en établissements de santé, et sont décidés lorsque l’hospitalisation de niveau 2 ne peut proposer une prise en charge suffisante eu égard à l’état de santé du patient.

Les soins somatiques sont en principe dispensés en « unité hospitalière sécurisée interrégionale » (UHSI) ou à l’établissement pénitentiaire de santé national de Fresnes (EPSNF). Exceptionnellement, ils peuvent toutefois avoir lieu à hôpital de rattachement (en chambre sécurisée).

Les soins psychiatriques sont prodigués en unité hospitalière spécialement aménagée (UHSA), en unité pour malades difficiles (UMD) ou au sein d’un établissement de santé autorisé en psychiatrie (article L.3222-1 du Code de la santé publique).

L’hôpital de rattachement constitue une équipe pluridisciplinaire chargée de dispenser les soins aux personnes détenues au sein de l’unité sanitaire.

L’équipe est composée de personnels hospitaliers médicaux et non médicaux habilités à exercer en milieu carcéral : médecins généralistes, médecins spécialistes (dermatologues, dentistes, etc.), pharmaciens, infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, personnels administratifs, etc.

Lorsque l’établissement pénitentiaire ne dispose pas d’un service médico-psychologique régional (SMPR), elle doit également comprendre un ou plusieurs médecins psychiatres et/ou psychologues.

Le nombre de personnels hospitaliers et leur temps de présence varient selon la taille de la prison, mais aussi en fonction des moyens alloués par l’hôpital de proximité et du manque de praticiens dans certaines disciplines et dans certaines régions.

L’unité sanitaire est placée sous l’autorité hiérarchique d’un praticien hospitalier, lui-même placé sous la responsabilité d’un chef de pôle de l’hôpital de rattachement (article D.368 du Code de procédure pénale et Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019). Le personnel paramédical (infirmiers, kiné) est quant à lui placé sous la responsabilité d’un cadre de santé.

Les médecins « assurent les consultations nécessaires au suivi des personnes détenues », soit à leur demande, soit après orientation par le personnel pénitentiaire, les services éducatifs de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) ou toute autre personnes agissant dans son intérêt (article R.57-8-1 du Code de procédure pénale et Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019).

Le personnel infirmier recueille les informations permettant de connaître l’état de santé des personnes et participe aux actions d’éducation pour la santé. Il agit également sur prescription médicale pour les actes et activités visant à restaurer la santé: réfection de pansement, réalisation des prises de sang, des vaccins ou encore des électrocardiogrammes, distribution des médicaments, etc. (article D.383 du Code de procédure pénale et Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019). En cas d’urgence et en l’absence du médecin, le personnel infirmier accomplit les actes nécessaires préalablement définis par le médecin responsable.

Des personnels pénitentiaires sont également présents au sein de l’unité sanitaire, chargés d’assurer « la sécurité des personnes concourant aux missions de santé dans l’enceinte de l’établissement pénitentiaire » (article D.373 du Code de procédure pénale). Après avis du médecin responsable, ils sont affectés sur décision du chef d’établissement, de l’autorité duquel ils dépendent.

Concrètement, ils organisent et contrôlent les mouvements des personnes détenues qui se rendent au service médical ou qui en sortent, ils accompagnent le personnel infirmier lors de la distribution des médicaments en détention ou encore alertent le personnel soignant en cas de nécessité urgente de recevoir un détenu. Cela étant, l’ensemble des consultations médicales doivent se dérouler en principe « hors la présence du personnel pénitentiaire » (Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019). Leur intervention ne peut ainsi enfreindre en principe le « droit au secret médical des personnes détenues ainsi que le secret de la consultation » (article 45 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009).

La procédure pour obtenir une consultation varie selon les établissements pénitentiaires.

Dans la plupart des cas, une boîte aux lettres dont seuls les personnels soignants détiennent la clef est placée dans un espace accessible aux personnes détenues lors de leurs mouvements au sein de l’établissement. Elles peuvent y déposer elles-mêmes leur courrier sous pli fermé, ou demander à un codétenu ou un surveillant de le faire. Dans ce courrier, il est conseillé d’expliquer brièvement son problème de santé pour faciliter l’échange avec l’équipe médicale. Le personnel pénitentiaire peut également transmettre à l’unité sanitaire une demande de consultation écrite ou orale, voire le faire via l’application Genesis en veillant toutefois à la garantie du secret médical (Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019).

Les demandes de consultation sont réceptionnées et examinées par le secrétariat de l’unité sanitaire, qui se charge de programmer les rendez-vous médicaux. En principe, la personne détenue est informée par écrit du jour et de l’heure de la consultation.

Le secrétariat médical remet enfin au surveillant de l’unité sanitaire, chaque jour, la liste des rendez-vous prévus pour le lendemain.

Les délais d’attente pour une consultation peuvent être longs, particulièrement pour les soins spécialisés.

Seules les personnes détenues bénéficiant d’un placement à l’extérieur sans surveillance, d’une semi-liberté ou d’une permission de sortir peuvent choisir librement leur médecin à l’extérieur (article D.365 du Code de procédure pénale).

Les autres sont nécessairement soignés par le médecin présent le jour de la consultation. Dans le cas où plusieurs médecins exercent, la personne détenue peut cependant demander à être suivie par l’un plutôt que par l’autre.

Exceptionnellement, le directeur interrégional des services pénitentiaires territorialement compétent peut autoriser une personne à être soignée par un médecin de son choix n’exerçant pas dans l’établissement pénitentiaire. Mais le détenu doit alors assumer lui-même les éventuels dépassements d’honoraires (article D.365 du Code de procédure pénale).

Si, pour les personnes détenues, le médecin de l’unité sanitaire devient automatiquement le médecin traitant, elles conservent la possibilité de correspondre avec leur médecin habituel qui peut se mettre en relation avec le service de l’unité (Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019).

La correspondance échangée entre un détenu et son médecin habituel n’est en revanche pas couverte par le secret de la correspondance, si bien que les courriers sont ouverts et susceptibles d’être lus.

