La section française de l'Observatoire international des prisons (OIP) informe des faits suivants :
Au mois de juillet dernier, un détenu du centre de détention de Val-de-Reuil a subi, à l'hôpital d'Elbeuf, une coloscopie sous les yeux d'un surveillant pénitentiaire. Un traitement attentatoire à la dignité humaine et au principe de la confidentialité des soins susceptible de se renouveler, une nouvelle coloscopie devant intervenir prochainement.
T. J., âgé de 55 ans, est suivi par l’Unité de consultation et de soins ambulatoires (UCSA) au centre de détention de Val-de-Reuil. L’UCSA estimant que le patient développait possiblement un cancer du côlon, elle a programmé une consultation spécialisée à l’hôpital de proximité. Le 11 juillet 2008, T.J a ainsi été extrait vers le Centre Intercommunal d’Elbeuf afin d’y subir une coloscopie. Bien qu’impliquant un examen intime, la coloscopie, réalisée à la demande de T.J. sous anesthésie locale, s’est déroulée en présence d’un surveillant assurant une garde statique.
Interrogé par l’OIP, le personnel soignant du centre intercommunal d’Elbeuf a confirmé les faits, précisant que le surveillant présent avait nécessairement eu vue sur l’intéressé lors de l’examen. Il a ajouté que l’état de santé de M. T.J. nécessitait qu’un suivi et des examens réguliers soient pratiqués.
Sollicitées à de multiples reprises par l’OIP, ni la direction inter-régionale des services pénitentiaires de Lille, ni celle du centre de détention de Val de Reuil n’ont souhaité s’exprimer sur cette affaire.
L’OIP rappelle que:
– l’article 1110-2 du Code de la santé publique énonce que « la personne malade a droit au respect de sa dignité » ;
– le Comité de prévention contre la torture du Conseil de l’Europe (CPT) a rappelé aux autorités françaises en 2005 que « tous les examens/consultations/soins médicaux de détenus doivent toujours s’effectuer hors de l’écoute et – sauf demande contraire du médecin concerné dans un cas particulier – hors de la vue du personnel d’escorte » et qu’ « examiner des détenus soumis à des moyens de contrainte est une pratique hautement contestable tant du point de vue de l’éthique que du point de vue clinique et elle n’est pas de nature à créer une relation de confiance appropriée entre le médecin et le patient. » (CPT/Inf (2005)21, p.24 §48) ;
– le Conseil d’Etat a jugé que les mesures de sécurité prises par les surveillants à l’hôpital devaient « assurer en toute hypothèse la confidentialité des relations entre les détenus et les médecins qu’ils consultent » (CE, 30 mars 2005, Observatoire international des prisons).