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Ducos : les autorités judiciaires et pénitentiaires saisies après des violences commises par un gradé sur deux détenus

Un gradé du centre pénitentiaire de Ducos en Martinique est mis en cause pour des violences qui auraient été commises le 4 février dernier à l’encontre de deux détenus. La direction de l'établissement aurait aussitôt saisi le parquet et la direction interrégionale des services pénitentiaires (DISP) et mis à l'abri les éléments de preuve : une réaction exemplaire, mais malheureusement rare.

D’après les informations recueillies par l’OIP, un jeune détenu du centre pénitentiaire de Ducos aurait été isolé dans un couloir et frappé par le gradé, le 4 février dernier, à l’issue de la promenade. Dans l’altercation, le jeune homme aurait fini par avoir le dessus, avant d’être maîtrisé par les autres surveillants. Il aurait ensuite été placé au quartier disciplinaire. Plus tard dans la journée, ce même gradé aurait ouvert la porte de la cellule d’un autre détenu et lui aurait asséné un coup de poing au visage. Les surveillants présents seraient alors intervenus pour faire sortir le gradé de la cellule et refermer la porte. Ce n’est pas la première fois que cet agent pénitentiaire est mis en cause. En juillet 2019 déjà, le père d’un jeune détenu alertait l’OIP de violences qu’il aurait fait subir à son fils.

Les deux détenus auraient été vus par un médecin, et des certificats de coups et blessures établis. Les deux incidents ont été enregistrés par les caméras de vidéosurveillance. En fin de journée, après visionnage des bandes, le directeur dit avoir saisi la direction interrégionale des services pénitentiaires et le Parquet, afin que soient engagées des poursuites disciplinaires, dont une suspension, et des poursuites pénales. Les enregistrements vidéo auraient été transmis au Procureur de la République. Selon nos informations, le jeune détenu qui avait été placé en prévention au quartier disciplinaire en aurait été extrait le soir même sur décision de la direction, et renvoyé en détention normale. Lundi 10 février, les témoins auraient été entendus par les gendarmes. Les deux détenus ayant subi des violences auraient été extraits à l’hôpital pour qu’un médecin évalue d’éventuels jours d’ITT.

En juin dernier, l’OIP publiait un rapport d’enquête[1] sur les violences commises par des agents pénitentiaires sur des personnes détenues. L’association dénonçait alors l’omerta qui règne sur ces violences, pourtant récurrentes, et pointait la carence des réponses tant politiques qu’administratives et judiciaires, et parfois sanitaires. Dans cette affaire, l’OIP déplore qu’il ait fallu de nouvelles violences pour que des mesures soient prises mais salue néanmoins la réactivité de la direction de l’établissement.

Rappelons que, lorsqu’un chef d’établissement est avisé de faits de violence, il est tenu d’en informer sa hiérarchie pénitentiaire ainsi que le parquet. Il est par ailleurs essentiel que la personne détenue qui allègue avoir été victime de violences soit informée de ses droits, qu’elle ait accès sans délai à un médecin, et que les éléments de preuve puissent être établis et conservés sans entrave. Les autorités judiciaires sont  de leur côté dans l’obligation de mener une enquête effective et approfondie, comme l’a rappelé une récente décision de la Cour européenne des droits de l’homme qui a condamné la France pour défaut d’enquête après une série de violences perpétrées à l’encontre d’un détenu[2]. Dans cette affaire, l’OIP exercera une vigilance toute particulière sur les suites qui seront données par les autorités.

Contact presse : François Bès · 06 64 94 47 05

[1] Omerta, opacité, impunité : rapport d’enquête sur les violences commises par des agents pénitentiaires sur les personnes détenues, OIP-SF, 3 juin2019.
[2] Violences de surveillants pénitentiaires : la France doublement condamnée par la CEDH, communiqué de l’OIP-SF, 6 décembre 2019.