Un examen médical « systématique » doit avoir lieu « dans les plus brefs délais » après l’arrivée en prison (article R57-8-1 du Code de procédure pénale, article 3 du règlement intérieur type des établissements pénitentiaires annexé à l’article R.57-6-18 du Code de procédure pénale et article R. 6111-32 du Code de la santé publique). En pratique, elle intervient le plus souvent dans la semaine qui suit l’entrée en détention. Si, à son arrivée, l’état d’une personne semble justifier une prise en charge médicale urgente, le personnel pénitentiaire doit en référer au gradé de permanence afin qu’il contacte l’équipe médicale.

L’objectif de cette visite, qui doit avoir lieu avec le consentement de la personne détenue, est d’assurer la continuité des soins en cas de traitement antérieur, de déceler toute affection contagieuse ou évolutive nécessitant des mesures d’isolement ou des soins urgents ou encore d’identifier les personnes présentant une addiction en vue de prendre « toute mesure thérapeutique appropriée » (Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019). Cette première visite doit aussi permettre de repérer un éventuel risque suicidaire.

De plus, un dépistage bucco-dentaire doit être proposé par l’unité sanitaire lors du bilan médical d’entrée (instruction NOR : ETSP1115156J du 29 août 2011 relative à la réalisation d’un examen bucco-dentaire des personnes détenues lors de leur arrivée en établissement pénitentiaire et à la réduction du risque infectieux associé aux soins dentaires et Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019).

La visite d’entrée est également l’occasion de pratiquer un véritable bilan de santé, de contrôler l’état vaccinal, de proposer une consultation spécialisée, notamment si des troubles psychologiques, des problèmes d’alcoolisme ou de toxicomanie sont dépistés. En pratique toutefois, le choc de l’incarcération rend la visite médicale d’entrée complexe, ce qui peut expliquer qu’elle soit parfois réalisée de façon très sommaire, l’essentiel du bilan étant reporté à une consultation ultérieure.

Pour les mineurs, cette visite doit par ailleurs conduire l’unité sanitaire à se prononcer sur leur capacité à pratiquer une activité physique et sportive, et à leur délivrer un avis d’aptitude ou d’inaptitude aux activités d’insertion proposées au sein de l’établissement (circulaire NOR :SJSP0830413C du 13 mai 2008 relative à la prise en charge sanitaire des mineurs incarcérés).

Il est à noter que l’examen d’entrée n’est pas obligatoire en cas de transfert d’une personne détenue. Cependant, « toutes mesures doivent être prises pour assurer la continuité des soins » déjà entamés, sur la base des informations médicales transmises par l’unité sanitaire précédemment compétente (Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019).

D’une manière générale, les consultations médicales ayant lieu au sein de la prison doivent se dérouler en l’absence de personnel pénitentiaire afin que soit respectée la confidentialité des soins (Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019). En pratique toutefois, les locaux et la présence permanente de personnels pénitentiaires à proximité ne permettent pas toujours de garantir cette confidentialité et le respect du secret médical (salles trop petites, bureaux mal insonorisés, etc.).

De plus, les mesures prises pour assurer la sécurité (comme par exemple des mesures de surveillance) doivent également être mises en œuvre dans le respect de la confidentialité de l’examen médical.

Lorsque le patient détenu ne parle pas le français, le recours à un interprète professionnel est possible. Mais, faute de convention conclue entre l’établissement de santé de rattachement et un organisme d’interprétariat, il est le plus souvent fait appel à un codétenu ou à un personnel pénitentiaire.

Des consultations spécialisées régulières ou ponctuelles sont organisées au sein de l’unité sanitaire. Les consultations les plus fréquentes ont lieu en ophtalmologie, chirurgie dentaire, dermatologie, maladies infectieuses (VIH, hépatites), addictologie, ORL, pneumologie, cardiologie, gynécologie obstétrique, gastro-entérologie et kinésithérapie.

Néanmoins, l’accès aux soins spécialisés reste de manière générale difficile en détention, avec des délais d’attente importants. Le manque de consultations de chirurgiens-dentistes est particulièrement criant, alors que les besoins de la population détenue en la matière sont élevés.

La feuille de route « Santé des personnes placées sous main de justice 2019-2022 » se fixe entre autres pour objectif de « lutter contre tout retard à la prise en charge » médicale, notamment par le développement de la télémédecine. Ce dispositif, déjà prévu par le plan d’action stratégique 2010-2014, permettrait de diversifier l’offre de soin en réalisant à distance des actes médicaux, et de limiter au possible le recours aux extractions. Il suppose toutefois que les unités soient équipées de système informatisé spécifique, ce qui en pratique n’est pas le cas pour une bonne partie des unités. Seules quelques unités disposent des équipements nécessaires permettant de réaliser certains actes comme la lecture des radios (téléradiologie) ou d’assurer des téléconsultations. Par ailleurs, il est important que ce dispositif ne se substitue pas à une consultation clinique, chaque fois qu’il en est besoin.

Lorsque les consultations ne peuvent être réalisées dans les locaux de l’unité sanitaire, la personne détenue doit être extraite et transportée à l’hôpital, ce qui entraîne souvent des délais déraisonnables pour l’accès aux soins, du fait des problèmes d’escorte notamment.

Pour pallier ces difficultés, le Code de procédure pénale prévoit la possibilité de permissions de sortir pour « présentation à une structure de soins » (article D.143-4 du Code de procédure pénale). Mais très peu de demandes sont formulées en ce sens, et ce type de permission reste rarement accordé.

Toute personne incarcérée peut bénéficier des soins dispensés par l’unité sanitaire, peu importe son régime de détention. En revanche, il n’appartient pas au médecin de se prononcer sur la décision de placement, qui n’est pas conditionnée à un examen médical (Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019).

Les personnes détenues en quartier disciplinaire ou en confinement en cellule individuelle ordinaire doivent bénéficier d’une consultation médicale, sur place, au minimum deux fois par semaine (et aussi souvent que le médecin l’estime nécessaire). La liste des personnes détenues sous ces deux régimes doit être communiquée chaque jour à l’unité sanitaire (articles R.57-7-31 et R.57-8-1 du code de procédure pénale et circulaire NOR : JUSK1140024C du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures).

