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À Fleury-Mérogis, une détenue porte plainte pour viol contre une surveillante

Une femme détenue a porté plainte pour viol et violences volontaires à l’encontre d’une surveillante gradée de la maison d’arrêt des femmes (MAF) de Fleury-Mérogis. Les faits se seraient déroulés le 28 décembre, dans le cadre d’une fouille. Une enquête est ouverte par le tribunal judiciaire d’Évry.

Ce matin du 28 décembre, Madame G. est emmenée à l’infirmerie après avoir ingéré des médicaments. Lors du mouvement, elle fait tomber un téléphone portable, dont la possession est interdite en détention. Elle tente alors de le ramasser, avant d’être « plaquée violemment contre la porte des promenades » par quatre surveillantes, détaille-t-elle dans la plainte qu’elle a rédigée le jour-même. « J’ai essayé de me débattre car je ne comprenais pas pourquoi elles continuaient de me faire mal […] alors que les gradées avaient récupéré mon téléphone, et que je ne me suis pas montrée agressive », explique Madame G. « Elles m’ont ensuite maintenu la tête baissée et les mains tenues dans le dos […] pour que je passe à la fouille intégrale. » La détenue indique, toujours dans la plainte déposée, qu’elle se sentait mal en raison des médicaments qu’elle avait avalés. « Je leur ai dit que j’allais m’évanouir mais elles m’ont plaquée au mur, me tenant chaque bras et la nuque. Je suis tombée une première fois, puis elles m’ont relevée et la gradée a déchiré mes sous-vêtements, je suis retombée dans les pommes, puis une fois relevée, je me suis vomi dessus. […] La gradée m’a inséré un doigt dans le vagin et a écarté mes fesses. »

Sept codétenues ont témoigné, par écrit, de la détresse de Madame G. après cet évènement. En promenade l’après-midi, celle-ci serait « arrivée en pleurs, tremblante, totalement désorientée », écrit l’une. « Je sors en promenade à 15 heures, et j’aperçois Madame G. tremblante, pâle de visage, avec les yeux gonflés. Je constate qu’elle est en état de choc », décrit une autre.

Le compte-rendu d’incident (CRI) rédigé à la suite de l’intervention livre une autre version des faits, selon laquelle la détenue ramasse le téléphone immédiatement après sa chute « et tente de le mettre dans ses parties intimes. Ne voulant pas le remettre suite aux multiples injonctions faites par la première surveillante, la détenue a été maîtrisée et menée en salle de fouille. À la suite de la fouille corporelle, le téléphone a été retrouvé dans le pantalon ». Sollicitée par l’OIP sur le déroulement de ces évènements, l’administration pénitentiaire invoque le « comportement virulent » de la détenue et son refus de remettre le téléphone aux surveillantes, justifiant la maîtrise et le recours à la fouille au cours de laquelle l’objet aurait finalement été saisi.

L’administration évoque également « les images de vidéo-surveillance » – des images auxquelles l’avocat de Madame G. n’a jamais eu accès, ­sur lesquelles la surveillante visée par la plainte « est vue sur la coursive le temps de la fouille. Elle n’est rentrée dans la cellule que quelques secondes pour en ressortir avec le téléphone », assure la direction de l’administration pénitentiaire (Dap). Pour autant, ces images ne permettent pas de savoir ce qu’il s’est passé pendant ce laps de temps à l’intérieur de la cellule. Mais, répond l’administration, « tous les témoignages écrits des personnels convergent vers les mêmes faits et contredisent les éléments rapportés par la personne détenue ».

Convoquée en commission de discipline pour possession d’objet illicite et insultes proférées à l’encontre d’un membre du personnel de l’établissement, Madame G. a été relaxée – alors même qu’elle ne niait ni la détention du téléphone, ni les insultes. « Cette décision de la commission laisse bien penser que le doute subsiste quant à la véracité des écrits des surveillants et les circonstances de la fouille subie par Madame G. », assure l’avocat de cette dernière. En 2019, l’OIP publiait un rapport sur les violences commises par des agents pénitentiaires à l’encontre des personnes détenues, mettant en lumière les rouages qui permettent à ces violences de perdurer. Il démontrait notamment comment ces actes se déroulent majoritairement hors-champ des caméras et obéissent à la loi du silence, rendant la recherche de la vérité particulièrement compliquée.  En l’absence de preuve, la parole du détenu a souvent bien moins de poids que celle de l’agent pénitentiaire. Les comptes-rendus d’incident produits par les surveillants à l’appui de leurs témoignages sont peu remis en question, alors même que de nombreuses affaires font état d’écrits falsifiés.

S’il appartiendra à la justice de se prononcer sur les faits allégués, le témoignage de Madame G. fait écho à d’autres signalements reçus par l’OIP, visant la pratique des fouilles à la MAF de Fleury. En mai 2021, une personne détenue dénonçait avoir été placée à l’isolement après avoir refusé de se soumettre à une fouille interne en l’absence d’un médecin. Une autre décrivait, en 2020 et 2021, des fouilles à nue pratiquées sur des détenues les unes à la vue des autres et en présence de nombreux agents. En 2019 déjà, le Contrôleur général des lieux de privations de liberté émettait des critiques sur le régime de fouille appliqué aux femmes détenues, à l’issue d’une visite de l’établissement : « Le nombre de fouilles par palpation ou intégrales est apparu abusif. Leurs conditions n’ont pas été constatées comme globalement respectueuses de la dignité des personnes détenues. »

par Pauline Petitot

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