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Conditions dégradantes de détention à Saint-Étienne : nouveau recours après un premier rejet inédit du tribunal administratif

Jeudi 9 mars, l’Observatoire international des prisons et l'Association des Avocats pour la Défense des Droits des Détenus (A3D) saisissaient le juge des référés de l’indignité des conditions de détention au centre pénitentiaire de Saint-Étienne La Talaudière. Une requête triée sans audience le lendemain même, le tribunal estimant la condition d’urgence non remplie. Cette décision va à l’encontre d’une jurisprudence clairement établie et n’arrêtera pas les associations requérantes qui s’apprêtent à déposer un nouveau recours.

Dans un référé-liberté déposé jeudi 9 mars, l’OIP et l’A3D saisissaient le tribunal administratif de Lyon des conditions de détention indignes au centre pénitentiaire de Saint-Étienne la Talaudière[1]. Les requérants demandaient que soient prises en urgences différentes mesures pour mettre fin aux atteintes graves aux droits fondamentaux des personnes qui y sont incarcérées. Par une ordonnance de tri rendue le 10 mars 2023, le juge des référés a rejeté cette requête pour défaut d’urgence : il estimait notamment que « les requérants ne justifi[aient] pas d’une situation d’urgence impliquant qu’une mesure visant à sauvegarder des libertés fondamentales doive être prise dans un délai de quarante-huit heures. »

Cette décision, comme l’appréciation qui la fonde, sont en contradiction flagrante avec la jurisprudence constante élaborée par le juge des référés en matière de conditions indignes de détention. Depuis plus de dix ans, des procédures de référé-liberté ont en effet été engagées avec succès pour agir contre les conditions indignes de nombreuses prisons : aux Baumettes, à Ducos, Nîmes, Fresnes, Remire-MontjolyNouméaFaa’a Nuutania, Lorient, Toulouse ou encore Bordeaux[2]

Certaines de ces décisions ont été rendues par le Conseil d’État en formation collégiale, ce qui leur confère une autorité particulière. Elles montrent de façon unanime que, saisi de conditions de détention similaires à celles dénoncées à la prison de Saint-Etienne, le juge des référés a toujours estimé qu’il était de son office d’ordonner à l’administration d’engager des mesures visant à améliorer la situation – même lorsqu’elles découlaient de certains facteurs structurels (surpopulation, vétusté, etc.). Dans ces affaires, l’urgence a donc systématiquement été retenue. Et comment pourrait-il en être autrement, alors que plusieurs centaines de personnes sont quotidiennement exposées à des traitements inhumains et dégradants ?

L’ordonnance rendue par le juge des référés de Lyon n’est donc pas simplement discutable. Elle va frontalement à l’encontre d’une politique jurisprudentielle claire et constante, régulièrement confirmée par des formations solennelles du Conseil d’État. Les associations requérantes redéposeront donc un nouveau recours dans les jours à venir.

Mise à jour (16 mars 2023) : Lire le référé-liberté déposé par l’OIP et l’A3D le jeudi 16 mars

Ce communiqué est co-signé par l’Observatoire international des prisons (OIP) et l’Association des Avocats pour la Défense des Droits des Détenus (A3D)

Contact presse : Sophie Larouzée-Deschamps · 07 60 49 19 96 · sophie.larouzeedeschamps@oip.org

[1] « Conditions de détention indignes à la prison de Saint-Etienne : des associations saisissent la justice », communiqué conjoint de l’OIP et de l’A3D, 9 mars 2023.
[2] TA Marseille, 13 déc. 2012, n° 1208103 ; CE, 22 déc. 2012, n° 364584; TA Fort-de-France, 17 oct. 2014, n° 1400673, CE, ord., 30 juill. 2015, n° 392043,TA Melun, 6 oct. 2016, n° 1608163 ; TA Melun, 28 avr. 2017, n° 1703085 ; CE 28 juill. 2017, n° 410677, CE, ord., 4 avr. 2019, n° 428747 et TA Guyane, 14 déc. 2022, n°2201749, CE 19 oct. 2020, n° 439372, CE, 2 mars 2021, n°449514, TA Rennes, 17 mars 2021, n°2101070, TA Toulouse, ord., 4 oct. 2021, n° 2105421, TA Bordeaux, 11 oct. 2022, n°2205214.