Dans le respect du secret médical et sous l’accord ou à la demande du médecin, les visites peuvent se dérouler en présence du personnel pénitentiaire. Celui-ci est de plus chargé de signaler à l’unité sanitaire toute personne détenue dont l’état de santé est considéré préoccupant (Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019).

Le médecin a la faculté d’émettre un avis médical lorsqu’il estime que le placement au quartier disciplinaire ou en confinement est de nature à compromettre la santé de la personne détenue. Ce certificat, transmis au chef d’établissement, a pour conséquence la suspension de la sanction ou du placement préventif (article R.57-7-31 du code de procédure pénale).

Les personnes détenues à l’isolement bénéficient des mêmes dispositions (articles R.57-7-63 et R.57-8-1 du Code de procédure pénale). Toutefois, à la différence des certificats d’incompatibilité avec le placement en quartier disciplinaire ou en confinement, les avis médicaux sur l’opportunité de mettre fin à l’isolement ne lient pas l’administration. Celle-ci doit simplement tenir compte de l’avis du médecin et « rechercher d’éventuelles solutions d’aménagement de la mesure » (circulaire NOR : JUSK1140023C du 14 avril 2011 relative au placement à l’isolement des personnes détenues).

De la même façon, lorsque le chef d’établissement envisage une prolongation de l’isolement, il est tenu de solliciter l’avis écrit du médecin (article R.57-7-64 du Code de procédure pénale). Cet avis, transmis au directeur interrégional des services pénitentiaires (pour les prolongations au-delà de six mois) ou au ministre de la justice (au-delà d’un an)  n’a pas de valeur contraignante.

S’agissant des mineurs, le placement en quartier disciplinaire ou en confinement ne peut interrompre la continuité de l’intervention éducative de la PJJ et les relations avec le service médical (circulaire NOR : JUSK1340024C du 24 mai 2013 relative au régime de détention des mineurs). Ils ne peuvent en revanche pas être placés à l’isolement.

Comme tout patient, la personne détenue doit exprimer son consentement libre et éclairé avant un acte médical ou un traitement (article D.362 du Code de procédure pénale et article L.1111-4 du Code de la santé publique).

Cela suppose tout d’abord qu’elle ait été clairement informée des « différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu’ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus » (article L.1111-2 du Code de la santé publique). En aucun cas, le secret médical ne saurait être opposé au patient lui-même.

Dès lors qu’il a précisément informé son patient des « conséquences de ses choix » et tout mis en œuvre « pour le convaincre d’accepter les soins indispensables », le médecin est tenu de respecter la volonté de la personne détenue malade, y compris si celle-ci refuse des soins ou un traitement mettant sa vie en danger (article L.1111-4 du Code de la santé publique).

La personne détenue a la possibilité de désigner une personne de confiance, qui peut être un parent, un proche ou le médecin traitant (article L.1111-6 du Code de la santé publique). En cas dhospitalisation et si le patient est hors d’état d’exprimer son consentement et de recevoir l’information nécessaire, le médecin, sauf cas d’urgence ou d’impossibilité, est en principe tenu de consulter cette personne de confiance avant de prendre toute décision, et de lui transmettre les informations qui lui sont nécessaires pour donner son avis (article L.1111-4 du Code de la santé publique).

Cependant, ces obligations ne sont pas opposables en cas d’impossibilité d’informer ou de recueillir le consentement du patient en raison de son état de santé (inconscience, délire, etc.) ou en cas d’urgence vitale (Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019).

Si une personne se livre à une grève de la faim prolongée, elle ne peut être traitée sans son consentement, sauf lorsque son état de santé s’altère gravement et seulement sur décision et sous surveillance médicale (article D.364 du Code de procédure pénale).

S’agissant des mineurs ou des majeurs sous tutelle, l’information doit être délivrée aux titulaires de l’autorité parentale ou aux tuteurs. Le mineur ou le majeur sous tutelle disposent toutefois du droit de recevoir également des informations sur les actes et examens nécessaires à la prise en charge de leur état de santé. Les informations délivrées doivent être adaptées à leur degré de maturité ou à leurs facultés de discernement. Le consentement du mineur ou du majeur sous tutelle, doit être demandé au détenteur de l’autorité parentale ou au tuteur. Celui du mineur ou du majeur sous tutelle doit tout de même être systématiquement recherché s’il est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision (article L.1111-4 du Code de la santé publique).

Lorsque le refus du représentant légal menace gravement la santé ou l’intégrité corporelle du mineur ou du majeur sous tutelle, ou lorsqu’il est impossible de recueillir son consentement, le médecin délivre les soins indispensables.

Enfin, si le mineur s’oppose à la consultation de son représentant légal afin de garder secret son état de santé, le médecin peut mettre en œuvre le traitement ou l’intervention sans avoir obtenu le consentement préalable du représentant légal dès lors que celui-ci s’impose pour sauvegarder sa santé. Dans ce cas, le médecin doit s’efforcer de recueillir le consentement du mineur. En cas de persistance du refus, le médecin peut mettre en œuvre le traitement ou l’intervention à la condition que le mineur soit accompagné d’une personne majeure de son choix (article L.1111-5 du Code de la santé publique).

Un dossier médical est constitué dès l’arrivée d’une personne détenue en établissement pénitentiaire. Ce dossier doit permettre le suivi tout au long de l’incarcération, peu importe la durée et les lieux successifs de détention (Guide méthodologique relatif à la prise en charge des personnes placées sous main de justice, 2019).

Les informations contenues dans ce dossier, mais également leur accessibilité, leur partage et leur conservation sont régies par les modalités de droit commun qui s’appliquent à l’extérieur (articles L.1111-7, R.1111-1 à R.1111-7 et R.1112-1 à R.1112-9 du Code de la santé publique).

Les données collectées sont « notamment des résultats d’examen, comptes rendus de consultation, d’intervention, d’exploration ou d’hospitalisation, des protocoles et prescriptions thérapeutiques mis en œuvre, feuilles de surveillance, correspondances entre professionnels de santé […] » (articles L.1111-7, 1° et R.1112-2 du Code de la santé publique). Sont aussi recueillies les informations relatives à l’identité du patient et, le cas échéant, de la personne de confiance désignée (article R.1112-2 du Code de la santé publique).

