Mettre plusieurs détenus dans une même cellule,
Si possible un de plus que le nombre de couchettes
Et même deux ou trois autres, si l’procureur vous aide.
Fermez les portes à clé, ne laissez rien sortir,
Ni en activité [ni] même en permission,
Et surtout pas en sport, ça foutrait tout en l’air !
Profitez du Covid et des confinements
Pour imposer encore plus de sécurité
Qu’on en applique dehors, il faut en profiter !
La période idéale pour ce type de cuisine
C’est bien évidemment l’été, la saison chaude
Quand les ventilateurs ne ventilent rien du tout.
Pour pimenter tout ça, mélangez vieux et jeunes
Osez le métissage de couleur et d’ethnie
Faites se télescoper les différentes cultures !
Et puis laisser couver, sans donner d’perspectives
Ni visibilité, et l’moins d’infos possible
À tous ces détenus entassés en prison.
Vous avez fait l’plus dur, allez vous reposer,
Patientez, la chimie va alors opérer
C’qu’on appelle en physique « la moindre résistance » !
Les tensions existantes vont très vite augmenter
Mais chacun f’ra semblant de n’pas le remarquer
De peur de déclencher de graves hostilités !
Chacun f’ra ce qu’il veut, quand il veut, comme il veut
Pour répondre aux provocs, pour imposer sa loi
Ou bien deviendra sourd, aveugle et puis muet.
Bientôt, pour l’un d’entre eux, la coupe sera pleine
Et quand il craquera, ça sera explosif,
Y aura des cris, des pleurs, du sang, des lésions !
Des consignes s’ront données de n’pas intervenir,
De ne pas s’en mêler, de ne pas s’impliquer,
De ne pas se risquer, d’laisser le temps passer.
« … Et comme y a plus de place, on n’peut pas les changer !
Et si on intervient, on risque de se brûler !… »
Alors on ne fait rien, on laisse mijoter.
La cocotte-minute a très bien fonctionné,
La réaction en chaîne peut maintenant commencer
Car il y en a autant qu’il y a de cellules !
Mais qui donc apprécie ce genre de cuisine ?
Comme toujours, la prison qui va en profiter
Pour encore justifier plus de sécurité…
Comme toujours, l’ministère qui va se justifier
De construire d’autres cellules au lieu de les vider…
Comme toujours le public qui va avoir la preuve
Que ces foutus détenus méritent bien d’être là
Puisqu’ils ne savent pas juste vivre en société !
Par Pakito
Ce texte est paru dans la revue de l’Observatoire international des prisons – DEDANS DEHORS n°126 – Surpopulation carcérale : les personnes détenues prennent la parole