Lors du transfert d’une personne détenue vers un autre établissement pénitentiaire, la copie du dossier médical est transmise au médecin responsable de l’unité sanitaire du nouvel établissement. Il en est de même en cas d’extraction ou transfèrement vers un établissement de santé (Guide méthodologique relatif à la prise en charge des personnes placées sous main de justice, 2019).

À sa libération, une lettre de liaison rédigée par le médecin de l’unité sanitaire et contenant les informations médicales nécessaires à la continuité des soins est remise à la personne détenue et, le cas échéant, à son médecin traitant (article R.1112-1-2 du Code de la santé publique).

À l’instar de tout patient, la personne détenue bénéficie d’un droit d’accès à son dossier médical et aux informations de santé la concernant (articles L.1111-7, 1° et R.1111-1 du Code de la santé publique). Ces informations lui sont remises personnellement ou, si elle en fait la demande, au médecin désigné par ses soins, dans un délai de huit jours. Ce délai peut être porté à deux mois lorsque les informations médicales datent de plus de cinq ans, ou lorsqu’est saisie la commission départementale des soins psychiatriques (article L.1111-7, 2° du Code de la santé publique). Si la personne fait le choix d’être assistée par un médecin, celui-ci devra solliciter un permis de visite auprès du chef d’établissement ou du magistrat chargé du dossier de l’information pour les prévenus (article 49, 4° de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009). Elle ne pourra en revanche se voir remettre une copie du dossier médical par le médecin lors de sa visite (circulaire NOR : JUSK11400029C du 20 février 2012 relative au maintien des liens extérieurs des personnes détenues par les visites et l’envoi ou la réception d’objets).

Les mineurs et les majeurs protégés peuvent également demander l’accès à leur dossier médical par le biais du titulaire de l’autorité parentale ou de la personne en charge de l’exercice de la mesure (article R.1111-1 du Code de la santé publique). Par ailleurs, le mineur peut demander à ce que les données médicales le concernant soient transmises au détenteur de l’autorité parentale par l’intermédiaire d’un médecin désigné par ce dernier (article L.1111-7, 5° du Code de la santé publique).

Néanmoins, s’il décide de ne pas divulguer au titulaire de l’autorité parentale l’existence d’un traitement, d’une action de prévention, d’un diagnostic ou d’une intervention malgré des efforts visant à obtenir son consentement, l’unité sanitaire se verra dans l’obligation de respecter le vœu de silence du mineur (article R.1111-6 du Code de la santé publique).

Le régime de prise en charge médicale des personnes détenues est sujet aux règles de droit commun en matière de secret médical (article L.1110-4 du Code de la santé publique).

Le dossier médical est placé sous la responsabilité exclusive de l’établissement de santé de tutelle, et est conservé par l’unité sanitaire qui seule peut y avoir accès (article D.375 du Code de procédure pénale). Cela signifie qu’en vertu de la confidentialité des données et du secret médical, le personnel pénitentiaire ne peut aucunement le consulter (article L.1110-4 du Code de la santé publique).

En dehors de l’équipe de soins, le partage d’informations nécessaires à la prise en charge médicale du patient détenu requiert son consentement préalable. Ce dernier dispose ainsi d’un droit d’opposition à l’échange d’informations le concernant. Ce droit d’opposition connait toutefois trois exceptions : à l’occasion d’une mission d’inspection (article L.1112-1 du Code de la santé publique), sur réquisition judiciaire et lorsque l’urgence le justifie (Guide méthodologique relatif à la prise en charge des personnes placées sous main de justice, 2019).

Lors d’un transfert, d’une extraction ou d’un transfèrement vers un établissement de santé d’une personne détenue, tout moyen doit être mis en œuvre pour garantir la stricte confidentialité des données. Les professionnels de santé peuvent ainsi communiquer avec d’autres professionnels sur le suivi médical de l’intéressé, « à condition que ceux-ci y participent et que les informations concernées soient strictement nécessaires à la coordination, à la continuité des soins et au suivi du patient » (Guide méthodologique relatif à la prise en charge des personnes placées sous main de justice, 2019).

En cas de décès du patient détenu et sauf volonté contraire exprimée par ce dernier de son vivant, le médecin de l’unité sanitaire ne peut divulguer le contenu du dossier médical à un tiers, quel qu’il soit (article L.1110-4 du Code de la santé publique). L’ayant droit, le concubin ou le partenaire de la personne décédée souhaitant accéder à son dossier médical devra en formuler la demande expressément, et tout refus apporté à cette demande devra être motivé (article R.1111-7 du Code de la santé publique).

Enfin, suite à au transfert, au transfèrement, à la libération ou au décès d’un patient détenu, son dossier médical est conservé pour une durée maximale de vingt ans (article R.1112-7 du Code de la santé publique). Les dossiers doivent être conservés dans des conditions qui garantissent leur confidentialité et leur intégrité (Guide méthodologique relatif à la prise en charge des personnes placées sous main de justice, 2019).

Depuis la loi du 18 janvier 1994 relative à la santé publique et à la protection sociale, les pharmacies à usage intérieur (PUI) « répondent aux besoins pharmaceutiques des personnes prises en charge par l’établissement, service ou organisme dont elles relèvent […] » (article L.5126-1 du Code de la santé publique). Par conséquence, les personnes détenues bénéficient des services de la PUI de l’hôpital de rattachement (article L.5126-6, 6° du Code de la santé publique).

Pour la plupart des établissements pénitentiaires, la pharmacie est située au sein de l’hôpital de proximité. Néanmoins, lorsque l’établissement pénitentiaire ne peut être desservi quotidiennement par la pharmacie de l’hôpital de rattachement, celle-ci doit disposer de locaux situés au sein de l’unité sanitaire en détention (article R.5126-24 du Code de la santé publique). En pratique, dans les prisons de grande taille, une pharmacie est implantée au service médical et gérée par une équipe pharmaceutique (pharmacien et préparateurs en pharmacie). Dans tous les cas, les unités sanitaires sont équipées d’une armoire à pharmacie contenant des médicaments de base.

Les prescriptions faites aux patients détenus obéissent aux règles de droit commun de la prescription (article R.5132-3 du Code de la santé publique). Elles relèvent de la seule responsabilité du personnel médical de l’unité sanitaire (médecins généralistes ou spécialistes, chirurgiens-dentistes, psychiatres, etc.), en référence à la liste des médicaments préconisés au sein de l’hôpital de rattachement. Cela signifie que le médecin n’est pas lié par une prescription faite antérieurement à l’incarcération, et peut décider d’interrompre un traitement médicamenteux.

Par ailleurs, à l’exception de certains petits appareillages médicaux (comme par exemple des lunettes de vue ou des appareillages dentaires ou auditifs), il n’est pas possible de se faire apporter des médicaments par le biais des parloirs ou par l’achat en cantine (article 14 du règlement intérieur type des établissements pénitentiaires annexé à l’article R.57-6-18 du Code de procédure pénale et circulaire NOR : JUSK11400029C du 20 février 2012 relative au maintien des liens extérieurs des personnes détenues par les visites et l’envoi ou la réception d’objets).

De la même façon, les médicaments possédés par les personnes détenues à leur arrivée leur sont retirés et restitués à leur libération. Toutefois, dans un souci de continuité des soins et avec l’accord du patient, l’unité sanitaire peut être amenée à lui administrer ces médicaments jusqu’à que la pharmacie soit en mesure de les fournir.

Le médecin remet au patient-détenu un double de sa prescription, indiquant la nature du traitement, sa posologie, sa durée et ses modalités d’administration. La conservation de médicaments en cellule est donc en principe possible, mais la personne détenue doit être en mesure d’en justifier la possession en présentant cette prescription médicale (article 14 du règlement intérieur type des établissements pénitentiaires annexé à l’article R.57-6-18 du Code de procédure pénale). En revanche, le stockage de médicaments en cellule et le trafic sont strictement interdits et peuvent faire l’objet de poursuites disciplinaires (article R.57-7-2, 8° du Code de procédure pénale). En cas de fouille de cellule, et si le personnel pénitentiaire constate une anomalie dans le stockage des médicaments (quantité très importante, médicaments en vrac, dissimulés, etc.), les médicaments peuvent être retirés. Le surveillant doit en informer aussitôt l’unité sanitaire et lui remettre les médicaments retirés dans les plus brefs délais.

La distribution des médicaments est assurée par le personnel médical (un infirmier ou un médecin), soit dans les locaux de l’unité sanitaire (tel est souvent le cas des traitements de substitution pour les personnes usagères de drogues ou des trithérapies pour les personnes vivant avec le VIH), soit à la porte des cellules, y compris des quartiers disciplinaire et d’isolement.

Pour la distribution des médicaments dans les cellules, l’infirmier est accompagné d’un surveillant (Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019). Afin de préserver le secret médical, certaines unités sanitaires choisissent de distribuer les médicaments sous une forme banalisée, c’est-à-dire sans leur boîte d’emballage. Dans certains cas, les médicaments doivent être absorbés devant l’infirmier qui les distribue.

Chaque fois que le médecin estime que le détenu est capable de gérer seul son traitement, les médicaments lui sont délivrés pour plusieurs jours. Pour des « raisons d’ordre et de sécurité » (trafic, racket, etc.), le chef d’établissement peut néanmoins interdire au détenu de garder des médicaments à sa disposition dans sa cellule (article 14 du règlement intérieur type des établissements pénitentiaires annexé à l’article R.57-6-18 du Code de procédure pénale). Dans ce cas, il doit prendre une décision individuelle motivée et en informer le médecin responsable de l’unité sanitaire.

Le service médical doit en principe assurer aux personnes détenues la continuité des traitements, y compris lorsqu’elles sortent dans le cadre d’une permission de sortir ou en fin de peine, ce qui n’est pas toujours le cas en pratique, notamment quand les soignants n’ont pas été avertis de la libération ou de la sortie de leur patient.

Malgré l’obligation de permanence des soins imposée par la loi (article 46 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009), les unités sanitaires ne prévoient pas de permanence médicale en dehors de leurs heures d’ouverture, à l’exception de certains grands établissements pénitentiaires.

Lorsque l’unité sanitaire de l’établissement est fermée, à savoir le plus souvent entre 18 heures et 8 heures du matin ainsi que le week-end (en totalité ou partie), il appartient au surveillant gradé de permanence d’appliquer les directives prévues par le protocole signé avec l’hôpital de proximité.

Quand le pronostic vital est engagé ou lorsqu’une intervention immédiate, tant somatique que psychiatrique, est nécessaire, il est prévu que le gradé contacte le centre de réception et de régulation des appels (CRRE) du SAMU-Centre 15 (Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019).

Les personnels pénitentiaires de permanence sont censés intervenir soit à la demande de la personne détenue, soit de leur propre initiative, soit à la suite d’une alerte donnée par toute autre personne (codétenu, intervenant, etc.).

La personne détenue doit en principe avoir la possibilité d’être mise en relation téléphonique directe avec le médecin régulateur du SAMU-Centre 15, dans le respect du secret médical, afin qu’il évalue le niveau d’urgence et envoie sur place l’intervenant qu’il juge le plus compétent (SAMU, pompiers, médecin d’astreinte, médecin de ville) ou décide d’une hospitalisation (Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019).

Lorsque le médecin régulateur estime que le patient doit être hospitalisé, il décide du moyen de transport le plus adapté, sachant que l’extraction sera néanmoins effectuée sous escorte.

Un tel dispositif n’organise que la prise en charge des interventions urgentes, les autres consultations étant renvoyées aux heures d’ouverture de l’unité. Par ailleurs, les interventions de nuit pour urgence médicale sont souvent compliquées par l’effectif restreint de surveillants, l’espacement des rondes et le fait que seul le surveillant gradé détient la clé des cellules. Les délais d’intervention des services d’urgence sont ainsi considérablement allongés lorsqu’il est nécessaire de contacter le gradé à son domicile pour ouvrir une cellule.

À la demande des personnes détenues, des autorités administratives ou de sa propre initiative, le médecin de l’unité sanitaire est habilité à établir des attestations ou des certificats médicaux.

Il peut s’agir de documents indispensables pour bénéficier des avantages reconnus par la Sécurité sociale, notamment ceux prévus par la législation sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (article D.382 du Code de procédure pénale). Mais aussi d’attestations relatives à une inaptitude temporaire ou permanente à exercer une activité de travail ou sportive (article R.57-8-1 du Code de procédure pénale). Le médecin est également compétent pour délivrer « un avis d’aptitude ou d’inaptitude au suivi des activités d’insertion en place dans l’établissement pénitentiaire » (circulaire NOR : SJSP0830413C du 13 mai 2008 relative à la prise en charge sanitaire des mineurs incarcérés).

De plus, le médecin est tenu de procéder à l’examen des personnes détenues sollicitant, pour raison médicale, un changement, une modification ou un aménagement quelconque de leur régime de détention  (article R.57-8-1 du Code de procédure pénale).

Si la personne détenue est victime de coups et blessures, elle peut également demander au médecin de lui fournir un certificat qui doit préciser la durée de l’incapacité totale de travail (ITT), indispensable pour déterminer le tribunal compétent (annexe à l’article R.4127-76 du Code de la santé publique).

Depuis une loi du 27 mars 2012, les personnes condamnées à une infraction pour laquelle un suivi socio-judiciaire est encouru et qui ont fait l’objet d’une proposition par le juge de l’application des peines de « suivre un traitement pendant la durée de [leur] détention » doivent également se voir remettre par le soignant, des attestations de « suivi du traitement » que le détenu pourra remettre au juge, afin que celui-ci puisse se prononcer sur un éventuel retrait de réductions de peine, sur l’octroi de réductions de peine supplémentaires ou d’une libération conditionnelle (article 717-1 du Code de procédure pénale). Ces attestations ne doivent néanmoins comporter aucune indication sur le contenu du suivi thérapeutique, les propos tenus par le patient ou son état général.

Enfin, en cas d’urgence et de pronostic vital engagé, le médecin responsable de l’unité sanitaire établit un certificat médical à l’appui d’une demande de suspension de peine pour raisons médicales (voir « Dispositifs de mise en liberté pour raison médicale »).

Aux termes du Code de procédure pénale, le médecin peut aviser le chef d’établissement par écrit ou par oral s’il estime « que l’état de santé d’un détenu n’est pas compatible avec un maintien en détention ou avec le régime pénitentiaire qui lui est appliqué » (article D.382 du Code de procédure pénale). Ce dernier en informe, s’il y a lieu, l’autorité judiciaire compétente (juge d’instruction ou juge de l’application des peines).

Le médecin doit également délivrer aux autorités pénitentiaires des « attestations écrites contenant les renseignements strictement nécessaires à l’orientation du détenu ainsi qu’aux modifications ou aux aménagements du régime pénitentiaire que pourrait justifier son état de santé ». Dans ces deux hypothèses, il est prévu que le médecin informe la personne détenue et qu’un double de ces documents lui soit remis si elle en fait la demande (article D.382 du Code de procédure pénale).

Dans tous les cas, les certificats et attestations ne doivent mentionner que les indications « strictement nécessaires » à une adaptation du régime de détention, à l’exclusion de tout élément de diagnostic. Tel est également le cas si un patient est atteint d’une maladie contagieuse nécessitant son isolement : c’est le médecin qui doit mettre en œuvre les mesures nécessaires, en lien « avec le médecin de prévention chargé d’assurer l’hygiène et la prévention auprès des différents personnels intervenant dans l’établissement pénitentiaire ». Il devra en aviser le chef d’établissement, mais si des informations doivent être transmises à des personnels, seules celles qui sont « strictement nécessaires pour faire face à la situation » peuvent être communiquées (Guide méthodologique relatif à la prise en charge des personnes placées sous main de justice, 2019).

Lorsque les soins nécessaires ne peuvent être dispensés en détention (en raison par exemple de l’absence de consultations spécialisées ou d’un plateau technique insuffisant), la personne détenue est extraite et prise en charge à l’hôpital (articles D.391 à D.399 du Code de procédure pénale, articles L.3214-1 à L.3214-5 et R.6111-39 du Code de la santé publique). Le lieu d’hospitalisation dépend du caractère somatique ou psychiatrique de la prise en charge, ainsi que du niveau de soins (2 ou 3) nécessaire à l’état de santé du patient détenu (voir « Comment s’organisent les soins en prisons ? »).

En matière somatique, les soins de niveau 2 sont réalisés dans l’hôpital de proximité (article D.391 du Code de procédure pénale et Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019). Il s’agit d’hospitalisations de très courtes durées (48 heures maximum), telles des consultations externes, des interventions bénignes, des examens spécialisés ou des cas d’urgence (en cas de pronostic vital engagé ou nécessitant un diagnostic ou un soin immédiat). Les personnes détenues doivent en priorité être accueillies dans des chambres sécurisées (circulaire NOR : JUSKO640033C du 13 mars 2006 relative à l’aménagement ou à la création de chambres sécurisées).

Il peut être dérogé à cette règle lorsque le plateau technique de l’hôpital de proximité n’est pas adapté à la prise en charge du patient, en l’absence de lit disponible ou si son état de santé « nécessite le recours à un service très spécialisé » (Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019). La personne détenue est alors orientée vers l’établissement de santé adapté le plus proche. Les hospitalisations pour accouchement ont ainsi toujours lieu dans un service adapté à l’état de santé de la mère et du nouveau-né. Exceptionnellement, le délai maximal de 48 heures en hôpital de rattachement peut également être prolongé lorsque le temps d’accès à l’UHSI est très important et que la durée d’hospitalisation restante estimée est courte.

Les soins somatiques de niveau 3 (c’est-à-dire de moyenne et longue durée) sont en principe dispensés dans l’une des huit « unités hospitalières sécurisées interrégionales » (UHSI) situées à Lille, Lyon, Marseille, Toulouse, Bordeaux, Nancy, Paris et Rennes (article D.391 du Code de procédure pénale, arrêté NOR : MESH0022669A du 24 août 2000 relatif à la création des unités hospitalières sécurisées interrégionales destinées à l’accueil des personnes incarcérées et note DAP/DGOS du 5 juillet 2013 sur le ressort géographique des UHSI). L’hospitalisation peut aussi avoir lieu au sein de l’établissement public de santé national de Fresnes (EPSNF) ou, de façon exceptionnelle, en chambre sécurisée à l’hôpital de rattachement (voir plus haut).

Les UHSI ont une compétence médico-chirurgicale pour accueillir les personnes détenues (mineures et majeures) adressées par les médecins des unités sanitaire pour des séjours de plus de 48 heures. Elles sont situées dans des centres hospitaliers universitaires (CHU) et bénéficient du plateau technique de l’hôpital. Les missions de surveillance et de sécurité sont toutefois confiées aux personnels pénitentiaires. L’EPSNF dispose quant à lui de services de médecine, de soins de suite et de réadaptation (SSR), permettant une hospitalisation des personnes dont l’état de santé nécessite une prise en charge prolongée ou des soins de rééducation importants.

En matière psychiatrique, les soins de niveau 2 sont prodigués en hospitalisation de jour, au sein des unités sanitaires, par les services médico-psychologiques régionaux (SMPR). Ainsi, les 26 établissements pénitentiaires sièges de SMPR doivent en principe être en mesure de proposer aux patients détenus dans la zone géographique de son ressort une prise en charge en hospitalisation de jour. Celle-ci a lieu en détention, sur décision du psychiatre du SMPR et du médecin de l’unité sanitaire, et le plus souvent en cellule d’hébergement dédiée permettant un isolement temporaire de la personne détenue.

Les soins psychiatriques de niveau 3 sont pour la plupart réalisés dans des « unités hospitalières spécialement aménagées » (UHSA). Ces unités ont vocation à prendre en charge des personnes détenues nécessitant des soins psychiatriques en hospitalisation complète (voir « Les soins psychiatriques – Qu’est-ce qu’une UHSA ? »). En l’absence d’UHSA ouverte dans le ressort territorial d’un établissement pénitentiaire ou en l’absence de place disponible, l’hospitalisation peut néanmoins se faire au sein d’un « établissement de santé autorisé en psychiatrie » (article L.3222-1 du Code de la santé publique). Enfin, lorsque l’état de santé du patient détenu requiert la mise en œuvre de protocoles de soins psychiatriques intensifs et de mesures de sécurité particulières, une admission en « unité pour malades difficiles » (UMD) peut être décidée (voir « Les soins psychiatriques – Qu’est-ce qu’une UMD ? »).

Quant aux personnes détenues qui ne souhaitent pas être soignés dans un établissement public, ils ne pourront être admis dans un établissement privé que sur décision du directeur interrégional des services pénitentiaires. Ils devront alors assumer entièrement les frais découlant de cette prise en charge.

La décision d’hospitaliser une personne détenue est prise par le médecin traitant de l’unité sanitaire (ou par le SAMU en cas d’urgence), après entente avec ses confrères de l’hôpital. En matière de soins somatiques, le consentement éclairé du patient est en principe nécessaire.

En revanche, lorsqu’une personne détenue nécessite des soins « en raison de troubles mentaux rendant impossible son consentement et constituant un danger pour elle-même ou pour autrui », son hospitalisation peut être décidée sans son consentement (articles D.398 du Code de procédure pénale et L.3214-3 du Code de la santé publique). Dans ce cas, le préfet du département de l’établissement pénitentiaire d’affectation (le préfet de police à Paris) prononce par arrêté son admission en psychiatrie, sur la base d’un certificat médical circonstancié délivré par le médecin référent de l’unité sanitaire ou du SMPR. Il est à noter que « le certificat médical ne peut émaner d’un psychiatre exerçant dans l’établissement d’accueil. »

En dehors de ce cas de figure et afin de prévenir au mieux les évasions, « la personne détenue est avertie une demi-journée à l’avance de son hospitalisation. » (Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019). Son consentement (ou celui du titulaire de l’exercice de l’autorité parentale lorsqu’il est mineur) doit être recueilli par l’unité sanitaire ayant proposé l’hospitalisation et ce préalablement au départ.

Le médecin de l’unité sanitaire (ou du SAMU en cas d’urgence) indique les conditions dans lesquelles doit s’effectuer le transport vers l’hôpital : type de transport (ambulance, VSL ou véhicule administratif), mode de transport (couché, assis), etc.

L’administration pénitentiaire assure quant à elle l’escorte de la personne détenue selon des modalités strictement définies.

La personne détenue hospitalisée, que ce soit au sein de l’hôpital de proximité ou en UHSI, UHSA ou à l’ESPSNF, est considérée comme continuant à subir sa peine ou, s’il elle est prévenue, comme placée en détention provisoire (article D.395 du Code de procédure pénale).

L’hospitalisation dans un établissement de santé éloigné de l’établissement pénitentiaire d’origine implique généralement un changement d’affectation vers la prison de rattachement de la structure de santé, ce qui entraîne une « levée d’écrou simplifiée » (articles D.149-1 et D.314-2 du Code de procédure pénale). À l’issue de l’hospitalisation, le détenu est en principe réaffecté dans son établissement d’origine, mais il peut aussi, si cette réintégration n’est pas possible, être définitivement affecté dans la prison située à proximité de l’hôpital. Ce changement d’écrou entraîne généralement un changement de la juridiction compétente en matière d’application des peines, compliquant parfois les procédures d’aménagement déjà en cours.

Lors d’une hospitalisation, les règlements pénitentiaires demeurent applicables « dans toute la mesure du possible », notamment en ce qui concerne les relations avec l’extérieur (article 14 du règlement intérieur type des établissements pénitentiaires annexé à l’article R.57-6-18 du Code de procédure pénale).

Le patient détenu peut en principe recevoir la visite de ses proches, de son avocat, de l’aumônier ou d’un visiteur de prison, à condition qu’ils soient titulaires d’un permis de visite. Le permis obtenu préalablement à l’hospitalisation reste donc en principe valable. En revanche, si la délivrance des permis de visite pour les personnes hospitalisées dans un établissement dédié à recevoir des personnes détenues (UHSI, UHSA et EPSNF) relève de la compétence du chef d’établissement, cette compétence revient au préfet pour les personnes détenues dans un hôpital de proximité (hors UHSI) et en UMD (article L.57-8-10 du Code de procédure pénale). Dans ce dernier cas, le chef d’établissement est tenu de « transmettre à l’autorité préfectorale compétente les permis de visite qu’il a délivrés dans l’intérêt de la personne détenue concernée, afin d’informer cette autorité des autorisations dont bénéficiaient déjà les proches de l’intéressée. » (circulaire NOR : JUSK11400029C du 20 février 2012 relative au maintien des liens extérieurs des personnes détenues par les visites et l’envoi ou la réception d’objets). En pratique, il arrive souvent que le préfet n’autorise pas les visites ou les limite à des cas particuliers (personne en fin de vie, par exemple) et en restreigne l’exercice. Par ailleurs, la courte durée d’hospitalisation dans les hôpitaux de proximité ne permet généralement pas d’organiser des visites. Bien souvent, le détenu aura été réaffecté en détention avant que l’autorisation de le visiter ne soit obtenue.

En revanche, dans les UHSI et les UHSA, prévues pour des hospitalisations de moyenne ou longue durée, de véritables parloirs sont organisés en box, aux jours et horaires prévus par le règlement. Lorsque des motifs médicaux le justifient, les visites peuvent avoir lieu directement dans la chambre. Dans tous les cas, les visites doivent s’effectuer sans la présence du personnel pénitentiaire.

L’accès au téléphone n’est en revanche possible que sur prescription médicale, ou qu’après transmission par l’établissement pénitentiaire des numéros de téléphone préalablement autorisés et vérification par un personnel de santé de l’identité des interlocuteurs (Guide méthodologique relatif à la prise en charge sanitaire des personnes placées sous main de justice, 2019).

Quant au droit de correspondre, il obéit aux mêmes règles que celles en vigueur en détention. Toutefois, l’adresse postale restant celle de l’établissement pénitentiaire, les délais d’acheminement du courrier sont souvent allongés en raison du transfert du courrier.

Le régime disciplinaire continue également de s’appliquer au détenu hospitalisé. En cas de manquement à la discipline, un compte rendu d’incident est rédigé par le personnel pénitentiaire. Néanmoins, la commission de discipline ne se réunira que lorsque la personne détenue aura réintégré l’établissement pénitentiaire. Des fouilles des personnes détenues et un contrôle des chambres peuvent aussi être réalisés par le personnel pénitentiaire en tenant compte de l’état de santé de la personne détenue hospitalisée.

Les possibilités de cantiner sont également souvent plus limitées. Le détenu hospitalisé peut être autorisé par le chef d’établissement pénitentiaire à emporter une somme d’argent liquide provenant de la part disponible de son compte nominatif, afin d’effectuer des dépenses courantes à l’intérieur de l’hôpital.

En pratique, ces régimes apparaissent souvent plus contraignants qu’en détention, et « la dureté de ces conditions de séjour conduit de nombreuses personnes détenues à refuser une hospitalisation. » (CGLPL, avis du 14 octobre 2019 relatif à la prise en charge des personnes détenues atteintes de troubles mentaux). Les patients détenus restent le plus souvent confinés dans leur chambre, sans possibilité de sortir à l’extérieur, y compris en UHSI où il n’existe généralement pas de cour de promenade.

L’interdiction du tabac dans les hôpitaux est aussi très contraignante lorsqu’il n’existe pas de cour de promenade à l’UHSI.

Le choix du dispositif de sécurité peut toujours faire l’objet d’une contestation devant le juge administratif.

Il peut être saisi dans le cadre d’un référé en vue de prévenir ou de faire cesser l’atteinte au droit à la confidentialité des soins et/ou au droit à la dignité humaine. Le Conseil d’État a toutefois jusqu’à présent considéré que la « présence d’un agent des services pénitentiaires dans la salle d’examen » ne suffit pas, « dès lors que la confidentialité des soins est respectée », à provoquer un traitement inhumain et dégradant (CE, 24 juillet 2009, n°324555).

Il est également possible de solliciter du juge la réparation du préjudice subi du fait des conditions d’hospitalisation. Le fait de soumettre un détenu au port d’une chaîne d’accompagnement en plus du port des menottes et de l’avoir maintenu menotté pendant l’examen pratiqué en présence de trois personnels pénitentiaires a ainsi été considéré comme « inadapté » et non « justifié », s’agissant d’une personne qui avait bénéficié quelques jours plus tôt d’une permission de sortir de plusieurs jours et qui se trouvait à moins d’un an de sa fin de peine, et constitutif d’une faute de nature à engager la responsabilité de l’État (TA Amiens, 4 février 2010, n° 0801519). De même, il a été considéré, pour une personne placée en rétention administrative, que l’utilisation d’entraves aux chevilles, alors qu’elle se trouvait dans un état d’affaiblissement et n’avait pas manifesté de « signe de dangerosité pour [elle]-même et pour autrui », était constitutif d’un traitement inhumain au sens de l’article 3 de la convention européenne des droits de l’homme de nature à engager la responsabilité de l’administration (CAA Bordeaux, 1er mars 2012, n° 10BX01273).

À plusieurs reprises, la France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) pour « traitement dégradant » au vu des mesures de sécurité disproportionnées imposées à un détenu à l’hôpital. Dans l’arrêt Duval du 26 mai 2011, les juges de la CEDH ont ainsi considéré comme « disproportionné au regard des nécessités de sécurité » le port des menottes et entraves, lors de plusieurs extractions et consultations médicales, imposé à un détenu de soixante et un ans porteur d’une prothèse à la hanche. Ils ont estimé ces mesures d’autant plus disproportionnées qu’elles ont été combinées à la présence constante de surveillants ou de policiers lors d’examens médicaux, dont certains présentaient un caractère intime.